Chapitre 66

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Drake

Dix mois plus tard

Bien que j'aie de nombreuses fois foulé le chemin jusqu'à cette maison, ces derniers mois, cette fois-ci laisse une sensation étrange dans ma poitrine.

L'allée de gravier a été troquée pour une chaussée bitumineuse, plus confortable pour la conduite. Cependant, cela ne la rend pas plus agréable aujourd'hui.

Alors que les contours de la baraque de Brownville se dessinent, c'est officiellement l'ultime trajet qu'on fait pour rendre visite à Lennox.

L'état de santé de mon ancien Président s'est dégradé. Rapidement.

Ne pouvant être témoin de la vulnérabilité de cette personne que je considérais comme un père par procuration, j'ai espacé mes rencontres. Le voir devenir l'ombre de lui-même était trop pour moi.

Se battre contre les hommes est plus facile que contre un adversaire invisible. Un ennemi plus insidieux, perfide et nettement plus brutal.

Telle une seule entité, mes frères et moi nous garons devant la grange du Doc, aux côtés des bécanes des Indians déjà installées. Convoi spécial oblige, nous avons rameuté tous les membres importants et nos alliés.

Je grimpe les quelques marches du perron qui lui aussi a terminé de faire peau neuve. La maison n'a plus rien de délabré et ressemble à s'y méprendre, à ses putains de brochures que proposent les agents immobiliers pour y accueillir les parfaites petites familles. Les nouveaux volets verts et la façade complètement repeinte en blanc y sont pour quelque chose. Sans parler de l'extension au rez-de-chaussée, passant sous l'escalier, pour en faire une chambre médicalisée attenante à une salle de bain, plus adaptée pour Lennox. Bien que je n'ai pas été présent pour superviser les travaux, j'ai suivi de bout en bout chaque avancée et demandé un rapport détaillé auprès des prospects chargés du chantier. Ainsi qu'une fiche développée sur tous les ouvriers qui devaient bosser.

Pas seulement pour Lennox. Pour Eli aussi. Elle me hante. Chaque putain de jours et toutes mes putains de nuits.

Je rêve de la rejoindre, de lui demander pardon et de pouvoir la toucher comme j'en avais le droit. Hormis quelques banalités, nos discussions sont brèves et se portent uniquement sur Lennox.

C'est moi qui ai instauré cette distance entre nous. J'ai bien remarqué ses regards, mais le poids de la culpabilité demeure trop fort et je préfère rester loin d'elle. De peur de craquer.

J'ai échangé une addiction par une autre. Eli est ma drogue et ma désintox est plus dure chaque seconde que je passe auprès d'elle.

Seyfer entre sans frapper. L'odeur de bois brûlé et de viande grillée m'indique que Thomas a déjà commencé le barbecue. Quelques rires et des cris d'enfants proviennent du jardin. Les Wolves passent devant moi et je m'arrête dans le salon, admirant les récentes photos qui ont été ajoutées aux murs. Sonia tenant pour la première fois son fils, Lenny. Lennox et Xander déconnant face à la mine boudeuse de Yéléna, Eli portant le nouveau-né aux côtés de Sonia et d'une Yéléna souriante. Moi qui pensais que la blonde en était incapable, c'est déconcertant.

Gale se poste à ma droite et contemple à son tour les clichés. Nous n'avons pas revu sa femme depuis qu'elle est partie. Elle s'est arrangée pour ne jamais être présente lors de nos visites. Il apprend à respecter les choix de son ex qui refuse de le voir, bien qu'il s'abstienne de signer les papiers du divorce.

— Oh, mon petit chat, t'es grognon parce que les vilains messieurs font trop de bruits.

Le timbre légèrement grave et enjôleur de Yéléna nous parvient, et Gale se tend pour se retourner vers la cuisine, là d'où provient sa voix. La blonde ne semble pas s'être aperçue de notre présence.

Wild Wolves - DéloyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant