Chapitre 15

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Je reste quelques secondes là, en pleine contemplation. Il dessine merveilleusement bien et j'aimerais m'approcher pour voir le dessin de près mais je ne peux pas. Je me contente de l'observer de loin. Je ne sais pas où il a dégoté un modèle de moi, s'il a mémorisé mon visage mais je ne comprends pas.

Pourquoi me dessine-t-il alors qu'il me déteste ? Peut-être aime-t-il esquisser le croquis des gens qu'il hait ? C'est sans doute probable. Peut-être qu'il a un syndrome inconnu qui le pousse à alimenter sa haine en dessinant le visage des gens qu'il déteste du plus profond de son cœur.

J'ai beau me moquer, ça n'en reste pas moins étrange de sa part. Avec discrétion, je m'éloigne de cette pièce maudite où il plantera sûrement un poignard dans mon visage une fois le croquis terminé –peut-être que ça fonctionne comme les poupées vaudou, dans ce cas-là j'espère que ma mort sera rapide et indolore–.

Au bout de quelques minutes de recherche, je trouve enfin le petit salon et vole deux coussins que j'emporte sous mon bras, ravie de mon butin. Je m'attarde quelques secondes sur les quelques portraits accrochés le long des murs habillés d'une tapisserie rouge en velour. Sur l'un d'eux sont représentés tous les membres de la famille royale et mon regard s'attarde un peu plus longtemps sur Sebastien.

Dans son uniforme, il est d'une beauté divine. Il se tient droit, l'air solennel et a une vraie posture de roi, chose que ne semble pas posséder le prince Ander. Le regard blasé, il fixe au loin, ennuyé et nonchalant.

Je me demande comment l'on peut donner son trône à un homme comme cela. Je ne le connais pas assez pour critiquer mais de par son caractère, il n'a aucune attitude de roi...

Revenant à la réalité, je sors et prends le chemin opposé que j'avais emprunté jusqu'ici et repasse devant la pièce maudite, soit un atelier tout compte fait. Or, cette fois-ci, Ander n'est plus en train de dessiner, il est tourné vers moi, la tête penché dans un carnet, un crayon à la main.,

En quelques secondes, j'évalue toutes les possibilités qui s'offrent à moi. Ou bien, je pars en courant –bon je devrais l'affronter demain mais mieux vaut reporter les problèmes à plus tard, comme on dit–. Autre solution, je m'arrête, le fixe avec un sourire de psychopathe et lui offre ma plus belle grimace afin de l'effrayer. Ou, dernière possibilité, il ne m'a pas vue et je reprends ma marche tranquillement.

Je n'ai malheureusement pas le temps de faire un choix qu'il lève la tête et que ses yeux rencontrent les miens. Je suis sûre que si j'étais une cible, il me planterait des fléchettes en permanence. La fusillade que je me prends de par son regard me laisse cloîtrée au sol. J'ai envie de dire quelque chose mais je me ravise. Je le vois jeter un coup d'œil à son chevalet pour vérifier s'il a bien enlevé le portrait de moi et c'est soulagé qu'il revient à moi.

Si seulement tu savais...

— Qu'est-ce que tu fais ici ? lâche-t-il, sans pour autant revenir à son carnet.

Je suis un peu surprise qu'il me tutoie étant donné que l'on ne se connaît pas. Mais je suppose que toutes les mœurs sociales et royales ont disparu avec lui.

— Je suis juste allée prendre des coussins.

J'ai l'air d'une parfaite idiote. Un instant, je me rends compte qu'il est torse nu devant moi et que je suis simplement vêtue d'une simple nuisette –ma préférée d'ailleurs, elle est d'un violet lavande délicieux–. Je lui jette un coup d'œil discret et me fais violence pour ne pas baver devant sa silhouette sculptée. Si Ander était une statue, il serait assurément exposé dans les musées les plus célèbres du monde. Ni trop musclé, ni trop maigre, il a un corps assez athlétique.

Ander n'a toujours pas détourné son regard et je reste de marbre. Il me détaille longuement et ses yeux s'arrêtent sur ma poitrine un peu trop longtemps à mon goût puis finissent par descendre sur mes jambes. Je le scrute et il n'a toujours aucune réaction. À croire que cet homme est un automate.

Il revient à moi et dit :

— Dans quel but ?

Sa voix est grave, rauque et plutôt sexy. Dans d'autres circonstances, il aurait pu être totalement mon style mais c'est Ander, et Ander n'est pas très gentil avec moi. Rappelons tout de même que je suis hideuse selon ses dires.

— On ne t'a pas fourni d'oreiller dans ta suite ? rajoute-t-il, d'un ton sarcastique.

Il se décide enfin à bouger et referme son carnet qu'il vient poser sur un plan de travail avec le crayon. Je jette un coup d'œil à la pièce et me rends compte que c'est vraiment la pagaille. Des dizaines de boulettes de papiers jonchent le sol, il y a des tableaux partout et je remarque que mon portrait a disparu. Je suis déçue, j'aurais voulu voir le résultat final pour dire à Ander qu'il est incapable de représenter ma sublime beauté. Que je suis tellement magnifique qu'aucun coup de crayon n'égalerait ma suprématie. Que je suis un rayon de soleil et qu'il est par conséquent incapable de me dessiner tant j'éblouis mon monde.

— Ils sont devenus trop chauds, réponds-je simplement, comme à moi-même.

Et c'est le cas. Je me parle à moi-même, mon cerveau étant complètement disjoncté. Il est temps de partir. C'est ce que je me dis intérieurement mais le regard de Son Altesse me brûle. Je n'arrive pas à décrypter son expression faciale, je ne sais pas s'il est surpris ou énervé. Peut-être un peu des deux au final.

— Tu te balades dans les couloirs à une heure du matin pour aller chercher des coussins parce que ton oreiller est trop chaud ?

Pour la première fois, il a l'air un tant soit peu gentil. Pas moqueur, arrogant ou mesquin, juste... normal. La surprise teinte sa voix et il me fixe comme si j'étais bizarre. Peut-être que dans le fond je le suis. Qui ne l'est pas ?

Se rendant compte qu'il est sans doute devenu trop gentil, il rajoute d'un ton plus distant :

— Peu importe. Tu peux partir, maintenant ? Tu me déranges.

Non mais je rêve ! À quoi je m'attendais de sa part aussi ? Je me retourne pour partir et une idée fuse dans mon esprit. Je pourrais très bien lui dire que j'ai vu son portrait et qu'il dessine très mal, pour le blesser comme il m'a blessée ce soir. Je pourrais aussi lui dire qu'il est vraiment pitoyable de me dessiner, ou arrogant et lui dire à quel point je le déteste. J'aimerais qu'il ait honte autant que je l'ai été ce soir.

Au final, cela ne servirait à rien. Je tomberais simplement aussi bas que lui et je n'ai pas envie de jouer dans sa cour. Je quitte donc la pièce, direction ma chambre. Et avant de tourner au bout du couloir, je me retourne une dernière fois.

La silhouette d'Ander dépasse légèrement la porte et ses yeux sont rivés sur moi.

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Hey hey

Je n'ai pas relu le chapitre (je le ferai demain) donc désolée d'avance s'il y a des fautes :(

Je tenais quand même à poster puisque j'ai quelques chaps d'avance eheh. En attendant comme d'habitude (je vais faire la petite vieille à radoter à chaque chapitre) n'hésitez pas à voter, commenter etc... ça fait toujours plaisir ^-^

On se retrouve demain (aujourd'hui donc) pour le prochain chapitre !

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𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant