Tous les mots de nos silences

101. Muse

Une pile de livre sous le bras
Je m'en rentre chez moi.

Passeport bien sécurisé
Pour un avenir à gagner.

Une vie de lettre
Une vie de rêve

C'est à les entendre parler
Une occasion à ne pas manquer.

L'ambition oui c'est bien
Mais jusqu'où et pour combien ?

Que deviendrait mon refuge chéri
Si je m'en allait, pour des mots, loin d'ici ?

N'importe quelle vie prestigieuse
Se paie-t-elle en heures heureuses ?

Toutes ces heures de printemps et d'été
Où j'ai su grandir seule isolée,

Devant celle que je devait devenir
Au chant de la nature au bruit de mes soupirs ?

C'est là que j'ai écrit mon premier poème
Mon rêve ma Muse ma merveille

Belle nature courageuse,
Pourrais-je dire sans toi que je serai heureuse ?

Tu as tous mes mots sur le lit
De ta calme rivière endormie

Les prendre pour m'en aller
Serait à mon cœur la plus cruelle des infidélités.

Il n'y a que toi qui m'ait écoutée
Que toi qui m'ait rappelé

Par la hauteur de ce grand ciel
Que malgré tout je demeure mortelle.

Tu as fait naître mes mots,
Et les as fait mourir aussitôt

Et sous ton grand manteau brun
Tu as fait naître mon premier amour clandestin.

Tu as su, toi, comme nos coeur se sont aimés
Avant même que l'on sache être marginalisée.

Et nous vivrons, pas vrai, nous deux ?
Loin de la vie loin du monde, dans les cieux ?

Parce que la poésie n'a pas besoin d'être chérie
Pour appartenir à nos petits paradis.

On pourrait aller loin sans bouger
Juste par le pouvoir des mots
Et de la beauté.

Je ne t'abandonnerais pas
Grande dame Nature
Car tu demeureras
Dans chacun de mes vers.

Je t'en fais la promesse.