Chapitre Vingt

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Si au tout début la candeur des paroles de Conrad m'avait un tant soit peu bercé d'illusions mais qui s'était néanmoins transformées en doute en voyant des cartes suspicieuses devant mon appartement, ce matin, je nageais entre les sentiments sincères à son égard et les émotions qui virent me tirailler de partout sur les menaces qui dorénavant pesaient sur lui et notre relation, si bien sûre, il y en aurait une après cette nuit d'insomnie qui m'interdisait de lui faire entièrement confiance malgré ses tentatives qui cependant me touchèrent profondément.

-"Rebecca?" m'appela cette voix familière dont l'intonation grave attendait impatiemment un signe de vie de ma part alors que depuis que nous étions entrés dans sa voiture, je m'étais terrée dans un silence de mort ne sachant plus comment articuler correctement ni même parler.

-"Oui," lui dis-je, mon regard toujours perdu dans le paysage verdoyant au lieu de lui faire face.

-"Cesse donc de parler par monosyllabes! Tu semblais heureuse hier quand je t'ai proposé de m'y accompagner," me rappela Conrad en déposant sa main sur ma cuisse tandis que sa voix semblait hésitante. -"Tu regrettes, n'est-ce pas?"

-"Non," lui dis-je d'un souffle ne sachant plus si je lui mentais à lui ou à moi même en me retournant enfin pour le voir, ses traits marqués d'une tristesse avant qu'il redevint cet homme impassible. -"J'ai eu une mauvaise nuit, c'est tout et j'ai peur de rencontrer ta famille."

-"Il y aura que mon père et ma mère, ma belle. Ils t'apprécient déjà!"me rassura-t-il en baisant ma main comme pour y laisser son empreinte.

Mon regard choqué l'interpella immédiatement de m'en dire plus alors que lui se retenait de rire devant ma face cramoisie et mes yeux exorbités.

-"Je leur ai parlé de toi, Becca."

-"D'accord," murmurais-je, la boule d'angoisse qui tenaillait mon ventre s'étant largement arrondie à l'entente de ses paroles qui eurent le don de me stresser davantage alors qu'elles auraient du provoquer l'effet inverse, celui de me réconforter. -"Et ton frère?" lui demandais-je en fronçant légèrement les sourcils en me souvenant de lui.

Ma tête posée contre son épaule tandis que nos doigts s'entremêlaient, Conrad devint subitement tendu. Ses yeux comme deux fentes impénétrables s'assombrirent d'un claquement de doigt lorsque je lui parlais de son frère. Ses mains cependant se mirent en poing comme s'il était fâché. Il semblait tout simplement méconnu. Mais que pouvait-il bien cacher? 

-"Conrad," l'appelais-je doucement en prenant son visage en coupe, inquiète par son brusque changement d'attitude à l'égard de son propre frère qu'il n'avait jamais voulu m'en parler.

Ses aigues-marines où perçaient une lueur presque malsaine croisèrent les miens puis finirent par devenir ce lac limpide moins troublant lorsque mes mains remontèrent pour remettre en place ses boucles désordonnées. Sa main, au contraire de la mienne et plus audacieuse, glissa entre mes cuisses, remontant lentement, se perdant dans ma robe avant que je la frappais, sourire timide aux lèvres que j'essayais lamentablement de cacher pour ne point lui montrer à quel point ses caresses grisantes m'énivraient et me manquaient.

Cependant, une question me taraudait. Pourquoi était-il fâché voire même furieux quand je parlais de son frère et qu'il utilisait mon talon d'Achille sur moi pour m'éviter de demander davantage sur son frère que je n'avais jamais vu?

-"Défais ta ceinture, ma douce," me dit-il d'un murmure rauque et envoutant.

Pourtant, je ne fis rien comprenant par son ardent baiser qu'il voulait me faire tout oublier, en particulier, les menaces qui l'empêchaient de s'approcher intimement de moi mais aussi de son frère. Ses mains habiles vinrent défaire ma ceinture de sécurité à ma place et me prirent d'une facilité déconcertante pour finir sur ses jambes musclées. Ses bras robustes, eux, encerclèrent ma taille tandis que je m'accrochais à son cou pour avoir un certain appui.

-"Mon frère ne sera heureusement pas là," répliqua-t-il comme une promesse solennelle.

-"Pourquoi ça?"

-"C'est une longue histoire, Becca. Le moins que tu sais sur lui, le mieux tu te porteras. Et je suis certain que tu ne l'aurais jamais apprécié. Nous sommes comme le jour et la nuit et notre rivalité n'a fait que de creuser un gigantesque trou de jalousie entre nous deux que même mes parents ne savent plus où se mettent quand nous nous disputons."

-"Mais votre entreprise de télécommunications? Vous la gérez pas ensemble?"

-"Si mais on fait le mieux possible de rester civilisé et ne plus utiliser de poings pour régler nos conflits quand nous sommes dans l'enceinte de l'entreprise."

-"Et en dehors?" lui demandais-je sachant déjà que la suite ne serait pas plaisante à entendre pour la pacifiste que j'étais.

-"Dois-je vraiment te dire ce que tu sens déjà, ma belle? Nous ne sommes plus frères, lui et moi. Nous portons que le même nom, c'est tout ce qui nous unit. C'est tout."

-"Pourtant..."

Néanmoins, il déposa son doigt sur mes lèvres pour m'intimer de ne plus en parler. D'un hochement de tête, je fis ce qu'il me dit voyant ses aigues-marines dans le vide avant que le chauffeur arrêta la voiture nous sortant de cette bulle confortable où nous étions.

-"Nous sommes enfin arrivés, ma douce," me souffla Conrad, sa bouche près de la mienne, un sourire enfantin sur son visage virile me faisant comprendre que je tombais petit à petit amoureuse de lui malgré le mystère qui planait autour de lui.

Main dans la main, nous sortîmes de la voiture mais à mon plus grand étonnement, nous nous fûmes pas accueillis par ses parents. Cet inconnu qui n'était pas si inconnu que ça nous dévisageait, rictus aux lèvres, son regard bleu tout comme son frère passa de Conrad et à moi, s'attardant trop à mon goût sur moi. Il descendit avec une prestance naturelle comme le maître de maison jusqu'à être à notre hauteur tandis que la prise de Conrad autour de ma main se resserra devant son frère.

-"Bonjour Conrad," le salua-t-il avec un sourire mesquin en coin.

Mon petit ami, au contraire le toisa avec humeur puis finit par répondre.

-"Bonjour Connors," lui dit-il avant qu'il se retourna vers moi avec un sourire qui se voulait rassurant. -"Rebecca, je te présente Connors, mon frère jumeau."

Impardonnable! Tome Un (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant