7. Oeillade glaciale

362 39 9
                                    


La pièce qui sert à recevoir le bal des journalistes est située au sous-sol du stade Parchamps. Pour y accéder, il suffit d'emprunter les escaliers du Hall 3. Le parterre de professionnels regroupe une cinquantaine de têtes pensantes au sein de la salle de conférence. Tous, préalablement sélectionnés pour avoir le privilège d'assister à la rencontre. Le bruit cours depuis quelques semaines déjà, que le SCP donnera satisfaction en laissant ses joueurs se plier à l'exercice des questions/réponses. Inutile de préciser que la totalité de mes confrères sont au garde à vous, scrutant la venue des anti-héros de la soirée.

Franchissant le seuil de l'amphithéâtre, mes yeux observent la marée de journalistes entassée près du pupitre. Je ne fais pas le choix de les approcher, préférant largement le confort des sièges un peu plus en hauteur. Ainsi, je m'offre une vue d'ensemble. 

L'atmosphère est survoltée. Je repère en contre-bas, la silhouette de Martin Valez. Il ne met pas plus de deux secondes pour croiser mon regard. Je sais qu'il va venir me rejoindre. Valez aime la compagnie, surtout celles des femmes. Et ce soir, elles ne sont pas représentées à part égale.

Ce que je redoute, fini par arriver. Je le vois gravir les escaliers un à un avec décontraction. Habitué à croiser Selim, j'imagine que ma présence lui est agréable. Dans sa tête de primate misogyne, je ne représente pas une menace. Je n'ai pas le pouvoir de lui voler la vedette. Et dans tous les cas, mon aptitude à pondre un papier plus intéressant que le sien, ne lui traverse même pas l'esprit.

Son odeur parfaitement élaborée vient remplir mes narines. La présence de Valez ne se remarque pas, elle se sent. Ce mec est un attrape pouf. Je ne serai pas étonné qu'il claironne de sa suprématie à tout va pour mettre quelques naïves dans ses filets. Je crois simplement, qu'il n'a pas compris que je ne n'étais pas l'une d'entre elles.

- Mara, ravi de te voir ! Dit-il, en s'affolant sur le siège à côté du mien.

Je lui fais mon plus beau sourire. Le même qui lui susurre que j'ai hâte de l'entuber un jour.

- Le match était une royale merde ! 0 possession de balles, 0 intelligence de jeu, 0 prise de risque. Un Senghar complètement absent. C'est à se demander pourquoi ils sont payés des millions si c'est pour jouer comme des amateurs du dimanche !

Sa remarque me fait tiquer. J'ai l'impression qu'il cherche à me donner son analyse du match, comme si je n'étais pas capable de la penser moi-même.

Les minutes filent et Valez continue de déblatérer sur l'inefficacité du SCP, tout en tentant de m'expliquer les règles du jeu. J'ai envie de le baffer. Mais au lieu de ça, je lève les yeux au ciel à chaque diatribe suffisante qu'il me sert à foison. Ce mec est une véritable plaie. Je comprends mieux Selim et son aversion totale pour le personnage.

Je n'écoute bientôt plus ce qu'il me raconte. Mon esprit est ailleurs. Une petite chose anodine pourtant retient mon attention. La dernière phrase qu'il vient de formuler ne fait qu'accroitre mon agacement. Et j'aurais tord de penser qu'il ne l'a pas fait exprès.

- Tu viens de dire quoi ? Demandai-je sur le ton de la surprise.

- Je disais que ce n'est pas très fair-play d'avoir des membres de rédaction qui connaissent personnellement un joueur. C'est facile pour Team +, il suffit de t'envoyer toi ou Selim et boum, vous avez les infos qui arrivent toutes cuites dans le bec sans avoir à bouger le petit doigt.

- Selim et Nour sont amis depuis le collège. Mais je peux te garantir qu'il n'a jamais bénéficié de passe droit. Fais attention à ce que tu dis !

- Ouais admettons. Et toi ? Tu es assez proche de lui d'après ce que je sais. Qui me dit que tu n'en profites pas allègrement ?

Soisek - dix ans plus tard -  | Terminée |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant