Week-end suite 52

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Vendredi 24 Octobre, Bois du Gros Chêne près de Giverny, 15h20.


En sortant de Beauvais, ils avaient pris la direction de la ville d'Allonne pour accéder à l'embranchement de l'autoroute et gagner Paris où ils comptaient bien faire la fête. Mais, alors qu'ils s'engageaient dans un rond-point, ils avaient aperçu trois flics, à proximité de la sortie qui indiquait justement la direction de Paris. Deux automobiles étaient rangées sur le bas-côté et leurs conducteurs subissaient un alcootest . Kévin avait réagi instinctivement et bifurqué sur la droite pour prendre la direction de la ville de Gisors tandis que Christophe resserrait son étreinte autour du cou de l'otage pour empêcher toute velléité de rébellion de la part de celui-ci. Le lycéen avait lancé un regard désespéré vers les gendarmes qui n'avaient même pas jeté un œil sur le véhicule. Finalement, après avoir regagné la D 181, les trois garçons avaient décidé de poursuivre leur trajet jusqu'à Vernon. Le GPS intégré précisait en effet qu'ils pourraient emprunter une bretelle d'autoroute pour Paris, à quelques kilomètres de Vernon. Ils ne s'inquiétaient pas pour le ou les péages qu'ils auraient à franchir puisqu'ils avaient récupéré un peu d'argent dans le train et maintenant encore : les cinquante euros que la mère de Jérémy Morin lui avait donnés pour les courses avaient été immédiatement dérobés par les trois délinquants. C'était d'ailleurs le lycéen lui-même qui avait offert cet argent en supposant sans doute, mais à tort, que ses agresseurs le relâcheraient quelque part dans une rue de Beauvais.

Au cours du voyage, ils avaient bien essayé d'échanger deux ou trois mots avec lui mais, à partir du moment où Jérémy avait compris - non sans une certaine angoisse - qu'il lui faudrait les supporter plus longtemps que prévu; qu'ils n'avaient nullement l'intention de le libérer, le jeune homme s'était recroquevillé sur son siège et enfermé avec obstination dans le silence comme pour se faire oublier. Les rares fois où il avait ouvert la bouche, il s'était contenté de répondre par monosyllabes aux questions que lui posaient les trois garçons. Finalement, ces derniers avaient fini par ne plus lui adresser la parole.

Quelques kilomètres après être sortie du village de Tilly, la 308 commença à faire un drôle de bruit et Kévin constata que le volant frissonnait davantage, excitant les nerfs de ses doigts.

- Merde, c'est pas de chance... Je crois qu'on a crevé !

Il fallait changer la roue avant d'arriver à Vernon et de préférence à l'abri des regards. Ils empruntèrent donc une petite route de campagne et roulèrent à vitesse réduite jusqu'à un bois avant de garer la 308 en bordure d'une mare, ceinturée de joncs.

Pendant que Christophe surveillait le lycéen dans la voiture, Johann et Kévin s'attelèrent à la réparation mais s'ils avaient bien trouvé le cric et la roue de secours, ils furent incapables de desserrer les écrous à l'aide de la clé en croix. Même les bras musclés de Kévin se montrèrent inefficaces. Les roues de la 308 avaient très certainement été montées et serrées non pas manuellement mais à l'aide d'un compresseur pneumatique qui avait dû actionner lui-même une clé à cliquet. L'avantage du compresseur, c'était qu'il permettait d'éviter au garagiste de faire des efforts inutiles. Mais l'inconvénient pour l'automobiliste, c'était que le serrage excessif des écrous empêchait n'importe quel quidam de changer lui-même sa roue en cas de crevaison ; ce qui était le cas aujourd'hui.

- Putain, c'est la poisse, murmura Kévin après s'être acharné une dernière fois sur la clé en croix... Il faudrait qu'on se rende dans un garage si on veut faire réparer la roue et ce n'est pas envisageable...

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