Enfin je pénètre dans le musée, calepin à la main. Je déambule parmi les œuvres du peintre qui se composent aussi bien d'aquarelles, de lithographies ou de dessins. Certains dessins pourraient s'apparenter à des caricatures, très colorées, mais ce qui me fascine le plus c'est la capacité de l'artiste à retranscrire les émotions de ses modèles. N'y connaissant pas grand-chose en art, je serais bien incapable d'expliquer quelles techniques le peintre a utilisé. Fort heureusement, chaque œuvre est accompagnée d'un descriptif pour permettre aux néophytes de ressortir moins ignares. Je recopie certaines informations, remplis mon sac de plaquette de présentation, mais plus l »après midi avance, plus je suis dépitée. Même si les œuvres sont multiples, je m'ennuie, non décidément Toulouse Lautrec ne m'inspire guère et je vais avoir du mal à trouver matière pour mon article. Le problème c'est que j'ai vraiment besoin de ce job d'appoint. Je change de niveau, l'exposition se déroule sur plusieurs étages et différentes salles font honneur au peintre disparu. Je commence à me dire que je suis foutue, quand je perçois des sanglots provenant d'un renfoncement dans le mur. Je m'approche de l'alcôve pour y découvrir une petite fille, cheveux châtains collés au visage par ses larmes qui pleure. Je ne lui donne pas plus de six ans.
Je me redresse mais avec tout ce monde difficile de repérer des parents inquiets.
- Tu es perdue ? demandé-je à la petite.
Elle hoche la tête en reniflant bruyamment.
Je fouille dans mon sac à la recherche d'un mouchoir que je lui tends.
- Viens avec moi. Je vais t'aider à retrouver tes parents.
La petite semble hésiter. Sans doute que ses parents lui ont appris à ne pas suivre des inconnus.
- Je m'appelle Maddie et je ne te ferai aucun mal. Je vais tout simplement te ramener à l'accueil du musée d'où on pourra appeler tes parents.
Elle me fixe avec ses grands yeux dont le bleu m'est familier avant de décider qu'elle peut me faire confiance. Je la prends dans mes bras afin qu'elle puisse repérer ses parents et nous arpentons les différentes salles avant de nous rendre à l'accueil.
Arrivées devant la sécurité, je leur explique la situation et une jeune femme au tailleur vert sapin, uniforme du musée, vient prendre les choses en main. Elle attrape la main de la fillette qui refuse de lâcher la mienne. Je l'accompagne dans une salle où on lui demande son nom prénom et âge. Occupée à réfléchir à mon article je ne prête qu'une oreille distraite aux réponses de l'enfant. Ce n'est que lorsque la voix surgit des haut-parleurs que je me statufie :
- La petite Louise Decoux attend son papa et sa maman à l'accueil du musée, la petite Louise Decoux.
Non, ce n'est pas possible. Decoux doit être un nom très répandu par ici, il n'y a pas forcément de lien de parenté direct entre cette petite puce et le conducteur de travaux de MValu ? Pourtant, à peine ai-je formulé cette pensée que j' sais que j'ai tort. Elle a les mêmes yeux que Thomas et plus je l'observe, plus j'ai l'impression de le voir lui.
- Ecoute Louise. Ton papa et ta maman ne vont pas tarder, je vais devoir te laisser.
- Nooooon ! s'exclame-t-elle en me prenant dans ses petits bras, Tu restes avec moi. S'il te plait Maddie.
Je soupire, cette fillette me rappelle ma sœur alors je ne peux que lui obéir et rester près d'elle. J'entends des pas, je n'ose pas me retourner. Louise s'écarte, reconnaît son papa et se cache contre mon débardeur, sans doute a-t-elle peur de se faire disputer. J'inspire à fond avant de me retourner. Nos yeux se rencontrent et ne se lâchent plus. Il affiche un air surpris en me reconnaissant, puis son regard s'attendrit en voyant sa fille.
- Louise, appelle-t-il doucement.
La petite s'écarte de moi et semble jauger les intentions de son père. Une fois rassurée elle court se jeter dans ses bras. Je les observe quelques instants avant de m'éclipser discrètement. Je rejoins la galerie principal, en quête d'inspiration pour mon article, mais la seule chose que je parviens à faire ce sont des arabesques sur mon calepin.
- Madeline ?
Je sursaute avant qu'il ne se matérialise face à moi. Vêtu d'un jean et d'une chemise blanche dont les deux premiers boutons sont ouverts j'ai la bouche subitement sèche.
- Je voulais te remercier d'avoir retrouvé ma fille.
- Oh de rien. Si j'avais su que c'était ta fille, je l'aurai peut être laissée dans son coin, tenté-je de plaisanter.
Il fronce les sourcils et je me sens obligée de me justifier :
- Oui, enfin non. Je voulais dire que vu la manière dont tu m'as traité jusqu'à il y a peu, j'aurais pu... enfin, je...Je me perds dans des explications qui n'ont aucun sens avant de conclure, Laisse tomber, je suis contente que tu l'aies retrouvée.
Une sonnerie stridente se fait entendre suivi d'une voix mécanique :
- Le musée va bientôt fermer ses portes. Nous vous invitons à regagner la sortie.
- Oh non ! m'exclamé-je paniquée.
- Qu'y a-t-il ? demande Thomas.
- Je... je dois faire un article pour le journal local et je n'avais pas prévu de revenir demain. Il me reste des trucs à finir pour l'école, et puis je n'y connais rien en art. bref c'est la merde, je vais perdre ce nouveau boulot avant même de l'avoir décroché.
Il me regarde d'un air amusé.
- Surtout ne bouge pas.
Il part au pas de course en me laissant en plan devant le dessin d'une prostituée les seins à l'air. La sonnerie retentit une seconde fois et je suis tentée de suivre les derniers visiteurs en direction de la sortie quand je le vois avancer vers moi, le sourire jusqu'aux oreilles. Ce sourire a des répercussions bizarres sur mon cœur qui commence à s'emballer.
- Madeline, je te présente Paul Murançon, le directeur du musée et spécialiste de Toulouse Lautrec. Paul est un ami et il a accepté de t'accorder une visite privée du musée.
Je ne sais pas quoi dire, j'imagine déjà le titre de l'article : « Quand Murançon raconte Lautrec ».
Avant que je n'aie pu le remercier, Thomas, est déjà à l'autre bout du musée, sans doute rejoint-il sa femme et sa fille.
- Et bien mademoiselle, Thomas doit vraiment vous tenir en haute estime, en dix ans d'amitié c'est la première fois qu'il me demande un tel service.
Je lève les yeux vers mon interlocuteur, essayant de ne plus penser à Thomas et je réponds :
- Je suis une collègue de travail et j'ai retrouvé sa fille perdue, je pense qu'il s'est juste senti redevable.
Monsieur Murançon plante son regard dans le mien à la recherche de je ne sais quoi puis il me lance :
- Que la visite commence.
Note d'auteur: Et voila, il fallait que Maddie tombe sur Thomas. Si vous avez été attentives, Jess le lui avait dit lorsqu'elle avait fouiné sur le profil facebook de Thomas. Vous êtes de plus en plus nombreuses à me lire alors merci à vous d'être là. Bisous bisous
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Bien Trop Sérieuse?
RomanceMadeline, vingt deux ans, a laissé tomber la fac de droit et galère à trouver du travail. Aussi, lorsqu'un éventuel employeur lui propose une formation en alternance elle n'a pas le choix si elle ne veut pas retourner vivre chez ses parents. Entre u...