Installée à son bureau, Catherine était concentrée sur sa lecture avec une tasse de thé fumante à côté d'elle. Le mélange de parfums d'agrumes et de cannelle emplissait la pièce. Mon goût très prononcé pour le thé me venait d'elle. Originaires de Bristol, une ville d'Angleterre, ses parents avaient immigré au Canada pour s'offrir un meilleur avenir. Ils avaient enseigné à Catherine l'art du thé à la British et elle me l'avait transmis. Du moins, elle avait essayé.
— Bonjour ma sœur, puis-je entrer? demandai-je avec une pointe taquine.
— Ashley mon ange, entre voyons, je t'attendais.
Je la serrai tendrement dans mes bras tout en respirant son parfum, le même depuis toutes ces années. J'aimais cette constance, elle me rassurait, m'apaisait comme une ancre maintenant un bateau au port.
— Tu m'as l'air exténuée?
— Hum, tu n'as pas tort. C'est un peu la folie à l'hôpital en ce moment.
— Encore ton Docteur Chang qui abuse de toi.
— Correction, c'est moi qui abuse de son talent.
— Si tu le dis, mais fais attention à toi et prends le temps de te nourrir. Sinon, je viendrai en personne dire ma façon de penser à ton Michel-Ange.
Je n'eus aucune difficulté à imaginer la scène. Sous son mètre soixante-cinq et ses cinquante-trois kilos, elle n'en ferait qu'une bouchée, il n'avait aucune chance face à elle. Docteur CHANG, éliminé par K.O. Comme je tenais à ma carrière, autant éviter que cela ne se produise.
— Vu que tu ne me laisses pas le choix, je vais recommencer à me nourrir comme un être humain normal, c'est promis. Et pour te montrer ma bonne foi, avant de me mettre dans les chiffres, je vais me chercher de quoi manger en cuisine.
De retour avec une part de tarte au potimarron et un morceau de gâteau au chocolat, je commençai à faire le point sur les dons envoyés par courrier.
— Eh bien, eh bien, tu seras contente d'apprendre que dans ces petites enveloppes, nous avons un total de quarante-huit mille deux cent quatre-vingt-douze dollars et soixante-quinze cents.
— Oh que Dieu bénisse nos donateurs. C'est merveilleux, Ashley. Et tu remercieras Claire également de ma part, j'ai vu votre don, c'est vraiment très généreux à vous deux.
— Avec plaisir, dis-je en avalant ma dernière bouchée de gâteau au chocolat.
Catherine fronça les yeux et les leva au ciel avant d'ajouter :
— Suis-je donc sotte ! l'entendis-je marmonner. La vieillesse n'est pas de tout repos, j'ai oublié de te remettre une enveloppe. Tiens, mon ange, ajouta-t-elle en me remettant le pli.
Étrange! Son timbre de voix cachait un je-ne-sais-quoi de malicieux et je mettrais ma main à couper que ce changement était lié au contenu de cette lettre. L'enveloppe était légèrement plus épaisse que toutes celles que j'avais ouvertes précédemment. Le timbre apposé en haut à droite attira mon attention. Il montrait une jeune fille en robe blanche, avec des cheveux châtain foncé, elle se trouvait dans un champ de blé, le bras tendu afin d'attraper la ficelle d'un ballon rouge qui s'envolait dans le ciel d'un bleu immaculé. Le visage de la jeune fille n'était pas visible dans sa totalité, mais je percevais le plaisir qu'elle ressentait de se retrouver là, avec le vent faisant onduler le bas de sa robe, soufflant sur sa peau réchauffée par les rayons du soleil. Pendant une fraction de seconde, j'enviai sa légèreté et le sentiment de liberté qu'elle dégageait.
L'écriture sur l'enveloppe était appuyée, les lettres tracées avec netteté formaient un ensemble équilibré. Une certaine sensualité se dégageait de cette écriture. Étrangement, j'étais impatiente de connaître l'identité de ce donateur. Un chèque de vingt mille dollars accompagnait la lettre manuscrite. Elle était à l'attention de Catherine et son auteur n'était autre que ... Jack. Je ne sus combien de temps je restai inerte devant le courrier, mais le raclement de gorge de Catherine me rappela que je n'étais pas seule.
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Notre valse en trois temps - tome 1 - Les secrets
Roman d'amourIl y a des rencontres qui bouleversent une vie. Qui vous font entrevoir un avenir terrifiant mettant à nu toutes vos fêlures. Et à 27 ans, mes blessures d'hier me tourmentaient toujours mais j'avais appris à les enfouir très profondément derrière le...