🖤 Chapitre 1 (Maya)

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Maya Oslow venait de se réveiller d'une nuit agitée. Elle en avait l'habitude désormais, car cela faisait un certain temps qu'il la touchait et la pelotait tous les soirs pour son désir personnel. Elle en avait des courbatures tous les matins ; il fallait dire que de le voir sous les effets de l'alcool durant ces attouchements n'arrangeait jamais les choses.

Elle se leva, s'installa devant son miroir et souleva sa chemise de nuit. Elle y découvrit un corps criblé de bleus, de griffures, de blessures qui cicatrisaient à certains endroits et parsemé de plaques encore rougeâtres. Puis elle se souvint de la nuit dernière, des pleurs et des cris, du supplice qu'il lui infligeait depuis maintenant des années sans aucun scrupule.

Elle rabaissa sa chemise et descendit les escaliers qui grinçaient à chaque marche, la boule au ventre.

Son oncle, lui, était adossé dans son fauteuil en cuir marron, cigarette aux lèvres et le journal du Sunset Valley News (l'édition de ce samedi 31 août) dans les mains. 

"Bonjour mon oncle, Articula faiblement Maya."

Celui-ci ne répondit pas. La jeune brune l'ignora, puis se dirigea vers le réfrigérateur pour, comme à son habitude, préparer à manger. Elle sortit quelques morceaux de poulets, de la crème et referma ensuite le frigo ; un plat simple et rapide typiquement français (après tout on était dans le Maine et il n'y avait pas d'Etat américain plus affilié à la culture française que celui-ci). Elle sortit d'un tiroir de la cuisine une poêle qu'elle posa sur les plaques de cuissons, puis alluma par la suite celle-ci. D'un autre tiroir, elle tira ensuite une planche à découper et un couteau à la lame affutée. Son regard se figea sur le tranchant, comme hypnotisée par la dangerosité de l'objet qu'elle tenait entre les mains. Maya jeta un œil par-dessus son épaule, regardant son oncle, le couteau toujours entre ses deux mains.

Un couteau... Pour... Tuer...

Son regard dévia vers le poulet qu'elle avait sorti quelques minutes auparavant, et la lame vint charcuter le plastique qui se trouvait autour pour venir le déposer sur la planche à découper. Avec ce même couteau, elle vint taillader une multitude de petits morceaux de poulets et les fit glisser jusque dans la poêle. 

Il était presque midi quand elle eut fini de préparer à manger et de mettre la table. Elle avait aussi nettoyé et rangé le salon auparavant en désordre à cause des bouteilles d'alcool qui jonchaient le sol. Mais alors qu'elle entreprenait de monter discrètement les escaliers pour se laver, son oncle qui n'avait pas prononcé un seul mot jusque là décida de parler.

"Vas pas te laver." 

Maya se figea, une vague de frisson la parcourut. Sa voix était rauque, enrouée par l'alcool et la cigarette qu'il tenait encore entre ses doigts noueux. 

"On doit économiser l'eau, on prendra une douche ensemble ce soir".

Elle resta paralysée en bas des escaliers. Ses pensées noires ressurgirent  : ce qu'il allait lui faire... A quelle heure et pendant combien de temps ? Toutes ces questions inquiétaient et traumatisaient Maya. Chaque nuit elle pleurait à cause de lui, à cause de ce qu'il pouvait lui dire, lui faire. 

Tu as de la chance que je sois là ! De toute façon c'est de ta faute si tes parents sont morts ! Pour te faire pardonner auprès d'eux, tu vas faire tout ce que je te demande ! 

Et elle l'écoutait aveuglément, car à force d'entendre les mêmes paroles chaque jours, on finissait par les retenir, par les mettre dans un coin de sa tête pour que ces mêmes mots viennent hanter nos pensées dans les moments les plus sombres. 

Maya monta les escaliers et s'enferma dans sa sombre chambre, recroquevillée au fond de son lit. La seule personne qui arrivait à la faire sortir de cette horrible routine n'était personne d'autre que son petit ami depuis maintenant quelques mois. Lucas. Il lui manquait. Elle avait peur qu'il ne veuille plus d'elle à cause de son oncle qui lui avait coupé son forfait pendant l'été, et qu'ils n'avaient par conséquent pas pu se voir pendant deux longs mois. Que lui qui avait tant voulu aller plus loin que de simples baisers alors qu'elle en était réticente veuille mettre un terme à leur relation, la jugeant trop coincée. Elle en avait terriblement peur. Elle aurait voulu tout lui avouer, de tout ce qu'elle subissait entre ces quatre murs, mais elle était effrayée de sa réaction si elle lui expliquait son quotidien.

Nuits PourpresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant