En charmante compagnie

1.9K 237 7
                                    

Je cherche une échappatoire mais n'en vois aucune. Traverser le bassin me ferait à coup sûr passer devant Thomas et sa famille. J'essaie de prendre appui sur mes bras pour me hisser hors de l'eau mais n'y arrive pas. Faut vraiment que je me mette au sport. Jeremy comprend que quelque chose ne va pas et s'extraie sans aucune difficulté du bassin. Il me tend ses mains et je m'en saisis. D'un geste puissant, il me sort de l'eau. Je me retrouve contre son torse mouillé, son dos faisant barrage à mon amant. Les bras de Jeremy sont autour de moi tandis que je grelotte. Malgré le froid, j'aime la sensation de son corps contre le mien, comme si rien ne pouvait m'arriver. Malheureusement, le répit est de courte durée car déjà j'entends les rires de la petite Louise. Je récupère ma serviette et cours en direction du sas, insensible à la morsure du froid sur mon corps. J'entends des pas rapprochés derrière moi, Jeremy doit certainement être en train de me suivre. Mon cœur bat à mille à l'heure et ce n'est qu'une fois à l'abri dans une cabine que je m'autorise à respirer. Je me laisse tomber sur le microscopique banc d'appoint, cherchant à rassembler mes pensées. Je ne peux pas croire qu'il soit là. Est-ce qu'il me suit ? J'ai beau me repasser en boucle les conversations que j'ai pu avoir au boulot, il ne me semble pas avoir mentionné notre lieu de villégiature. Je calme difficilement les tremblements dans mes mains et parviens tant bien que mal à me changer. Je vais rentrer au chalet, me cacher sous la couette pour n'en sortir que le jour du départ. Je rassemble mes affaires et quitte précipitamment mon refuge temporaire.

— Maddie ça va ?

Jeremy me dévisage l'air inquiet. Je remarque qu'il s'est changé lui aussi, il a troqué son short de bain contre sa combinaison de ski.

— Hors de question de te laisser rentrer seule.

Je me mords l'intérieur de la joue, je ne veux pas lui gâcher sa journée. Au moment où j'ouvre la bouche pour protester, il me devance :

— Ce n'est pas négociable.

Ses yeux brillent de détermination et quoi que je dise il ne changera pas d'avis. Je me dirige vers le sentier mais Jeremy me saisit par la main.

— J'ai loué une moto neige.

Agrippé à sa taille, je regarde le paysage défiler. Mes vacances étaient parfaites, pourquoi est-il venu tout gâcher. J'enfouis ma tête, protégée par un casque dans le blouson épais de Jeremy. Je le sens se raidir. Mince, il ne faudrait pas qu'il s'imagine des choses. Je me redresse et en tournant la tête sur le côté, je reconnais la cabane du sculpteur. A renfort de cris et de pincements, je parviens à faire comprendre à Jeremy que je veux descendre. J'enlève mon casque, mes cheveux gorgés d'électricité statiques me font une coupe assez improbable, surtout si j'en crois le regard amusé de Jeremy. J'essaie tant bien que mal de les aplatir puis en désespoir de cause, je pénètre dans la cabane. En me reconnaissant, le sculpteur me désigne la figurine du menton :

— L'est pas encore prête. Faut attendre que le vernis sèche.

Je ne masque pas ma déception, je voudrais juste récupérer mon écureuil et rentrer chez moi. Je m'approche de la figurine, elle est encore plus belle de près.

— C'est original, glisse Jeremy à mon oreille.

Je sursaute, il est si près de moi que je peux sentir son souffle dans mon cou.

— Ne te moque pas, je la trouve splendide, rétorqué-je en le bousculant gentiment.

— Quand sera-t-elle prête ? demande-t-il en se tournant vers l'artisan.

— D'ici deux bonnes heures.

Je soupire.

— Très bien, nous repasserons, décide Jeremy.

Je le dévisage et il ajoute :

— Je m'en voudrais que tu n'aies pas ce.... Magnifique animal.

Il se moque encore mais cela me fait sourire.

Nous regagnons la moto neige et un quart d'heure plus tard nous voici attablés dans une cabane pour un goûter. J'opte pour un chocolat chaud ainsi qu'une part de tarte choco-coco tandis que Jeremy préfère un capuccino accompagné d'une part de forêt noire. Je laisse rouler la première gorgée sur ma langue pour m'imprégner du goût chocolaté de ma boisson.

— Thé le matin, chocolat l'après-midi.

J'acquiesce. Je surprends le regard de la serveuse lorsqu'elle dépose nos pâtisseries. Je suis presque sûre qu'elle a glissé son numéro dans la serviette qu'elle vient de lui tendre.

— Alors ? Tu vas me dire pourquoi on s'est sauvé du bain ? demande-t-il en me fixant étrangement.

Bizarrement je n'ai pas envie de lui mentir mais lui exposer toute la vérité n'est pas possible non plus.

— J'ai vu une personne que je préférais éviter.

— Une erreur de jeunesse ?

— Une erreur tout court, avoué-je en plantant ma cuillère dans mon gâteau.

Jeremy a la gentillesse de changer de sujet ce dont je lui suis reconnaissante. Nous discutons de tout et de rien, je l'autorise même à goûter ma tarte. Il est beaucoup plus détendu qu'au chalet et je ne me gêne pas pour le lui faire remarquer.

— Venir avec vous n'a pas été ma plus brillante idée. Je dois constamment faire attention, surtout avec Victoria. Je risque ma place.

Je manque de m'étrangler :

— Mais nous sommes toutes majeures !

— Il n'empêche que vous restez mes élèves et si un scandale éclate, le CFA me virera.

Je comprends sa position. Nous poursuivons la discussion. J'apprends ainsi qu'il a obtenu le poste au CFA par piston car il connaissait quelqu'un qui connaissait quelqu'un...

— Tu te vois enseigner toute ta vie ?

Il prend le temps de réfléchir. Je me rends compte que ma question est assez personnelle et que nous sommes...quoi ? Un prof et son élève ? Des amis ? Des simples connaissances ? Au regard envieux des femmes autour de moi, nul doute qu'elles pensent que je suis sa copine.

— Question pour question ?

Je lève la tête sans comprendre.

— Je réponds à une question perso si tu en fais autant, explique-t-il en reposant sa tasse.

La mousse du capuccino lui fait une petite moustache. La serveuse de tout à l'heure s'imagine sans doute lui enlever en un geste sexy et délicat du bout du doigt, mais manque de bol pour elle, il s'essuie avec sa serviette, effaçant au passage les chiffres de son 06. Il attend ma réponse et je hoche la tête.

— Mon projet c'est de retaper la vieille maison de mon oncle et d'en faire une maison d'hôte.

Pour la deuxième fois, je manque de m'étouffe. J'étais à mille lieux de l'imaginer dans le domaine hôtelier. Ceci dit, vu son physique, les filles vont se bousculer pour dormir chez lui. Étonnamment, cette idée me déplaît fortement. J'imagine toute une ribambelle de Vicky, tortillant des hanches pour attirer son attention et ça me rend malade.

— A mon tour, décrète Jeremy.

Il incline la tête sur le côté sans me lâcher des yeux. Mon genou tressaute malgré moi, que va-t-il bien me demander ?

Note d'auteur: Maddie a pu éviter Thomas et en prime elle profite d'un tête à tête avec le séduisant Jeremy tout en dégustant des pâtisseries... Miam. Bisous bisous

Bien Trop Sérieuse?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant