Chapitre 53

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J'ai l'impression de sentir mon cœur tomber à mes pieds. Non. NON.

Pas eux. Pas ici. Pas encore.

Je... Je ne peux pas...


Mes pensées s'effondrent comme un château de cartes, chaque souvenir revient en force, brutal et indésirable. Leurs bras serrés autour de moi, le froid glacial du métal contre ma peau, ma langue pâteuse sous l'effet des drogues. La peur. La solitude.


C'est trop.


Instinctivement, je recule, comme si la distance pouvait m'éloigner de la terreur qui me paralyse. Thalia et Aveline ne remarquent rien, trop concentrées sur ce qui se passe derrière la porte, trop absorbées par l'imminence du danger. 

Mais moi, je suffoque. Je n'arrive plus à respirer, l'air me manque, chaque inspiration est une bataille perdue. J'ai l'impression que le temps s'arrête pour moi tandis que tout continue autour.


Je perds pied, tombant à genoux sur le sol, incapable de me tenir debout une seconde de plus. Le choc de mes genoux sur la moquette attire l'attention de Thalia et Aveline qui se retournent immédiatement, alarmées. Leurs visages expriment la panique, l'inquiétude, et je vois leurs lèvres bouger, mais le son ne me parvient pas.


— "Lyra ?"


Thalia murmure mon nom, sa voix tremblante d'inquiétude, mais je ne peux pas répondre. Les mots restent coincés dans ma gorge, étouffés par la peur, par l'incapacité à gérer ce qui se passe.


Je veux crier, leur dire que je ne peux pas faire ça ! Que je ne sais pas me battre, que mes pouvoirs me dépassent encore. Que je suis inutile, incapable de protéger qui que ce soit.

Et que les monstres que je redoute le plus, ceux qui me hantent même en rêve, sont là, à quelques mètres seulement.


La réalité me frappe comme un coup de poing.


Thalia échange un regard avec Aveline, et sans dire un mot, elles m'attrapent chacune par un bras et me traînent doucement plus loin. Je me laisse faire, trop engourdie pour résister, trop perdue pour protester. Les murs défilent flous autour de moi, et je reconnais vaguement les toilettes quand on s'y approche. Elles m'y installent, contre le mur froid, puis Thalia se redresse, déterminée.


— "Toi, tu restes là. On s'occupe d'eux."


Elle dit ça comme si c'était facile, comme si c'était naturel pour elles de foncer dans la mêlée. Sa voix est ferme, mais je perçois la tension qui la traverse.


Puis, elle sort en trombe, me laissant seule avec Aveline.


Aveline me fixe intensément, son regard oscillant entre assurance et peur. Je baisse les yeux, incapable de soutenir le sien. La honte et la terreur m'accablent. Respirer. Juste respirer, Lyra... Mais c'est plus facile à dire qu'à faire.


— "Ça va aller, on revient vite..", murmure mon amie avant de partir à son tour.


Les Royaumes OubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant