J'ai arrêté de pleurer, mais je n'ai pas arrêté de souffrir, mes larmes ont coulé silencieusement, j'ai souffert dans le silence. Après un mois en Turquie, on est revenu en France, ça fait déjà une semaine qu'on est revenu, les invités n'ont pas cessé de venir. Mais il y en a moins maintenant. Lorsqu'ils venaient me souhaiter leurs condoléances, je revoyais sans cesse les visages de mon frère, ma belle-sœur et ma nièce... Je n'arrête pas de faire des cauchemars, je les vois se faire tirer dessus, dans différentes situations, mon cerveau tente de comprendre de quelle manière ils se sont fait tuer...
Je suis dans la chambre, j'allaite Eymen, j'ai le regard perdu dans le vide, mais mon regard tombe sur mon fils quand il me serre le doigt, je lui fais un petit sourire. Il va mieux, il n'a plus de problèmes aux poumons, on a dû le faire souffrir une nouvelle fois avec toutes les seringues, les machines, mais on a réussi à avoir une bonne nouvelle. Je le dépose dans son berceau, je pars dans la salle de bain et je passe de l'eau sur mon visage. Je ne sais pas si j'ai la force de descendre en bas, mais je dois le faire...
Je sors de la chambre, j'entends du bruit venant d'en bas, oncle Malik et Esra sont chez nous aussi, je leur ai supplié de rester, j'ai besoin d'eux, ma mère a besoin d'eux, Bruno aussi. Mon père... Il est resté en Turquie. Il va vraiment divorcer, il a commencé les procédures, bien qu'Enes a tenté de le dissuader, il n'en a rien à faire. Il a dit qu'il allait prendre Bruno aussi, mais Enes s'est énervé, il a dit que s'il tentait une chose pareille, il n'en aura plus rien à faire que c'est mon père ou non. Il m'aide beaucoup, il reste à mes côtés, il me rassure, il est au petit soin, il veut que j'aille bien, j'ai vraiment de la chance de l'avoir dans ma vie.
Quand j'arrive en bas, ma mère me fait un petit sourire. Son visage autrefois brillant de joie, son regard plein de puissance, il n'y a plus rien, juste une femme épuisée, triste et brisée. Elle vient me prendre entre ses bras, je dépose un baiser sur le haut de sa tête et je m'assois à table avec eux. Esra me fait un sourire à son tour, je lui en fait un aussi, mais il est un peu plus faible.
« - Eymen dort ? Demande mon beau-père.
- Oui, papa.
- Tu vas bien, ma belle ? M'interroge mon oncle.
- Ça va, oncle Malik, ne t'inquiète pas.
- Où est Enes ?
- Il avait du travail au bureau.
- Bon, alors je ne vais pas l'attendre. Je ne comprends pas pourquoi mon oncle dit ça. On va rentrer ce soir. Et j'emmène Carolina et Bruno avec moi.
- Quoi ? Je les regarde tous. Pourquoi ?
- Je veux qu'ils viennent avec moi, la campagne va leur faire du bien, ça va les éloigner de tout. »
Je ne dis rien, je me lève sans dire un mot de table et je sors dans le jardin. Je ferme les yeux pour empêcher mes larmes de couler, je ne pleurerai plus, c'est fini. Mais je vais continuer à souffrir dans le silence... Je perds toute ma famille... Il ne reste plus rien de ma famille... Mon frère, ma belle-sœur et ma nièce sont morts... Mon père nous a laissé tomber... Et maintenant, ma mère et mon petit frère vont partir...
Mon oncle Malik allait se lever mais Esra l'en empêche, elle se lève et elle vient dans le jardin. Je suis de dos, Esra vient près de moi, elle me regarde longuement. J'ai les yeux fermés, le visage relevé vers le ciel, les bras croisés. Elle passe son bras sur mes épaules et elle me tire contre elle, elle pose sa tête sur la mienne puis elle soupire. Elle sait que ce n'est pas facile pour nous, elle sait bien que quelques mots ne suffiront pas à nous faire du bien. En réalité, je ne suis même pas sûr que quelque chose puisse me faire du bien.
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Criminel
Любовные романыUn an éloignée de ma ville pour aller à la campagne, et je suis devenue une autre personne. Bien sûr, je n'ai jamais voulu changer, j'étais bien dans ma peau, mais j'ai dû renoncer à tout ça quand lui, celui avec qui je me sentais bien, m'a finaleme...