CHAPITRE LV: Parenthèse enchantée

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"Beaucoup diront que c'est stupide de s'accrocher à quelque chose qui nous fait du mal. Moi je dirais que c'est stupide d'abandonner quelque chose qu'on a toujours voulu."

***
J'étais allongé à côté de Beor, à même le sol d'une chambre spacieuse. Devant moi, se trouvait un lit blanc, d'une propreté si immaculée que je n'avais pas eu le cran de m'allonger dedans, même lavée et dans des vêtements propres. Ma tête posée sur une des pattes antérieures de Beor, je laissais ma main vagabonder sur ses écailles.

Tu es sûre que tu ne veux pas te poser sur le matelas ? Tu serais mieux.

-Je ne veux absolument rien faire.

Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?

Sa tête se posa sur la mienne dans un geste de réconfort.

-J'en ai plus qu'assez de cette quête, murmurais-je. Elle ne nous apporte rien de bon.

La mort des Oubliés ne sera-t-elle pas une bonne chose ?

Je secouais doucement la tête.

-Je ne sais pas vraiment. Certes, ils sont responsables de beaucoup de morts et ils continuent aujourd'hui à être nocifs, mais en même temps, exterminer leur peuple ne revient-il pas à s'abaisser à leurs idéaux ? Je veux dire, repris-je, ils ne sont pas tous responsables.

Devrait-on leur accorder un procès ?

Je haussais les épaules.

-Aucun juge ne sera objectif. La Guerre a touché le monde entier, aucune famille n'a été épargnée.

Que proposes-tu ?

-Rien, dis-je en délogeant un morceau de boue séchée de sous une de ses écailles. Je ne vois aucune solution. On prépare une guerre, mais on ne sait pas comment gérer son après. C'est une faute grave et qu'on ne peut pas se permettre. J'ai beau avoir soif de vengeance, je ne peux pas tout simplement envisager un génocide pur et dur. On parle de femmes, d'enfants, de vieillards et d'innocents qui n'y sont pour rien.

Penses-tu vraiment que les Élémentaires vont prendre tous ces critères en considération ? Les ont-ils prit lorsqu'ils ont attaqué Sjena ?

Mon corps se tendit brusquement à ce sujet.

-Beor ! Crais-je en me relevant.

Ana, tu n'as jamais vécu dans le déni et tu n'es pas du genre à fermer les yeux sur ton passé.

-Ce n'est pas une raison.

Je le foudroyais du regard. Il savait que Sjena était un sujet sensible, et toute personne censée qui se respecte ne l'aborderait pas volontairement.

Sjena était la cité dragonnière du peuple de l'Ombre, avant que nos ancêtres ne doivent fuir et qu'ils bâtissent la Citadelle. On raconte que c'était une magnifique ville situé non loin de la mer de Rukas, mer qui avait la particularité d'apporter une brume constante sur la cité. Dans les livres, il raconte que la ville baignait dans le brouillard quasiment toute l'année et à toute heure, ce qui donnait une atmosphère sombre et inquiétante à la ville, mais qui convenait à tous les habitants. Ils étaient tous heureux, et surtout, libres. Puis, quand la guerre à éclatée, ce fut la premier point d'attaque des Élémentaires. La bataille a été longue, avant que la cité chute. Après la perte de Sjena, la population était déjà quasiment éteinte. C'est finalement le meilleur ami du dernier chef de Sjena qui a conduit le reste de la population jusqu'à la forêt des Bannis, où il fonda la Citadelle, un certain Lubin White.

Cette histoire remonte a tellement de temps, que personne n'est encore en vie pour nous confirmer ou non ce que disent les écrits.

-Sjena est différente de la situation actuelle.

Kora: Dragonnière de l'OmbreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant