Vie Quotidienne Avril 2018 À Bellevue

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Ana


La scène en face de moi pourrait être une publicité télévisée pour piscine. Ava et Phoebe sont dans


le petit bassin, à jouer je ne sais quel jeu adorable qui passionne les fillettes de cinq ans ; Elliot, Ethan


et Teddy Joe font un water-polo ; Kate, maman et moi sommes installées dans des chaises longues, à


surveiller les enfants.


Kate pousse un long soupir de chatte satisfaite.


- J'aime que nos deux filles soient d'âge aussi proche, Steele. D'une certaine façon, ça maintient


la connexion qui existait entre nous.


- Parce que tu trouves qu'être mariées à deux frères ne suffisait pas ?


Elle hausse les épaules.


- Tu sais bien ce que je veux dire.


Elle sirote son verre avec un sourire à la Mona Lisa. Maman intervient :


- Ne croyez-vous pas qu'Elliot aimerait avoir un garçon, Kate ? Voyez comme il s'occupe bien


de Teddy.


Oh, maman ! Toujours le don de mettre les pieds dans le plat et de parler sans réfléchir. J'interviens


très vite avant que Kate n'ait le temps de répondre :


- C'est normal, Elliot est le parrain de Teddy, il a toujours été très proche de lui. Maman, ces


histoires de préférence en fonction du sexe des enfants sont horriblement démodées. Elliot adore sa fille,


tout le monde le sait.


Je me tourne vers Kate avec un sourire malicieux :


- D'ailleurs, si tu veux, je te vends mon fils. Parfois, il est épuisant. Aussi exigeant et impatient


que son père !


- Non ! Il me rappellerait bien trop son père ! crie Kate.


Elle a oublié sa bouffée de colère, elle éclate de rire et se détend dans sa chaise longue.


- Carla ? Demande-t-elle avec une amabilité un peu trop sirupeuse. Comment va Bob ? Il dort


toujours ?


Ma mère fait la grimace.


- Oui. Il se repose... il a encore des problèmes d'arthrose. C'est normal... à son âge.


Oh lala, le sujet est délicat. Bob est plus âgé qu'elle d'une bonne quinzaine d'années. Et comme il


fait dix ans de plus que son âge, maman dix ans de moins, la différence entre eux est parfois sidérante.


Je lève les yeux au ciel, en espérant un miracle qui nous éviterait les lamentations de ma mère sur les


ravages du temps. Qu'est-ce qui a pris à Kate de soulever le sujet ?


- Maman, regarde ! hurle mon fils.
Je m'exécute, avec une joie béate et une patience toute maternelle. Ethan tient mon fils sur ses


épaules, tous les deux sont occupés à noyer Elliot dans des hurlements et des éclaboussures. Seigneur !


J'aurais préféré un miracle moins bruyant. Il faudra un jour qu'on m'explique pourquoi les hommes


restent toujours de grands enfants.


- C'est très bien, mon chéri.


Kate s'est déjà redressée. Elle brandit un appareil photo.


- Voilà un spectacle que je compte bien immortaliser ! crie-t-elle en riant.


Elliot ressort en crachant de l'eau


- Princesse ? Se plaint-il. Tu crois vraiment que c'est indispensable ?


Je vis avec Christian depuis plusieurs années, aussi j'ai appris quelques manœuvres machiavéliques.


J'adresse à ma belle-sœur (et meilleure amie) mon sourire le plus innocent en disant :


- Quelle bonne idée ! Christian sera vraiment heureux d'avoir une photo pour commémorer le


jour où son frère aîné a été vaincu par son fils de six ans...


Kate s'interrompt, le doigt sur l'obturateur de son appareil photo. Elle baisse lentement son objectif,


et se tourne vers moi, les yeux incendiaires. Elliot s'est déjà redressé. Le scoop est raté.


Au même moment, Carrick et Grace nous rejoignent sur la terrasse. Ma belle-mère s'adresse à son


mari :


- Cary ! Quelle bonne idée tu as eu de faire installer cette piscine. Tu vois, les enfants l'apprécient


autant que nos petits-enfants.


Je lève les yeux au ciel. Est-elle consciente que Christian, en apprenant sa décision, a failli en faire


une crise cardiaque ? Après m'avoir ressorti toutes les statistiques des dernières décennies concernant


les noyades domestiques, il a exigé tous les éléments de protection : clôture, couverture, radar aquatique,


et je ne sais quoi encore. Malheureusement, Teddy était déjà conquis. Et Christian a dû également faire


creuser une piscine à la maison.


Carrick s'approche de nos chaises longues avec un sourire.


- Comment vont mes belles-filles préférées ?


Il m'embrasse sur la tête, puis serre Kate contre lui en lui chuchotant quelques mots à l'oreille. Elle


se met à rire. Ces deux-là s'entendent vraiment très bien. Bien sûr, la froideur initiale que me manifestait


Carrick lorsque je suis arrivée dans la famille a disparu depuis longtemps, je crois qu'il ne me prend


plus pour une croqueuse de diamants, mais il se sent plus proche de Kate. Il aime discuter avec elle sur


de nombreux sujets, événements politiques ou méandres de la presse. Carrick est avocat spécialisé dans


les médias, Kate est une journaliste de renom, chacun d'eux a une vision dépendante de leurs champs


professionnels, mais ils se respectent mutuellement et leurs échanges, toujours animés, sont affectueux.


À mon avis, Carrick considère mon métier et l'édition en général, comme un agréable passe-temps, rien


de bien sérieux.


Grace parle avec ma mère. Par politesse, j'en suis certaine. Ces deux femmes n'ont jamais rien en


commun, à part des enfants mariés...

Livre 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant