Ana à GEH

6.2K 62 0
                                    

Christian
Il est l'heure de diner, mais Ana s'est endormie après l'amour. Je lui accorde une demi-heure de repos et je la réveille pour lui demande de s'habiller. Pour ne pas être tenté de recommencer à la caresser, je file dans mon bureau. Ana me rejoint dans une tenue qui me consterne. Son tee-shirt a un décolleté quasi indécent. Bon Dieu, nous ne sommes pas seuls dans l'appartement, Sawyer et Taylor sont encore là. Je ne veux pas qu'ils voient ma femme ainsi (dé)vêtue. De plus, elle porte un pantalon de soie qui la moule comme une seconde peau. Elle pourrait aussi bien être nue.
Je ne dis rien - mais j'ai du mal.
Nous mangeons rapidement. Je passe mon temps à surveiller qu'aucun de mes agents de sécurité ne s'approche de nous. Heureusement, ce n'est pas le cas. Mrs Jones a également disparu.
Après le diner, je conseille à Ana de se reposer. Elle ne proteste pas. Ce qui m'étonne d'abord, m'inquiète ensuite. Je la suis jusque dans la chambre ; elle s'installe sur le lit, les jambes croisées, et dépose autour d'elle de nombreux manuscrits. Du travail ? Elle aussi a rapporté du travail à la maison ? Bien sûr, elle doit simplement lire ces putains de papiers, mais quand même...
Je fronce les sourcils. Ana est penchée en avant, son décolleté en devient plus provocant encore. Je décide de m'exiler dans mon bureau.
J'y suis à peine que mon BlackBerry sonne. C'est Ros. Elle est encore à GEH où elle avait un dossier à boucler.
- Oui, Ros ? Que se passe-t-il ?
- Vous venez à GEH demain ?
- Samedi ? En principe, non. Pourquoi ?
- L'équipe des ingénieurs vient de me déposer leurs résultats concernant l'énergie solaire pour les portables écologiques.
- Ils ont enfin répondu à ce que j'attendais ? dis-je, très excité.
- Oui, et vous aviez raison, ça marche aussi bien à l'énergie solaire qu'aux éoliennes. Écologiquement, ce sera parfait, avec un coût de production minime.
- C'est vrai ?
Je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi rapide. Dans mon enthousiasme, je commence à arpenter mon bureau tandis que défilent dans ma tête des croquis, des projections financières, des marchés à venir...
- Je réunis tout le monde demain ? continue Ros qui me connaît bien.
- Oui. 8 heures. La salle de réunion près de mon bureau. Contactez aussi... Je lui donne des ordres rapides, braqué sur ce projet qui me tient à cœur. Quand je raccroche, Ana est à la porte. Elle me regarde tristement.
- Tu t'en vas demain ?
- Ça te dit de venir avec moi ? Elle éclate de rire.
- Quand je vais chez SIP, tu considères que je devrais me reposer, et ce week-end, alors que je comptais lire tranquillement des manuscrits dans l'appartement, tu veux m'emmener chez GEH ?
- C'est différent, baby. J'aimerais te montrer une de nos réalisations qui compte beaucoup pour moi. Il s'agit d'un nouveau téléphone portable. Il marche à l'énergie naturelle et serait susceptible de fonctionner dans tous les coins de la terre qui ne bénéficient pas d'électricité. Tu imagines ? Ce serait utile aux campeurs, aux randonneurs, aux soldats expatriés. Ne parlons pas de l'aide que ça apporterait aux pays sous-développés...
Ana me sourit tendrement. Elle connaît ma passion secrète. Et puis, elle m'a offert un jour un jouet, un hélicoptère fonctionnant déjà à l'énergie solaire. Je trouve extraordinaire que cette technologie ait déjà de tels usages, les enfants seront tout à fait habitués à ces nouveaux procédés une fois devenus adultes.
- Tu as raison, Mr Grey, c'est très important. Allons-y.
Je la prends par la main. Ma femme et moi serons ensemble à GEH, dans ce même bureau où une jeune étudiante apprentie journaliste s'est écroulée à quatre pattes, il y a quelques mois.
Je commence à réaliser ce qu'est le bonheur.
***
En voiture, durant tout le trajet, je tiens la main d'Ana dans la mienne. Je remarque les coups d'œil que me jette Taylor dans le rétroviseur. À mon avis, il se retient de ricaner. L'enfoiré ! Il a de la chance que je sois de bonne d'humeur. Sawyer est là aussi, il semble peu concerné par ce changement inattendu. Comme Ana restera avec moi, Sawyer... eh bien, il se débrouillera avec Andrea ou Taylor. À dire vrai, je m'en fous.
Ana et moi pénétrons dans la tour GEH par la porte principale, Sawyer sur nos talons, Taylor s'éloigne avec la voiture pour la garer dans le parking souterrain. Il y a encore beaucoup de monde dans le hall, tous les yeux se braquent sur nous. Plusieurs s'écarquillent de surprise.
Pourquoi bordel ?
Sans doute parce que tu tiens la main de ta femme, Grey.
Et alors ? Je ne vois pas ce que ça a de si étonnant. Je fronce les sourcils, ce qui pousse mes employés à s'éloigner rapidement.
Une fois dans l'ascenseur, je dis à Ana :
- C'est la première fois que tu reviens depuis cette fameuse interview.
- Non. Je suis passée te chercher plusieurs fois !
- Oui, mais tu m'attendais en bas ou dans la voiture. Aujourd'hui, tu seras dans mon sanctuaire.
Dès que je sors de la cabine, au vingtième étage, la nouvelle stagiaire- Janelyn Stevens - bondit sur ses pieds... puis elle aperçoit Ana et se fige, tétanisée de stupeur.
- B-bonjour, Mr Grey... hum, Mrs Grey ? Nous... ne vous attendions pas. Où est mon assistante ?
- Andrea !
J'ai parlé d'un ton sec, désireux de faire comprendre à cette fille que ma femme, attendue ou pas, a le droit d'être là où elle veut. Je sens une pression sur ma main. Étonné, je me tourne vers Ana, qui secoue la tête avec un sourire.
Mon assistante arrive au même moment.
- Bonjour, Andrea, dit Ana. Christian m'a convaincue de l'accompagner ce matin. J'espère que ma présence ne vous dérangera pas.
- Oh Mrs Grey... non ! Bien sûr que non !
Andrea est toute rouge, son regard glisse derrière nous et s'attarde sur Sawyer. Comme il est chargé de veiller sur le bien-être d'Ana, j'imagine qu'il ne doit pas apprécier non plus cet accueil maladroit. Je ne me retourne pas pour vérifier. J'entraîne Ana vers mon bureau.
Avant d'entrer, je me retourne :
- Andrea ? Je reçois les ingénieurs. Ensuite, je ne veux plus être dérangé.
- Ms Bailey voudrait vous voir, elle m'a demandé de la prévenir dès votre arrivée.
- Très bien. Dans cinq minutes.
Andrea et la stagiaire ne sont pas les seules à nous fixer, je sens des yeux peser dans mon dos. En général, je déteste qu'on me scrute, mais aujourd'hui, je m'en fiche. Saisi d'un élan irrépressible, je passe un bras autour de la taille de ma femme pour la serrer contre moi. Au même moment, Taylor nous rejoint et ouvre la porte de mon bureau. Il jette un coup d'œil à l'intérieur, puis son regard croise le mien dans une question muette.
Je lui réponds de la même façon - en silence. Il hoche la tête pour indiquer qu'il a compris et referme la porte sur nous, en restant dans le couloir.
- Christian, déclare Ana moqueuse, je suis surprise que tu ne m'aies pas portée dans tes bras pour franchir ce seuil sacré. Comme tu l'as déjà fait dans l'avion, à la maison, à Aspen...
- Moi, Mrs Grey, je suis surpris que tu sois entrée dans ce bureau sans tomber à quatre pattes.
- Oooh ! C'est vraiment peu galant de ta part de me rappeler cet incident !
- Je n'ai rien d'un homme galant, baby, tu le sais. Et cet « incident » restera un des plus beaux souvenirs de ma vie.
Elle hoche la tête avec un sourire, puis regarde autour d'elle et s'attarde un moment sur les photos de Trouton toujours exposées sur mon mur.
- Pour moi aussi, chuchote-t-elle.
Elle fronce les sourcils. Je me tourne pour savoir ce qui la chiffonne. Elle fixe le portrait d'elle que j'ai acheté à Rodriguez. Elle penche la tête, hésite, mais ne dit rien.
- Ana ?
- Oui ?
- J'adore ce portrait. J'adore t'avoir sous les yeux quand je travaille. Je la prends dans mes bras, elle plaque son visage contre ma poitrine.
- Mais enfin, Christian... tous les gens qui viennent dans ton bureau...
- Oui, et alors ?
- Ils me voient, chuchote-t-elle, gênée.
- Tu es ma femme, Ana. J'en suis fier. Je veux le crier au monde.
- Tu as mis ce portrait dans ton bureau avant que je sois ta femme.
- Tu étais déjà mienne, baby.
- Et tu n'en as pas marre de me voir en permanence ?
- Non, tu es le centre de mon univers. J'aimerais passer mes journées avec toi, à te voir rire et bouger, à entendre ta voix. Puisque j'en suis privé durant de longues heures, j'ai au moins ton droit à ton sourire.
Je me penche pour l'embrasser. Ses lèvres s'ouvrent sous les miennes, humides et accueillantes. J'ai très envie de la coucher sur mon bureau et de la prendre... il me suffirait d'ordonner à Andrea de repousser mon entrevue avec Ros... et avec les ingénieurs.
À peine ai-je cette idée qu'une voix émerge de mon haut-parleur :
- Mr Grey, Ms Bailey est là pour vous voir. Merde, trop tard !
- Je n'en ai pas terminé avec toi, Mrs Grey, mais pour le moment, d'autres personnes réclament mon attention.
Ana passe la main sur la bosse de mon entrejambe.
- Je ne suis pas certaine de devoir te laisser dans cet état, Mr Grey. N'est-ce pas de mon devoir d'épouse de veiller à tes besoins ? Tout à l'heure, quand tu seras tout seul, je passerai sous ton bureau... (Elle cligne de l'œil.) Pendant que tu continueras à gagner des millions, je te...
Elle s'interrompt tout à coup, le visage empourpré. J'éclate de rire.
- C'est une promesse, baby. Je compte bien que tu la tiennes. Je m'écarte d'elle et avance jusqu'à mon interphone.
- Faites entrer Ms Bailey, Andrea.
Ros pénètre dans mon bureau d'un pas décidé, mais elle se fige, surprise en remarquant que je ne suis pas seul.
- Ana ! Quelle excellente surprise !
Elle paraît sincère. Depuis quand appelle-t-elle ma femme « Ana » ? Elles ne se sont rencontrées qu'une fois ou deux, y compris à ce ridicule enterrement de vie de jeune fille que Katherine Kavanagh avait organisé... Je n'oublie pas que Ros préfère les femmes, aussi son amabilité envers la mienne éveille mes soupçons et ma jalousie. Même si Ros a une compagne à laquelle elle tient beaucoup... D'ailleurs, ne sommes-nous pas censés, Ana et moi, dîner prochainement avec elles ? En temps normal, je ne mélange pas les affaires et les mondanités, mais tout change depuis qu'Ana est entrée dans ma vie.
- Ros, vous vouliez me parler. Est-ce au sujet de notre rendez-vous avec l'équipe des ingénieurs ?
- Non, répond-elle en hésitant. Pas vraiment.
En la voyant jeter un coup d'œil en direction d'Ana, je devine qu'elle n'est pas certaine de devoir parler en sa présence. Je fronce les sourcils, mécontent.
- Ana est au courant de tout ce qui me concerne, je vous écoute.
- Très bien... Il s'agit de cet envoi d'argent pour la prochaine échéance à Taïwan.
- Oui, et alors ? J'avais cru comprendre que vous vouliez leur donner la moitié à la signature du contrat et attendre six mois pour le solde. Vous avez changé d'avis ? Pourquoi ?
Je m'enfonce dans mon siège, les coudes posés sur mon bureau, le menton sur mes poings serrés.
- Nous avons déjà déposé plus de cent dix millions de dollars sur un compte local. Le chantier naval ne correspond toujours pas à nos critères. J'ai parlé avec le directeur sur place, il va nous falloir intervenir pour rectifier le tir. Comme vous le savez, j'ai déjà envoyé un consultant sur place, mais je voudrais maintenant que le directeur de notre chantier à Seattle, Lennon Bruce, rejoigne Tim Willis à Taïwan pour vérifier exactement les besoins sur place et la meilleure façon d'y pourvoir sans que les coûts de réajustement fassent exploser nos budgets. Les travaux ont déjà commencé, je tiens à m'assurer que l'outillage employé est bien approprié. Le fait de travailler avec la main-d'œuvre locale nous permet d'économiser des taxes et des impôts, comme nous en avons déjà discuté, mais pas question que notre argent soit gaspillé.
Durant le discours de Ros, j'ai surveillé Ana. Elle ouvre de grands yeux, manifestement peu habituée à entendre parler de sommes aussi extravagantes. Elle ne dit rien, mais son regard se pose sur moi, un peu inquiet, un peu admiratif. Je suis content d'être assis, ce qui cache mon érection toujours douloureuse. Pour contrôler mes fantasmes, je me concentre sur Ros.
- Que voulez-vous faire ? Vous rendre aussi à Taïwan ?
- En fait, j'allais vous proposer de faire vous-même le voyage, de parler aux banquiers, au directeur, à nos divers employés. Vous êtes bien plus efficace que moi dans ce domaine. D'un autre côté, je maîtrise les chiffres et la gestion, aussi peut-être pourrions-nous y aller ensemble. Chacun de nous est un ouragan, ensemble, nous formerions un tsunami.
Elle a raison, bien sûr, pourtant je ne suis pas certain qu'il soit sage de me rendre à Taïwan. Ana est enceinte. J'aimerais qu'elle m'accompagne, mais elle refusera - à cause de SIP.
Et le Dr Greene n'apprécierait pas cette suggestion, Grey.
- Je vais y réfléchir. J'appellerai ce soir le directeur du chantier naval.
- Si tu pars à Taïwan, Christian, ce serait pour quand ? demande Ana.
- Je n'ai encore rien décidé.
Ana ne tient pas compte de mon ton menaçant.
- Ros ?
- Dans les deux semaines, mais ce n'est pas définitif. Je peux gagner du temps, avec l'aide de Bruce et Willis... Mr Grey n'aura pas à intervenir avant un bon mois. En fait, l'important est de décider préalablement quels changements nous désirons apporter au chantier naval pour qu'il soit opérationnel selon nos critères habituels.
Je fusille Ros du regard : je ne lui ai pas demandé de tout dévoiler devant ma femme.
- Ça te dirait d'aller à Taïwan dans deux semaines ? Insiste Ana.
- Comme je viens de te le dire, je ne veux pas prendre de décision en ce moment. Tu t'es trouvée mal à l'hôpital il y a quelques jours, et ma priorité reste ton état de santé. Je paye certains de mes employés suffisamment cher... (Je jette à Ros un regard entendu,) pour qu'ils résolvent ce genre de situation sans mon intervention. Si je dois me rendre à Taiwan, je le ferai plus tard. Bien plus tard.
- Très bien, dit Ros, calmement. Voici les derniers coûts prévisionnels. Les travaux doivent commencer le plus tôt possible.
- Je veux d'abord parler au directeur, ce dont je me chargerai ce soir. Ne le prévenez pas de cet appel... Je veux le prendre à l'improviste.
Une fois de plus, mon intercom s'anime :
- Mr Grey, les ingénieurs vous attendent en salle de réunion numéro 4.
- Ms Bailey et moi les rejoindrons d'ici quelques minutes, Andrea. Faites-leur apporter du café et des viennoiseries - et pour Mrs Grey, du thé Twinings et des crackers.
- Christian ! proteste Ana.
- Baby, tu n'as rien mangé ce matin.
Ros me fixe, les yeux étrécis. Je devine quels soupçons lui viennent à l'esprit : après tout, je viens d'évoquer un malaise d'Ana à l'hôpital, et maintenant je parle de crackers - quand tout le monde sait que les femmes enceintes en sont friandes. En dehors de ma famille, je n'ai averti personne de la grossesse d'Ana.
Je pense être redevenu à peu près décent, je quitte l'abri de mon bureau pour avancer jusqu'à ma femme.
- Que veux-tu faire ? Venir avec moi en réunion ou rester ici ?
- J'ai apporté des manuscrits à lire et à annoter, Christian. Je vais rester ici.
- Ma salle de bain privée est juste derrière cette porte, baby. Andrea t'apportera un plateau d'ici quelques minutes.
- Très bien.
- Sawyer sera dans le couloir. Si tu as besoin de moi, envoie-le me chercher. - Christian, je vais très bien. Ne t'inquiète pas.
Je me penche pour l'embrasser. Quand je lève les yeux, Ros Bailey a disparu. Tant mieux.
***
En sortant de ma réunion avec mes ingénieurs, j'apprends qu'Ana a refusé les crackers... je n'ai pas le temps de m'énerver, Andrea m'informant déjà qu'elle a voulu autre chose à la place : elle a envoyé Sawyer lui chercher une soupe aux palourdes et du pain noir. Et des fraises.
Comme petit déjeuner ?
Oh merde ! À l'heure actuelle, tout l'immeuble doit savoir que ma femme est enceinte. Génial !
Ana et moi déjeunons ensemble dans mon bureau. J'ai beau la surveiller de près, elle ne paraît ni fatiguée ni malade. En fait, elle semble avoir faim. Elle a demandé une salade César. Elle la dévore et sauce son assiette avec du pain au maïs. Elle a terminé bien avant moi.
Elle jette alors sur mon assiette un regard concupiscent.
- Je n'ai plus faim, dis-je, en cachant un sourire. Tu veux terminer ?
- Oui.
Très amusé, je lui tends mon assiette, une simple salade de boulgour au poulet ; Ana se jette dessus comme s'il s'agissait d'une question de vie ou de mort. Elle récupère la vinaigrette d'un doigt qu'elle suce, en fermant les yeux.
Son geste délibéré m'excite, bien évidemment.
- Mrs Grey, tiens-toi bien.
- Et si je n'ai pas envie de me tenir bien ? (Elle bat des cils.) Tu sais, j'ai encore faim, je voudrais un dessert.
- Lequel ? Un gâteau au chocolat ? Une crème renversée ?
- Un sucre d'orge... dit-elle en se léchant les lèvres.
- Ana !
- Quoi ?
- Je t'ai souvent expliqué les avantages du plaisir différé, baby, tu n'as jamais intégré mes leçons. Grey, trouve vite un autre sujet de conversation... Lequel ?
Il me vient une idée...
- Si je me rappelle bien, à ton premier passage à GEH, j'ai voulu te montrer mes locaux. Tu m'as refusé ce plaisir pour t'enfuir au plus vite.
Elle s'en souvient aussi. Son regard devient songeur.
- Tu me faisais peur, avoue-t-elle.
- Pourquoi ?
- Parce que tu m'attirais trop. Ce qui me rendait maladroite.
- Oh, ça, je m'en souviens, tu as mis un bail avant de brancher ton fichu enregistreur. Je ne sais combien de fois tu l'as fait tomber sur ma table Bauhaus.
- Ta table... quoi ?
- Le Bauhaus est un institut des Arts et des Métiers fondé à Weimar, en Allemagne, au début du siècle passé. Ça désigne aussi un design contemporain qui a inspiré bon nombre d'artistes d'avant-garde.
- Pfut, c'est d'un snob ! Une table basse est une table basse, elle devrait être appréciée pour sa beauté intrinsèque, pas pour le prétendu génie qui l'a conçue.
Perdu dans mes réminiscences, je ne relève pas son insolence.
- Tu sais, Ana, en temps normal, je ne supporte pas les gens maladroits, surtout pas les néophytes qui me font perdre mon temps. Mais toi, je te trouvais adorable. Je voulais profiter au maximum de ta présence. En fait, j'envisageais même les différentes façons de te dompter.
Elle se mordille la lèvre, les pupilles dilatées par le désir.
- Christian...
- Tu faisais ça aussi... te mordre la lèvre... À l'époque, baby, tu ignorais l'effet que ce geste avait sur moi. Aujourd'hui, tu le sais. Je ne peux y résister.
- Alors, ne résiste pas...
- J'ai eu un fantasme ce jour-là.
- lequel ?
- Je te voulais couchée sur mon bureau. Quand tu m'as demandé si j'étais gay, j'aurais voulu te coller une fessée puis te baiser par derrière, sur ma table, les mains attachées. Pour te démontrer ma parfaite hétérosexualité.
J'ai le sang qui bout. Cette interview date de plusieurs mois, mais elle aurait aussi bien pu avoir eu lieu ce matin.
- Je suis d'accord.
- Quoi ?
- Pour ce programme...
Elle jette un regard autour d'elle et murmure :
- ... la fessée, la baise, ton bureau...
- Plus tard. Pour le moment, ce qui m'intéresse, c'est ta compagnie.
- Non ! crie-t-elle, sans plus se soucier d'être discrète. Comment peux-tu m'allumer ainsi et ne rien faire ensuite pour... pour...
Elle se met à bouder. Elle est adorable.
Brusquement, elle se tourne vers moi, un sourire lumineux aux lèvres.
- Tu ne devrais pas tourmenter une femme enceinte. Ce n'est pas sain.
- Baby, après ton interview, j'ai attendu quinze jours pour te revoir, malgré ma colère d'avoir été injustement traité de gay. Et tu sais que j'aime les punitions instantanées, surtout quand l'offense est d'importance.
- Bon, je vais être obligée de téléphoner au Dr Greene pour lui demander une ordonnance
- À quel sujet ?
Ana me fixe, les yeux brûlants.
- Elle m'a conseillé de satisfaire mes fringales... Je te veux. Maintenant. Tout de suite.
- Non. Nous allons d'abord faire un tour de reconnaissance. Viens.
La prenant par la main, je la fais se lever. Surprise, elle me suit sans discuter. Dès que j'ouvre la porte du bureau, Andrea et Janelyn lèvent la tête avec un bel ensemble. Je ne suis pas fâché d'être débarrassé d'Olivia, elle était nulle. Je me demande si cette nouvelle stagiaire sera plus efficace. Et si ce n'est pas le cas, Andrea va m'entendre.
- Où est ton autre blonde ? chuchote Anastasi.
.- Olivia ?
- Oui.
- Elle a fini son stage. Janelyn la replace.
- Elle aussi est blonde, persifle Ana. Manifestement, tu n'aimes que les bondes dans ton harem. Je m'arrête au milieu du couloir pour froncer les sourcils.

Livre 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant