Chapitre 64

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Drake

Je redoute cet instant tout comme je suis impatient.

Maintenant, je ne peux plus détourner le regard, je dois la confronter. Je veux savoir, j'en ai besoin.

Assise sur une chaise qu'on a ramenée pour « l'occasion », je contemple Rebecca, son visage camouflé par ses cheveux défaits.

À quel moment tout est parti en couille ?

Qu'est-ce qu'il s'est passé pour qu'elle sombre et choisisse de nous trahir ? De me trahir ?

Un bruissement métallique attire son attention vers le corps de mon « invité » qui gît toujours dans un coin. Reaper a terminé de foutre en l'air son âme, il n'est plus qu'une carcasse vide dans l'attente qu'on lui accorde l'ultime châtiment.

Cependant, sa vie est la dernière de mes préoccupations. Pour le moment.

J'avance un peu plus dans mon atelier, m'empare d'une chaise pliante et m'assois face à elle.

C'est la première fois que je la vois depuis qu'elle s'est échappée. C'est Reap qui me l'a ramené, en guise de « cadeau » de remerciements.

Notre MC ne touche pas aux femmes, mais aucune règle n'a été instaurée pour celles qui nous trahissent.

Sa tête inclinée vers le bas, mes doigts se posent doucement sur son menton pour pouvoir enfin l'affronter. Ses pupilles marron se voilent de chagrins et de regrets.

Ma poitrine se serre d'amertume. De cette sensation de perdre quelqu'un d'important pour moi, mais pas moins inéluctable.

— Pourquoi ?

Les larmes inondent ses joues. Je revois l'enfant qu'elle était. Cette gamine qui a trop vécu, trop souffert et que j'ai pris sous mon aile quand nous n'étions que des gosses.

— Pourquoi ?

— Tu ne comprendrais pas...

Sa voix n'est qu'un murmure. La femme forte qu'elle a toujours été s'est évanouie, n'existe plus.

— Alors, explique-moi.

Un terrible sanglot la secoue. Elle tente de le dissimuler derrière ses mains aux poignets menottés.

Donc j'attends. Je ne suis pas pressé. Je n'ai pas décidé de la suite à adopter, c'est trop brouillon dans mon esprit.

Pourtant, la sanction pour les traîtres est claire. L'élimination.

Des minutes s'égrènent. Peut-être même des heures, mais je patiente.

— Tu te rappelles le jour où je suis arrivée au foyer ? J'étais si triste, si en colère, mais... mais tellement soulagée.

Ça fait plus de vingt ans, mais oui, je m'en remémore son regard perdu, presque éteint. La douleur que j'y voyais était si tangible qu'elle me renvoyait à mes propres démons, de l'époque où je vivais encore avec mon père.

— J'étais soulagée parce que ma mère ne pouvait plus se servir de moi pour faire le tapin. J'étais soulagée parce que je n'étais plus forcée de sucer la bite des clients qu'elle ramenait dans notre taudis. Est-ce que tu sais ce que ça fait, quand à huit ans, un homme te prend si fort qu'il te déchire le vagin et que tu termines à l'hôpital ? D'être obligée de se faire retirer ton utérus parce qu'il est trop abîmé ?

Je ferme les yeux, révulsés par ses paroles qui me touchent malgré moi.

— Non... tu ne sais pas. Et tu ne le sauras jamais... Clay, lui, il savait. J'avais neuf ans quand ma mère m'a déposé au foyer. J'étais soulagée, mais j'ai aussi abandonné mon petit frère là-bas. C'est son mac qui a eu l'idée. J'étais devenue trop pénible, à crier, à mordre, à répondre. Alors ce sale nègre lui a dit de se débarrasser de moi, à moins qu'elle ne préfère que je termine une balle dans la tête. Donc, dans sa grande bonté, elle m'a déposé au foyer.

Wild Wolves - DéloyalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant