Criminel

LXXXIX

Enes est dans sa voiture, il appelle Hicham, il dit qu'il va aller le voir, ce dernier lui répond de manière affirmative. Il ne se remet aucunement en question, pour lui, tout ce qu'il a fait était justifié, vraiment tout. La seule chose pour laquelle il s'en veut, c'est avoir fait pleurer Eymen, le reste, il s'en fout. Il allait appeler Emirhan, mais en déverrouillant son téléphone, il voit la photo qu'on a fait avec Eymen à l'hôpital. Il remarque à quel point on est heureux, il finit par balancer son téléphone et il passe une main sur son visage.

Je suis remontée dans la chambre, j'ai posé Eymen dans son berceau, j'ai pris ma tête entre mes mains et je fixe un point dans le vide. Qui aurait cru que cette journée allait se terminer de cette manière ? Quoi que, tout laisser voir que la journée allait mal se terminer. D'abord les invités, comme tante Nihal, ensuite mon père, puis Sibel. Oui, tout était fait pour que cette journée soit une journée de merde. Mais je ne pensais pas que la fin de cette journée aurait été si merdique bordel. Quelqu'un toque à la porte, mais je n'ai tellement pas la force de parler, je laisse entrer qui que ce soit. Ma belle-mère entre, elle me retrouve avec la tête entre mes mains, elle me regarde longuement, mais son regard s'arrête plus sur les tâches de sang sur le mur, elle finit par venir s'asseoir à côté de moi.

« - Maria, qu'est-ce qui s'est passé ?

- Maman, s'il te plaît...

- Non. Elle me coupe et je lève ma tête vers elle. Si ton père a eu le droit aux explications, j'ai le droit moi aussi.

- J'ai dit que je ne voulais pas que mon fils passe à la tête des affaires d'Enes plus tard, Sibel m'a dit qu'il est obligé vu que c'est le fils de Mero, qu'il ne pourra pas y échapper. Quand j'ai dit que Hamza pourrait passer à sa place aussi vu que c'est le neveu de Mero, ça ne lui a pas plu et c'est tout. D'après ton fils, j'ai mal parlé à sa sœur.

- Pourquoi tu as dit ça à Sibel ? Elle, elle a dû dire ça dans le sens où aucun n'arrive à sortir de ce monde, ton fils ne pourra pas aussi. Je regarde longuement ma belle-mère.

- Ça explique le fait que ton fils dise qu'on est tous des égoïstes mal élevés dans ma famille ? Mon père n'est qu'un homme qui pense à ce que les autres diront, Ahmet et moi nous sommes des égoïstes et ma mère pense qu'on est des colombiens. Ma mère n'est pas turque, mais elle nous a éduqué mieux que des turcs. Ah et je sais très bien pourquoi Enes dit ça de mon père. Parce qu'il a précipité notre mariage. Et bien depuis cette époque il n'a pas confiance en ton fils, parce qu'il disait qu'il pouvait à tout moment me laisser tomber et me faire passer pour une de ses putes. Elle soupire un long coup.

- Ça va s'arranger, tu verras.

- Que ça s'arrange ou non, je n'en ai rien à faire. Maman, j'ai tout encaissé, mais je n'y arrive plus. »

Elle me prend entre ses bras et elle me caresse le dos. Je n'en ai pas besoin, parce que je sais que ce n'est pas sincère, je sais qu'au fond ça la rassure qu'Enes me fasse la misère pour sa fille, pour elle, au moins il ne risque pas de délaisser sa famille pour les autres. Je suis une autre ? Bien sûr que oui. On a beau dire maman, papa, sœur ou frère, on reste une autre, celle qui est arrivée après dans la famille. Le seul qui est vraiment à mes côtés, c'est mon beau-père, et comme le pense Enes, il ne défend pas toujours les autres face à ses enfants, il essaye de rester objectif et d'agir en fonction de ça. Mais c'est trop compliqué à comprendre pour Enes.

Il est arrivé chez Hicham, ce dernier s'occupe de sa main. Il lui a mis une attelle, il s'est gravement blessé. Emirhan arrive rapidement chez Hicham, Enes a fini par l'appeler parce qu'il n'a pas envie de rentrer à la maison. Pendant que Hicham termine de s'occuper de lui, Emirhan rentre dans la pièce, il regarde Enes puis sa main.