Week-end suite 5

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Rouen, rue Eau de Robec, 17 h 38.


La jeune femme reposa le combiné téléphonique et resta un long moment immobile, les yeux dans le vague, affichant une rigidité identique à celle d'une statue de marbre plantée au beau milieu d'un jardin municipal. Une silhouette minuscule traversa soudain la pièce avant de disparaître au détour du couloir.

- Stop, la miss ! cria Marie, sortant enfin de sa torpeur. Reviens immédiatement ! Je te signale que tu n'as toujours pas rangé le salon! Il est hors de question de laisser l'appartement dans cet état avant de partir en week-end...

La réponse de la fillette lui parvint de la chambre où elle s'était réfugiée.

- J'ai oublié, maman...

- J'avais remarqué, grogna Marie en poussant une poupée du pied. Tes jouets traînent partout, nom d'une pipe : sur le tapis, sur le canapé... Viens me débarrasser de tout ce bazar où je te promets que la poubelle sera particulièrement remplie, ce soir !

Un bruit de cavalcade précéda l'entrée fracassante de la petite fille dans le salon tandis que la porte du vestibule claquait.

- C'est toi, Seb ?

- Ouais, m' an...

- C'est pas trop tôt ! Où étais-tu ?

L'adolescent rangea son blouson dans la penderie avant de répondre.

- On a été boire un coca, Mathieu et moi...

- Quoi ? Non, mais c'est une blague ! s'écria Marie, furieuse.

- J'ai pas fait attention à l'heure...

- J'ai essayé de te joindre sur ton mobile mais tu ne réponds pas. Tu ne crois pas que tu exagères ?

- Mais papa n'est même pas encore arrivé ! Où est le problème ?

- Le problème c'est que tu avais promis de rentrer de bonne heure pour faire tes devoirs avant le départ pour Giverny. De plus, ton père aurait pu être déjà là, c'est tout.

- La prof d'anglais était absente, alors j'en ai profité pour m'avancer et faire mes exercices de français et de SVT en perm'...

- Ce n'est pas une raison, répliqua Marie. Tu avais promis, c'est tout !

La jeune femme se pencha pour aider sa fille à regrouper les jouets.

- M'an...

- Oui ?

- Faut vraiment qu' je vienne avec vous ?

Marie se redressa, s'apprêtant à affronter son fils qui visiblement ayant d'autres projets pour ce week-end allait tenter de se défiler. Elle savait que sa présence était indispensable, qu'il fallait absolument qu'il les accompagne puisque plus rien ne serait comme avant à partir de lundi prochain. Elle sentit sa gorge se serrer car Sébastien n'avait pas du tout conscience des changements radicaux que sa vie d'adolescent allait bientôt connaître. Pour l'instant, Marie ne pouvait rien lui dire. Elle devait se montrer suffisamment persuasive ou - au pire - autoritaire pour le faire capituler. Faute de temps, elle opta immédiatement pour l'autoritarisme.

- Tu ne vas pas commencer à me taper sur les nerfs, Seb, s'il te plait ! Nous avons décidé de...

- TU as décidé, nuance !

- Très bien, J'AI décidé que nous irions passer le week-end à la campagne... ce week-end précisément. Tu le sais depuis quinze jours, donc nous passerons ce week-end comme prévu tous les quatre ensemble. Tu n'as pas le choix, c'est comme ça !

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