𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 1

Chapitre 13

Je me suis apprêtée. C'est étrange dit comme ça mais je ressemble enfin à quelque chose. J'ai, pour la première fois depuis des semaines, mis un corset qui est, certes, littéralement en train de me broyer la cage thoracique mais qui me fait un corps magnifique.

Deux domestiques sont venues il y a une heure pour m'aider à me préparer pour le dîner de ce soir. Je suis donc vêtue d'une sublime robe dorée et noire, un peu décolleté, qui met en valeur la moindre de mes courbes. Je voulais laisser mes cheveux tel quel mais les filles ont insisté pour glisser une broche entre deux mèches. J'ai eu droit aussi à un maquillage discret. Du mascara et un gloss discret ont fait l'affaire.

On m'a informé que le dîner avait lieu à vingt heures tapantes et qu'aucun retard n'était possible. Il est bientôt vingt heures et je ne suis toujours pas descendue. En théorie, avec cette robe et les talons que je porte, il me faut au moins trois minutes pour descendre. Conclusion : je vais être en retard. Pourquoi ne suis-je pas partie plus tôt ? Je suis toujours aussi anxieuse, c'est dur d'affronter les gens qui ne peuvent nous apprécier.

Mais bon, il va bien falloir un jour ou l'autre que j'y aille, je ne peux pas commencer à rater les repas en utilisant des prétextes idiots. J'ouvre donc la porte de ma suite et me dirige vers les escaliers. Je m'arrête un moment et relève les yeux vers la chambre de Sebastien. Elle est à l'autre bout du couloir et je meurs d'envie d'aller voir mais je me retiens. Je n'ai pas envie d'être encore plus en retard.

Je descends les escaliers et me dirige vers la grande salle que j'ai visité plus tôt, les mains moites. Les gardes s'écartent à mon passage et je me mets à observer tout autour de moi. Le roi est en pleine discussion avec sa reine, debout, non loin de la grande table. Les princes Ander et Julio sont assis à table, suivie de la princesse Arynn et je retiens une grimace. Ils sont tous les trois avachis dans leur siège et je me demande sincèrement à ce moment s'ils ont déjà pris des cours d'éducation.

Je n'aperçois pas Sebastien et tente d'ignorer la déception qui se loge dans mon cœur, en vain. Je ne devrais rien ressentir à son égard mais je n'y arrive pas. Peut-être que si je me persuade qu'il m'indiffère, il deviendra vraiment inexistant pour moi ?

— Vous êtes bien trop nerveuse, souffle une voix masculine derrière moi.

Quand on parle du loup...

Je me retiens de sourire et me retourne. Le prince Sebastien me fait face, dans toute sa splendeur, ses yeux noisette me scrutent avec une intensité qui me chamboule de l'intérieur.

— Je... j'ai... Oui.

Un rire s'échappe de sa bouche et il me fait signe d'aller m'installer à table. Je brûle d'envie de m'entailler les veines pour me comporter si stupidement, ou bien de hurler à mon cerveau d'être plus original en matière de réponses. Mais j'imagine qu'une princesse criant à sa cervelle d'être plus intelligente, cela ne serait pas très bien vu par la famille royale...

Sebastien me donne un coup de coude pour avancer et je me reprends. Le prince Ander relève les yeux vers moi et son expression faciale se durcit. La tête dans sa paume, il me fusille littéralement du regard. J'ai l'impression d'avoir face à moi un enfant incapable d'agir avec maturité.

J'essaie de ne pas souffler et me redresse en m'asseyant. Juste en observant Sebastien et Ander, je peux juger qui semble le plus posé et mature des deux.

— Eileen, tu as quel âge ?

Je me tourne vers Arynn et réponds avec un sourire :

— Dix-neuf ans et toi ?

Je suis étonnée qu'elle ne connaisse pas mon âge étant donné qu'ils ont dû recevoir une fiche avec plein de renseignements à mon sujet.

— Pfff, une enfant... marmonne Ander en face de moi.

Les mains posées sur mes cuisses, je fixe la pâleur de ma peau et relève la tête, sentant tous les regards posés sur moi. Le roi et la reine sont encore en train de discuter derrière nous alors je me permets de répliquer :

— De nous deux, je me demande bien qui agit le plus en enfant, en ce moment même.

Il me fusille du regard, comme à son habitude et rétorque :

— Parce que tu te crois plus intelligente que...

— Ander.

Ses yeux se déplacent jusqu'à rencontrer ceux de Sebastien. Une tension bizarre s'installe entre nous tous et Julio la brise en se mettant à bailler bruyamment.

— J'espère qu'il y aura du gâteau...

— Arrête, veux-tu, reprend-il à l'attention d'Ander.

Il ne répond rien et c'est à ce moment que le roi et la reine nous rejoignent à table. Un long silence s'installe et les servants viennent directement nous servir. On me dépose un filet de viande avec un tas de légumes et je me retiens de dire quelque chose.

À ma tête, la reine fronce les sourcils.

—Tout va bien, Eileen ?

— Je... ne mange pas de viande.

Les couverts en tombent et Ander s'exclame :

— Et en plus d'être laide elle ne mange pas de viande !

Aoutch.

— Ander ! s'énerve la reine.

Le roi en rit et Arynn et Sebastien le fusillent du regard. Julio ne bronche pas, complètement dans la lune.

— Dire qu'elle est laide serait mentir, petit frère, intervient Sebastien d'un ton mesuré. Tu te mens à toi-même et ça en devient épuisant. Je vais demander à ce qu'on vous apporte autre chose, Eileen.

Il quitte la table pour aller chercher un cuisiner et je reste bredouille à table, perdue.

— Je ne te permets pas, Ander. Tu es grossier.

— Vraiment ? fait-il, l'air surpris. Tu appelles ça grossier quand je dis juste la vérité ? Cette fille débarque dans notre palais en robe de paysanne, elle ne sait même pas faire une révérence correctement et se tient bizarrement ! Elle est laide, et en plus de tout ça, déteste la viande ! Si tu appelles ça, grossier, mère, j'appelle ça simplement la pure vérité.

Je crois bien que c'est à ce moment précis que je commence à le détester. Il croit que j'ai demandé à me marier comme si mon rêve depuis toujours était de venir vivre ici et en plus de ça, il se permet de répercuter sa frustration et colère sur des choses qu'il ne connaît même pas.

Je lisse ma serviette de table et déclare :

— Je pense que... Nous devrions annuler le mariage. De tout évidence, il sera impossible pour nous de nous entendre, qui plus est quand je reçois une haine démesurée en pleine figure. Veuillez m'excuser.

Ma voix en tremble alors que je me lève pour quitter la table. J'entends Arynn m'appeler mais je n'entends rien. Je me contrôle pour ne verser aucune larme mais c'est trop tard. Un océan de douleur me compresse le cœur.

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Quand au rythme de publication, je publierai assez souvent (j'ai pas mal de chapitres d'avance mais j'en garde 1 ou 2 sous la main au cas où), au moins un chapitre par jour.

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On se retrouve bientôt pour le prochain chapitre ;)