Ananas and co

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Sa question me prend de court mais je n'ai aucune envie d'y réfléchir. Pas maintenant. A la place, je me blottis dans ses bras et finis par m'endormir.

Le lendemain matin, je me réveille avec la bouche pâteuse et un mal de crâne épouvantable. Je m'extirpe du canapé que je n'ai même pas eu la force de déplier hier soir et regarde autour de moi à la recherche de Joe. J'avise un papier posé sur la table basse. Il est parti dépanner le moteur d'un pote et me souhaite un bon weekend. Entre les bougies renversées, le poulet au curry qui occupe encore mes casseroles et mes affaires jonchant le sol, je sais comment je vais occuper ma journée.

Le point positif quand on vit dans un appartement microscopique c'est que le ménage est très vite fait. J'ai placé le poulet dans des boîtes que j'ai ensuite mises au congélateur, les bougies ont trouvé leur place dans le meuble sous mon lavabo et en moins d'une heure mon appartement est redevenu celui d'une étudiante en BTS et non plus celui d'une maitresse esseulée pleurant sur son amant indélicat.

Tandis que mon appartement s'aère, je me faufile sous la douche et décide de me chouchouter. Je me fais un gommage aux noyaux de pêche broyés, me lave les cheveux et termine par l'application d'un lait hydratant à la pêche également. Lorsque je sors, j'ai l'impression d'être une nouvelle femme. J'enfile une robe légère, blanche avec des fleurs bleues, s'arrêtant au-dessus du genou, passe une paire de sandale et transvase mes effets dans un sac à main en jean. Au revoir l'hiver, bonjour l'été. Enfin, nous ne sommes pas vraiment en été, mais ce soleil qui baigne mon salon me donne envie de me croire en plein mois d'août. Je récupère mon téléphone chargeant sagement sur la multiprise alimentant à la fois la télé, le décodeur, le lecteur blu ray et la lampe halogène (un miracle qu'il n'y ai pas de surcharge). Je saisis les quatre chiffres de mon code pin, il se déverrouille et affiche au moins une quinzaine d'appels en absence, tous de Thomas. J'efface consciencieusement ses SMS sans les lire ainsi que ses messages vocaux. S'il veut me parler, il connaît mon adresse !

La perspective qu'il puisse soudain débarquer me fait paniquer. J'attrape mon sac à main et quitte mon appartement précipitamment. Je ne me trompais pas, il fait une chaleur digne d'un plein été. J'apprécie de me promener dans les vieilles ruelles pavées ombragées. Une douce brise fait voler mes cheveux valant toutes les climatisations du monde. Je flâne, admirant les boutiques qui exposent la collection été. Visiblement cette année la mode c'est les tropiques. Des ananas ont fleuris sur la plupart des vêtements que je voie et si ce ne sont pas des ananas se sont des flamands rose ou des leurs d'hibiscus Depuis combien de temps n'étais-je pas sortie ? Entre les repas plus ou moins sauté le midi pour retrouver Thomas et les weekends à bosser pour l'école, j'ai oublié qu'il y avait une vie en dehors des quatre murs de mon appart. En passant devant un magasin de déco, je constate que là aussi on mise tout sur l'ananas, que ce soit sur des mugs, des plats, des centres de tables, des assiettes... Je repense à mon chez moi, ma vaisselle n'est pas de première jeunesse, je n'ai pas trois verres identiques et c'est vrai que niveau déco il est assez impersonnel. En réalité, je n'y avais jamais pensé jusqu'à présent, quand je me suis installée j'ai fait au plus pratique et au moins cher. Je consulte mon compte. Ça va, entre mon boulot, mes quelques missions d'intérim par ci par là j'ai de quoi me faire plaisir.

Je pousse la porte de la boutique et déambule parmi les rayons. J'opte pour un service de six assiettes, en porcelaine avec des ananas dessinés dessus, six verres multicolore, et un chemin de table en bambou. Je passe en caisse, satisfaite par mes achats et continue ma balade. Je marche encore une dizaine de minutes avant de décider de faire une pause. Je m'arrête dans un kiosque à journaux pour me fournir en littérature féminine avant de m'installer à la terrasse d'un café. Je termine un coca bien frais tout en feuilletant un magazine.

— Bon sang toutes ces pubs c'est rageant, maugrée-je en tournant les pages à la recherche de la suite de mon article.

Une ombre se profile, surement quelqu'un voulant prendre la seconde chaise. Je relève la tête et ai la surprise de me trouver face à Jeremy. Le voir ainsi face à moi fait remonter certains souvenirs de ma triste soirée d'hier.

— Je... euh... désolé pour hier soir, marmonné-je gênée à l'extrême.

Il secoue la tête comme si cela n'avait aucune importance. Il désigne la chaise libre et comme je m'y attendais me demande :

— Je peux ?

J'acquiesce mais à ma grande surprise il ne la prend pas mais au contraire s'installe face à moi. Je range rapidement mes magazines, inutile qu'il tombe par mégarde sur « comment faire durer l'orgasme » ou « je suis célibataire et le vis bien ».

— Je tenais à m'excuser, dit-il après avoir passé commande au serveur d'un thé glacé pour moi et d'un café pour lui.

— De quoi ?

— Je me suis conduit comme un con, je m'en rends bien compte.

Je fronce les sourcils, ne comprenant pas très bien à quoi il fait allusion.

— Au chalet c'était sympa, puis le soir où tu as disparu avant de revenir comme si de rien était, j'ai pété un plomb. C'était stupide. Et puis ensuite les cours ont repris et je ne savais pas quelle attitude adopter alors j'ai mis de la distance.

Le serveur nous apporte nos boissons. Je me jette sur mon thé glacé comme une assoiffée, le soleil cogne de plus en plus fort et j'ai l'impression d'être complètement déshydratée.

— C'est ma faute, dis-je au bout d'un moment. Je t'ai vu embrassé ta prof de snow et je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans ma tête. Je veux dire, on avait passé la journée ensemble, c'était super et là...

Je commence à perdre mes mots, je ne sais pas ce que j'essaie de lui dire. Heureusement, il vient à ma rescousse.

— Ce n'était rien, coupe-t-il. Entre Melinda et moi.

— Tu n'as pas à te justifier.

Comment pourrai-je lui demander de se justifier alors qu'une heure plus tard je me faisais prendre en pleine rue contre une cabane en bois ?

— Je sais mais j'en ai envie, reprend-il. Quand je suis rentrée ce-jour-là, il y avait un mot de Victoria dans ma chambre. Il était... très explicite. Je ne voulais pas la repousser directement alors j'ai contacté Melinda. Lors de nos cours je lui avais expliqué la situation et elle a gentiment accepté de jouer le jeu. Nous sommes sortis boire un verre et je pensais que ça suffirait alors quand j'ai vu les filles débarquer au bar je ne savais plus quoi faire. C'est là que Melinda m'a embrasé.

Je ne sais pas quoi répondre. Ainsi il n'est pas allé plus loin avec sa prof... Cette pensée me réconforte.

— Maddie je...

Les vibrations de mon portable l'interrompent. Nous baissons tous les deux les yeux, « Thomas » s'affiche en caractère gras.

— Tu ne réponds pas ?

J'hésite. Ce n'est ni le lieu ni le moment. Ce weekend j'ai décidé de ne penser qu'à moi.

— Ce n'est pas important, décidé-je en basculant en mode silencieux.

Note d'auteur : et voici le retour de Jeremy! Va t il prendre plus d'importance dans la vie de Maddie ou Thomas va t il revenir faire tourner la tête de notre héroïne? Bisous bisous

Bien Trop Sérieuse?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant