D’un commun accord nous décidons de nous rendre au bar également mais sur les coups de vingt et une heures histoire que notre présence ne soit pas trop suspecte. Je suis en train de me préparer lorsque Joe se laisse tomber sur le lit derrière moi :
- Tu boudes ?
- Pourquoi je bouderai ? lui rétorqué-je sans le regarder.
- Je sais pas, peut-être parce que ça ne te plait pas que ton Jeremy sorte avec la belle Mélinda ce soir.
Je me retourne agacée :
- Je t’arrête tout de suite. Déjà ce n’est pas Mon Jeremy alors il peut bien sortir avec qui il veut je m’en tamponne l’oreille avec une babouche.
Il étouffe un rire et je continue :
- D’ailleurs c’est plutôt toi qui devrais bouder. Il me semblait qu’elle te plaisait Mélinda.
Il quitte le lit pour se rapprocher de moi et me glisse à l’oreille :
- Ça ne te va pas d’être jalouse.
Il s’esquive avant que je n’ai pu l’assommer avec ma brosse à cheveux. Non je ne suis pas du tout jalouse. Je suis juste agacée, énervée et plus j’y pense moins j’ai envie de sortir. J’ai vidé le contenu de ma valise sur le lit mais je ne trouve rien à me mettre. Du moins rien d’aussi sexy et ravageur que la micro robe de Sophie. Lorsque Natalia me rejoint, elle me retrouve en culotte l’air désemparé. En fouillant dans sa propre valise, elle en sort une robe en laine violette qu’elle me tend. Je la remercie avant de l’enfiler par-dessus une paire de collant épais. Le résultat est plutôt pas mal, la robe m’arrive un peu plus bas que les fesses et le décolleté reste raisonnable. Je remonte mes cheveux en une queue de cheval haute et accroche mon collier pierre de lune qui retombe sur ma poitrine venant sublimer la tenue. Natalia se propose de me maquiller et j’accepte avec empressement. D’un geste net et précis, cette dernière m’applique sur chaque paupière un trait de liner me façonnant ainsi des yeux de biche. Le temps que tout le monde se prépare il est largement plus de vingt et une heure lorsque nous quittons la maison. Vicky a opté pour un décolleté outrancier masqué par une écharpe massive et Sophie se plaint du vent froid l’obligeant à mettre son bonnet et ruinant son chignon haut placé. Ce dernier me fait d’ailleurs plus penser à un buzzer sur lequel appuyé qu’à un chignon.
Arrivée au B2N, je suis surprise par la taille de l’endroit. Moi qui m’attendais à un bar de station, me voici aux portes d’une boîte de nuit. Même si le videur à l’entrée me paraît ridicule avec son bonnet à grelot, j’essaie de ne rien laisser paraître quand vient notre tour. Les portes s’ouvrent et les filles se ruent à l’intérieur. Nous laissons nos doudounes aux vestiaires et avançons dans la salle bien décidées à danser et trouver une table. Vicky et moi nous retrouvons seules et faisons les tours des lieux pour repérer Jeremy et la brunette. Nous les trouvons, installés sur des banquettes, en train de discuter un verre à la main. Sans sa combinaison Mélinda est encore plus belle. Vêtue simplement d’un jean et d’un pull blanc, elle n’a nul besoin d’artifice pour attirer la plupart des regards masculins.
- On fait quoi ? me demande Vicky incertaine.
- On laisse tomber, grogné-je en me dirigeant vers le bar.
Se retrouvant seule, Victoria perd son assurance et se résout à retrouver nos copines. Je sirote un cocktail aux jolis reflets bleutés en regardant les filles se déhancher sur du David Guetta. Je triture mon portable. Jess me manque, mon appart me manque. Avoir croisé Thomas, ici, alors que je faisais tout pour l’oublier me déprime profondément. Le barman s’approche et me demande si je veux un autre verre. Je décline poliment, si je bois encore je risque d’envoyer un texto à Thomas et c’est la dernière chose à faire. Mon attention est attirée par un groupe de filles faisant irruption dans la boîte. L’une d’elle est déguisée en canard. Je comprends qu’il s’agit d’un enterrement de vie de jeune fille. Elles ont l’air de bien s’amuser. A y regarder de plus près, tout le monde à l’air de bien s’amuser… tout le monde sauf moi. La future mariée fait le tour des banquettes avec un panier, d’après ce que je vois, elle doit vendre des préservatifs aux clients, surement un gage d’une de ses amies. Quand elle s’approche de moi, j’essaie de paraître heureuse et lui achète une capote que je glisse dans ma poche. Tout ce bonheur me donnerait presque envie de vomir, à moins que ce en soit mon cocktail trop vite avalé.
Je crois que je vais dire aux filles que je rentre, je suis crevée et je n’ai envie de rien. Au moment où je tourne la tête pour repérer Natalia, je vois les lèvres de Mélinda se poser sur celles de Jeremy. La scène n’a pas échappé à Vicky non plus qui s’avoue vaincue et va danser avec un autre mec.
Je repère Natalia dans la foule et lui fais signe. Elle s’approche, les joues rosies par l’alcool :
- Je ne me sens pas très bien, je vais rentrer, lui dis-je en haussant le ton afin de couvrir le bruit et la musique.
- Tu veux que je t’accompagne ?
Sa sollicitude me touche mais j’ai besoin d’être seule.
Je récupère ma doudoune au vestiaire avant de quitter les lieux. Je fais quelques pas dans la neige. Je m’éloigne du boum boum étouffé provenant du B2N et savoure la caresse froide du vent d’hiver. Je revois Jeremy embrassant Mélinda, je pense à Thomas avec sa femme et sa fille. Je marche au hasard sans vraiment savoir où je vais. Quand je relève la tête, je reconnais la cabane où j’ai goûté avec Jeremy. Je demeure immobile, la neige se met à tomber doucement, recouvrant les bancs en bois et effaçant peu à peu mes traces. Un bruit me fait sursauter. Quelqu’un marche dans la neige et vient dans ma direction. Je prends soudain conscience que je suis seule, qu’il fait nuit noire, que tous les commerces sont fermés et que personne ne sait où je suis. Mon cœur s’emballe tandis que mon esprit envisage les pires scénarii possibles. Je trouve suffisamment de courage en moi pour me retourner.
- Madeline ?
Il est encore plus beau sous la neige. Mon rythme cardiaque ne diminue pas mais cette fois les raisons ne sont plus la terreur ni l’angoisse. Il reste là, à quelques pas de moi mais son regard n’exprime pas vraiment la surprise.
Il avance jusqu’à moi :
- Il me semblait bien t’avoir vu au bain, mais j’ai cru que c’était mon imagination.
Sa main se pose sur ma joue mais je recule :
- Ne me touche pas.
Il semble perdu :
- Madeline…
- Arrête. Je suis ravie de voir que tu vas bien. Après ton silence je pensais qu’il t’était arrivé quelque chose.
Il secoue la tête pour faire tomber les flocons qui s’y étaient agglutinés.
- Qu’est-ce que tu aurais voulu? Que je t’envoie un énième texto pour m’excuser, te dire que toi et moi ce n’est pas possible. Je me suis dit qu’il valait mieux ne rien dire et que tu me détestes, que ça t’aiderait à tourner la page. Et ça a marché visiblement.
- Quoi ?
- Tu avais l’air en très bonne compagnie cette après-midi.
Son ton est redevenu celui du conducteur de travaux imbuvable de MV alu. Je comprends qu’il parle de Jeremy et je décide de ne pas le détromper.
- Oui en effet. C’est un gars génial.
Une barre apparaît sur son front, signe chez lui de contrariété. J’enlève à mon tour mon bonnet, faisant cascader es cheveux châtaine sur mes épaules.
- Nous passons de très agréables moment lui et moi, dis-je en faisant un pas vers lui.
- J’en suis ravi, grogne-t-il en avançant à son tour.
Dans ses yeux brille une lueur familière.
- Dans ce cas je vais te laisser, dis-je à quelques centimètres de lui.
- Cela me semble raisonnable, murmure-t-il avant de poser ses lèvres sur les miennes.
Note d'auteur: desolée du retard les amis. La semaine dernière mon fils avait une otite et ma nounou la grippe autant vous dire que j'ai pas eu une minute à moi. Bref voici un chapitre de plus. Bisous bisous
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Bien Trop Sérieuse?
RomansaMadeline, vingt deux ans, a laissé tomber la fac de droit et galère à trouver du travail. Aussi, lorsqu'un éventuel employeur lui propose une formation en alternance elle n'a pas le choix si elle ne veut pas retourner vivre chez ses parents. Entre u...