Paparazzis

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Christian
Quels fumiers, ces journalistes ! Depuis ce putain d'article, ils sont comme des vautours à la curée. L'un d'eux s'en est encore pris à Ana hier. Heureusement que Sawyer était là ! Ana déteste affronter une meute de micros et de caméras. Chaque fois qu'elle se trouve acculée, elle est terrorisée.
Exaspéré par l'idée de ne pouvoir protéger ma femme, je passe les mains dans les cheveux. J'arpente mon bureau de long en large quelques minutes, avant de repérer le responsable de ma sécurité planté devant ma porte. En général, Taylor est impassible, mais aujourd'hui, il me semble plutôt nerveux.
- Taylor !
- Oui monsieur ?
Il tient quelque chose à la main. Pourquoi ne me le donne-t-il pas ?
- C'est quoi ? Une autre mauvaise nouvelle ?
- Non... non...
- Alors quoi ? Une lettre ? Un message ?
Mais enfin, qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi ne répond-il pas ? Je déteste attendre, Taylor le sait mieux que personne. Je tends la main. À contrecœur, il dépose dans ma paume une enveloppe en vélin épais où s'étale mon nom et celui d'Anastasia... L'écriture est féminine et élégante.
Perplexe, je l'ouvre en me demandant comment Taylor a pu mettre la main dessus avant moi. À peine ai-je lu que je reste bouche bée. Il s'agit d'une invitation pour le mariage de Gail Jones et Jason Taylor. Je lève les yeux sur l'homme qui me fait face, il me semble qu'il a les pommettes empourprées. Moi, par contre, je me détends.
- Nous sommes invités à votre mariage ?
Je suis surpris, je l'avoue. Ma voix est un peu rauque. Ana ne cesse de m'affirmer que mes employés m'apprécient, mais je n'y ai jamais cru. D'ailleurs, qui se soucie de ce que pense son personnel ?
Toi, Grey...
Je secoue la tête en me raclant la gorge. Ce mariage est une excellente nouvelle au milieu du merdier que j'ai à gérer ces jours-ci : Taïwan, Dick Lincoln, un rachat de société qui ne se passe pas aussi bien que prévu... bref, la routine. Et puis il y a la presse. Je vais mettre un autre agent aux basques d'Ana. Ryan par exemple...
Grey, elle ne va pas aimer !
- Taylor, merci beaucoup. Vous remercierez aussi Mrs Jones. Mais je suis votre employeur et... hum, je suis conscient de ne pas toujours être facile à vivre. Je présume qu'il s'agit d'un geste de pure courtoisie, mais je suis certain que vous préférerez être libérés de moi ce jour-là. Le moment le plus important de votre vie doit être sans nuage.
Taylor me regarde un peu fixement. Puis lui aussi s'éclaircit la voix.
- Monsieur, ça nous ferait vraiment plaisir que Mrs Grey et vous assistiez à notre mariage. Je comprends ce que vous voulez dire au niveau des obligations, je vous assure que je préférerais ne pas devoir inviter la sœur de Gail...
Il paraît gêné de s'être autant livré.
- Le problème, reprend-il, c'est que ni Gail ni moi n'avons beaucoup de famille. Pour moi, il n'y a que Sophie. Mon travail occupe 90 % de mon temps. Je passe donc l'essentiel de ma vie avec Ana... heu, Mrs Grey et vous. Et Mr Welch, bien entendu. Comme vous le savez, c'est mon ancien commandant en chef. Il y a aussi Luke Sawyer...
Taylor esquisse un sourire. De sa part, c'est tellement rare que je le regarde, un peu éberlué. Merde ! Il vient bel et bien de déclarer que je fais partie de sa famille ? C'est étrange. C'est aussi un peu émouvant. Mais il a raison. Impossible de vivre en permanence avec des gens sans s'y attacher, sinon il faut les considérer comme des meubles. Et ce serait plutôt triste.
Grey, tu t'entends ? Tu parais presque normal !
Ana sera heureuse, d'abord parce qu'elle aime bien le couple, ensuite parce que ça lui permettra de penser à autre chose qu'aux paparazzis. Bon Dieu ! Les noces sont dans l'air - même Kate et Elliot ne devraient pas tarder à se marier. Évoquer ma future belle-sœur est pour moi comme une douche froide.
- Taylor, Mrs Grey vous a toujours considéré comme un...
Je m'interromps en fronçant les sourcils. Anastasia prétend voir Taylor comme un « oncle », mais j'ai toujours été sceptique. Il n'est pas assez vieux pour ça. En fait, il m'est souvent arrivé d'être jaloux de la complicité que je devinais entre ma femme et le responsable de ma sécurité.
-... comme un membre de la famille. Et Mrs Jones également. Je suis très heureux que vous ayez accepté de nous suivre dans notre nouvelle maison. Je suis certain que Mrs Jones aimera aménager à sa guise son futur appartement. Vous savez, un mariage, c'est essentiellement l'affaire d'une femme. Nous, les hommes, nous nous contentons d'arriver en costume le jour J et de signer au bas du contrat.
- Oui, marmonne Taylor, c'est ce que j'ai entendu dire.
- Ainsi, c'est pour le 12 novembre ?
- Oui monsieur.
- Mes félicitations. Andrea a déjà reçu mes instructions pour un virement... Taylor sursaute et me coupe la parole, ce qui lui arrive rarement.
- Monsieur, vous n'êtes pas obligé...
Je l'interromps. Moi aussi, je peux jouer à ce jeu-là.
- Taylor, j'y tiens. C'est le moins que je puisse faire.
Je ne changerai pas d'avis. Taylor le sait à mon ton de voix. Il acquiesce en marmonnant des remerciements. Nous nous serrons la main, sans ajouter un mot. Tant mieux. À mon avis, tout est dit.
Mais avant que Taylor quitte mon bureau, j'ai une autre question à lui poser :
- Les paparazzis ont-ils quitté l'Escala et SIP ?
- Non monsieur. Ils campent devant les deux entrées. Ils exigent de savoir si oui ou non la nouvelle d'une prochaine naissance est confirmée.
- C'est bien ce que je craignais.

Livre 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant