Musique proposée : With You Till The End - Tommee Profitt ft. Sam Tinnesz. (En média).
West.
La brûlure insupportable qui broie chacune de mes côtes fait rage. La douleur lancinante qui pulse dans mon genou me donne envie de hurler. La pièce tourne autour de moi en même temps que mon rythme cardiaque s'affole. J'ai l'impression que mon corps va me lâcher une deuxième fois, que je ne vais pas tenir le coup. Malgré tout, je m'accroche. Je m'accroche avec tout l'acharnement qu'il me reste, parce que la seule chose qui m'importe désormais, c'est Wayne. L'entendre crier à plein poumons me pulvérise le cœur, ou du moins ce qu'il en reste. Je me sens tellement... Putain ! Ni en mesure de le soulager, ni en mesure de l'aider et encore moins capable de le protéger, je reste le même connard impuissant qui n'a jamais pu sauver qui que ce soit. Ils sont morts. Ils sont tous morts devant moi, à cause de moi, et l'histoire est en train de se répéter une énième fois. J'ai beau me démener, leur offrir tout ce que j'ai, les aimer de tout mon être... l'amour n'a jamais secouru personne, et m'aimer moi a toujours été comme courir vers une embuscade : personne n'en ressort jamais indemne.
Les gémissements de Wayne diminuent peu à peu alors que ses prunelles émeraude se laissent engloutir par ses paupières. Sa respiration devient rauque, bruyante, et j'ai l'impression qu'il abandonne. Lui aussi, il va mourir sous mes yeux.
— Wayne. Wayne, ne lâche pas ! m'égosillé-je, une peur infernale me lacérant les boyaux.
James m'ordonne de me taire, mais je ne daigne même pas jeter un coup d'œil à cette crevure. Soudain, une explosion fait vibrer le hangar tout entier, et tout le monde se fige. Inquiet, je lance un regard vers celui que j'ai toujours considéré comme mon frère. Gale me sourit faiblement et je comprends à son expression qu'il me lance un dernier au revoir. La séance de torture arrive bel et bien à son terme. Je ferme les yeux un court instant et sens de nouvelles larmes glisser le long de mes joues. Des larmes plus chaudes, plus profondes, plus vivantes... Des larmes d'adieu. Lorsque je finis par reporter mon attention sur les traits fatigués de mon meilleur ami, je remarque qu'il me scrute. Il a besoin de moi, et j'ai besoin de lui. Nous allons faire face dignement, rester ensemble jusqu'au bout. Ian fait quelques pas, puis dépose le canon de son calibre 45 sur la tempe de Gale, et la panique m'étreint. Rassurant, mon frère hoche la tête, et j'entends sa voix grave résonner dans mon esprit pour me promettre que tout se passera bien. Le torse à deux doigts d'éclater, je lui rends son salue sans vraiment réussir à masquer mon angoisse. Ses prunelles grises ancrées dans les miennes, il se met à murmurer. Il prononce une phrase que je perçois à peine, mais qui provoque un raz-de-marée à l'intérieur de moi :
« Where'd you go ? »
Ému, je m'efforce de lui sourire avant de compléter les paroles de cette chanson de Fort Minor qui a toujours été la nôtre :
« I miss you so... »
Ce morceau... Notre échappatoire face à la vie, à la mort et à l'absence de ceux qui auraient dû être là pour nous voir grandir. Chaque fois que l'univers pesait trop lourd, chaque fois que nous nous sentions trop seuls, ces quelques notes, ces quelques mots nous rassuraient. Ce texte nous parlait, on le comprenait, et quand nous étions tous les deux allongés dans mon lit, l'un à côté de l'autre, on le laissait nous rattraper au vol. Comme si on était seuls contre le monde, mais à deux. Comme si, le temps d'une chanson, on retournait à la maison.
Perdu dans mes pensées, je n'aperçois Peter que lorsque son arme se dépose sur mon crâne endolori. La musique passe, les larmes de mon frère dégringolent et nous finissons le morceau dans un souffle commun :
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N'aie Pas Peur
ActionNelson Mandela a dit que le courage n'était pas dénué de peur, mais composé de notre aptitude à la surmonter. Je ne crois pas qu'il ait raison. Je n'ai pas vaincu ma peur, je ne suis pas passé au-dessus des tremblements qui ravageaient mon corps. J...