Chapitre 20

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Il est quatre heures du matin et je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Je ne fais que me retourner dans mon lit, à droite puis à gauche puis j'ai arrêté de compter tellement je n'en pouvais plus. Comme à leur habitude, les oreillers sont chauds mais en plus de cela, les coussins le sont aussi. Je brûle d'envie d'aller parler à Sebastien, de me confier à lui et de lui partager ma tristesse.

Parce que dans le fond, je suis triste. Triste que les choses ne se soient pas passées comme je l'espérais secrètement, triste de voir que non, je ne plais pas et que je suis détestée par au moins deux membres de la famille royale. Depuis toute petite, on m'a toujours éduquée de manière à être irréprochable, parfaite pour devenir une reine bonne et bienveillante. Mais c'est le contraire qui est en train de se dérouler devant mes yeux maintenant. Je suis la propre spectatrice de mon avenir, je ne suis qu'un pion qu'on a déplacé, mon destin ne m'appartient plus et j'ignore si un jour il m'a réellement appartenu.

Au-delà d'être triste j'aimerais sincèrement comprendre pourquoi Ander me hait autant, ce qui le motive. Peut-être a-t-il une petite amie ? Ou bien peut-être que je suis aussi hideuse qu'il le conçoit ?

Mon ventre gargouillant me ramène à à la réalité. Quoiqu'il en soit, je meurs de faim.

Je me lève de mon lit et sors de ma chambre, nouant ma robe blanche cache-cœur avec les lanières. Je traverse les couloirs, longeant les murs et finis par descendre les escaliers. Les gardes ne font même pas attention à ma présence lorsque je me dirige tout droit vers les cuisines. Lorsque mes pieds nus entrent en contact avec le carrelage glacé, un sourire ravie se dessine sur mes lèvres. Enfin un peu de fraîcheur.

J'avance vers les étagères en bois peintes de bleu et ne me gêne pas pour tout ouvrir. Il doit bien y avoir quelque chose de bon à manger... Je tends le bras vers la corbeille pour prendre une pomme et vole deux biscuits faits par les cuisiniers cette après-midi. Je saisis un verre que je vais sûrement remplir de lait et au moment où je me retourne, je pousse un petit cri de surprise.

Le verre m'échappe des mains et vient se briser au sol, des morceaux s'éparpillant partout autour de mes pieds.

— Vous m'avez fait peur !

Ander se tenait devant moi pendant tous ce temps, adossé à la baie vitrée, les bras croisés sur son torse et le regard rivé sur moi. Il ne prononce aucun mot et je n'ose pas bouger ni même sortir d'ici parce que je sais qu'au moins pas que j'effectuerai, un morceau de verre viendra directement se planter dans la chair de mes pieds.

— Est-ce que je...

Je ne finis pas ma phrase. Il me déstabilise et je n'ai même pas la force de l'ignorer ou bien de lui faire la tête pour toutes les méchancetés qu'il a pu me dire.

— Il est quatre heures du matin, annonce-t-il.

Les cheveux en bataille, il est encore plus séduisant que d'ordinaire.

— Sans blague ? Merci pour l'info, mais il y a des morceaux de verre partout sur le...

— Je m'en fiche.

Et ça me déstabilise encore plus. J'aperçois à peine son visage d'où je me trouve mais la lune éclaire suffisamment ses traits pour que je comprenne qu'il me regarde.

Alors, je demande :

— Pourquoi êtes-vous aussi détestable ?

Je me rends compte que c'est l'une des premières fois que je m'adresse directement à lui. Ander hausse les épaules : il n'aura jamais de réponses à me fournir et je suis sûre que lui-même ignore pourquoi il est aussi exaspérant avec son entourage.

𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant