📜Les Damnés de Sunset Valley pt.2

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Lorsque Charlie se rua dans le bureau du mentor juste après que Thibault se soit enfermé dans la salle à manger, deux grandes déceptions perturbèrent l'hystérie instinctive qui faisait trembler son corps : premièrement, parce que deux satanistes l'avaient suivi dans son sillage (et, non pas qu'elle désirait voir Thibault égorgé, mais perdre de vue ces malades habillés en blanc lui aurait fait un bien fou...) et secondement parce que Gregor ne se trouvait pas dans ce fameux bureau qu'il avait toujours refusé de leur ouvrir : ce monstre qu'ils avaient osé considéré comme leur mentor s'était tout bonnement évanoui dans la nature. Où était-il en ce moment et que préparait-il encore de pire ? Personne ne pouvait le savoir et, malheureusement, Charlie n'eut pas le temps d'y songer trop longtemps.

"La chouette, viens-là ! "

Elle fit volte face et, à la vue de ces deux types qui venaient d'entrée dans le bureau, sentit tous les poils de son corps se hérisser. Le moindre son qui lui venait - leurs pas sur le parquet, les cris à l'étage, le chant du vent dans la nuit, le tic-tac de l'horloge dans un coin de la pièce... - était amplifié, et Charlie eut presque l'impression de pouvoir deviner tout ce que ces hommes qui n'avaient rien d'humain comptaient lui faire.

L'un d'eux, après deux pas lents, se rua vers elle. Charlie attendit le dernier moment pour éviter la lame de son couteau de cuisine qui perça les bibliothèques dans son dos et coinça dans le bois qui craqua. Elle en profita et saisit l'assiette remplie d'un cœur cru posée sur le bureau qu'elle enfonça dans le visage de l'homme qui se plia en deux. Elle lui arracha des mains le couteau et le jeta au loin mais, dans l'instant qui suivit, un poids immense la souleva du sol et la fit frapper de plein fouet la bibliothèque dont de nombreux ouvrages tombèrent au sol. Elle hurla de stupeur et de douleur, éberlué, puis se mit alors à songer à son père et à Jean-Philippe, en train de dormir chez le docteur Norrington, à Lila qui devait certainement penser à leur dernière discussion et à la fille excentrique et invivable qu'elle était... Elle songea à tout cela et, en l'espace d'une seconde, se sentit tétanisée par la rage : rage de ne pas avoir pu vivre une vie normale, rage de ne pas avoir pu donner le meilleur aux siens, rage d'avoir été utilisée par des malades pour servir le chaos, rage d'avoir laisser son père être agressé pour elle, rage d'avoir contre son gré tué sa propre mère.

De ses mains que l'homme dans son dos retenait, elle griffa toute chair qui lui passait et mordit sauvagement dans les doigts qui tentaient de la faire taire. Les couinements du sataniste lui donnèrent de la force, et c'est en se secouant violemment qu'elle repoussa son ennemi. Par chance, celui-ci n'avait qu'un tout petit poignard, semblable à un coup-papier, et n'eut que le temps de lui couper la cuisse avant qu'elle ne morde la chair de son poignet pour lui faire lâcher l'arme. Elle recula, sauta sur le corps inconscient du premier dont elle s'était chargé, puis se jeta sur le second et prit sa tête qu'elle cogna avec toute la force qu'elle pu contre la bibliothèque. Tous les livres glissèrent sur le parquet, tous, sauf un seul qui s'enfonça dans le mur : dans l'instant qui suivit, la cloison s'ouvrit en deux et une nouvelle salle apparue, bétonnée, dénuée de fenêtres et de meubles. Charlie rejeta l'homme sur le sol de la pièce secrète, s'assura qu'il avait été assommé par le choc puis reprit sa respiration. Elle jeta un court regard circulaire, toute alerte, et remarqua une chose : cette pièce avait été habitée. Cela se sentait. Cela se voyait. Il y avait des habits froissés en tas dans un coin, un pied à perfusion en acier (auxquels pendaient deux sachets à perfusion évidés et ridés comme le corps d'une momie...) ainsi qu'un petit et long tuyau transparent jauni éparpillé sur le sol en pierre brut : une sonde médicale.

Les souvenirs de Léon hurlant au mentor de lui dire où se trouvait Lucas lui remontèrent alors, et elle comprit alors : c'était ici, ici que Lucas Sheefle avait été gardé durant toutes ces semaines, dans cette pièce secrète isolée du reste la maison... isolée de Maya.

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