Chapitre 9

486 42 11
                                    

Eléonore

Dans quoi me suis-je encore embarquée ?!

Récapitulons un instant, j'ai sauvé la vie d'un gangster, effectué une opération chirurgicale dans un cadre non stérile, sans autorisation d'exercer sur le sol américain, j'héberge des personnes qui sont probablement recherchées par la police, j'ai fermé les yeux sur une cargaison sûrement illégales. Le must du must... je viens de proposer le gîte et le couvert à un homme que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam, et ça ? Pour le temps de sa convalescence...

Mais qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?

Suis-je frappée par le syndrome du super-héro ? Est-ce ma peur de la solitude ?

N'empêche que là, je me sens mal. Je me tape la tête sur le volant de mon pick-up. Garée devant le supermarché, je dois avoir l'air d'une folle puisque les passants me regardent comme si j'étais bonne pour l'asile. Qu'on aille chercher la camisole pour Eléonore Leclerc!

Pour autant, j'ai vraiment besoin de faire des courses. Que ce soit pour l'alimentation, avec tous ces hommes chez moi, je vais vite manquer d'à peu près tout, même s'ils repartent ce soir.

Aussi, Thomas n'est pas du genre prêteur. S'il apprend que je lui ai emprunté un de ses vêtements, il serait capable de me faire une scène. Sauf que mon patient va avoir besoin de s'habiller.

A vu d'œil, je dirais qu'il est du même gabarit que mon frère. Difficile à évaluer quand un homme est allongé.

Donc il lui faut des frusques larges et confortables. Quelque chose de facile à enfiler et facile d'accès pour que je puisse le soigner.

Sans compter qu'il me faut de quoi remplacer ses pansements, des bandages, du paracétamol - s'il veut bien en prendre -, du désinfectant et refaire le plein de ma trousse de secours.

Je dépose ma tête sur le volant.... Misère. J'espère qu'ils ne me tueront pas.

Bon, même si leur chef, Lenny, à l'air de croire que je vais faire du mal à son « homme », je ne pense pas, du moins je l'espère, qu'il atteindrait à ma vie. Ils ont besoin de moi.

J'avoue que j'ai frémi intérieurement quand il a suggéré que je parte avec eux... j'ai eu peur qu'il me kidnappe... ce qui est possible aussi.

Mais l'argument de l'hémorragie a fonctionné, en plus d'être vrai... Pour un peu, j'ai cru qu'on allait m'enlever. Je ne sais même pas ce qui m'a pris de lui tenir tête comme ça, ça ne me ressemble absolument pas.

Je respirerai mieux quand ils seront tous repartis et que je serai seule avec mon "invité".

L'avantage, c'est qu'avec ses blessures, je peux aisément le semer s'il voulait me faire du mal. Et puis, il me tiendra compagnie.

Cependant, le hic... c'est qu'il me tiendra compagnie. Une compagnie très agréable à regarder. Hier, je n'ai pas fait attention, mais putain, ce mec... c'est un véritable dieu Viking, voir la réincarnation de Thor avec ses cheveux blonds foncés plus long sur le dessus et les côtés de rasés.

Et ses yeux.... J'en frémis encore... des iris d'un bleu tirant sur le gris dont les rides sur les coins le rendent encore plus craquant. Accentué par une barbe mal rasée... Je fonds.

J'imagine que si Bradley Cooper et Chris Hemsworth avaient un frère, ce serait lui.

Pourtant, j'ai tendance à m'arrêter sur le même type d'homme, c'est-à-dire brun, soignés et ayant beaucoup barbe. Comme Keanu Reeves dans le film Speed voir même Ricky Whittel dans la série American God... l'opposé en somme.

— Mademoiselle, tout va bien ?

Je lève la tête vers l'agent de police qui a donné quelques coups contre ma vitre.

Est-ce que je vais bien ? Bonne question. Je crois que oui...

Je pourrais tout lui avouer, lui dire que des malfrats sont chez moi, qu'ils m'ont obligé à pratiquer la médecine...

Alors pourquoi est-ce que je lui souris comme si tout allait bien ? Papa me dirait de suivre mon instinct, et là, il me somme de me taire.

— Bonjour Monsieur l'agent, pourquoi me demandez-vous cela ?

— Des passants ont signalés une jeune femme au comportement étrange dans un pick up vert.

Je prends une mine contrite. En effet, j'ai dû faire peur à quelques personnes.

— Tout va bien, j'attends des nouvelles de mon frère qui a pris l'avion hier, je suis un peu angoissée et il ne me rappelle pas.

— Je vous reconnais, vous êtes la jeune femme qui a emmenagé à la sortie de la ville.

Je hoche la tête pour confirmer. Je n'arrive pas à sonder son expression à travers ses lunettes de soleil aviateur.

— Il était quand son vol, à vot'frère ?

— Hier. Il allait à Paris mais avait une escale à New-York.

L'agent arbore un air sympathique.

— Z'en faites pas, les compagnies aériennes ont souvent du retard et avec le décalage horaire, il doit sûrement dormir. Si vous z'avez pas de nouvelles de sa part d'ici demain, contactez l'poste de police, j'verrais ce que je peux faire pour vous.

Je lui offre toute ma gratitude dans mon sourire, même si j'ai à moitié raconté des bobards, sa sollicitude me touche.

— Vous êtes bien aimable, merci Monsieur l'Agent.

J'attrape mon sac à main et entreprends de descendre de ma voiture.

— Les amis de Bonnie sont mes amis. Elle m'a dit beaucoup d'bien d'vous, il me gratifie d'un sourire affable et poursuit, j'vous dérange pas plus longtemps, bonn'journée mademoiselle.

Il prend congé d'un signe de tête tandis que je m'empresse de descendre de la voiture et de m'emparer d'un chariot pour mes futures emplettes.

Je devrais me sentir mal à l'aise, alors qu'il n'en est rien.

Faut avouer que depuis que j'ai quitté mon emploi à l'hôpital, il ne m'est plus rien arrivé d'aussi excitant. Ce doit être ça, j'étais accro à l'adrénaline et il faut avouer que ce que je vis depuis moins de douze heures est un sacré shoot de sensations fortes.

J'entre dans le magasin, me répétant intérieurement « Faites que ça ne dérape pas ».

Wild Wolves - DéloyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant