DEUXIEME PARTIE
SURVIVRE AU MINOTAURE
Il reprit connaissance, totalement hébété, le nez écrasé dans un tapis de feuilles mortes. Une araignée chatouillait sa joue et il étouffa un cri de douleur quand il voulut se débarrasser de l'insecte d'un geste instinctif. En palpant doucement les contours de son visage, il comprit qu'une large plaie zébrait son front et descendait le long de sa joue gauche. Il prit conscience seulement à ce moment-là que ses blessures étaient multiples, c'est-à-dire externes et internes. Paradoxalement, cette prise de conscience le revigora et il décida d'ignorer les milliers d'aiguilles qui semblaient s'enfoncer chaque seconde un peu plus dans tous les organes de son corps, pour se trainer jusqu'au sommet du talus. Millimètre après millimètre, il progressa, à son rythme, avec précaution, pour éviter d'accroître la douleur qui dévorait ses entrailles.
Tout à coup, alors qu'il venait de se laisser glisser sur les fesses de l'autre côté du talus, il entendit un souffle rauque quelque part en provenance de sa droite. Une personne ou un animal respirait profondément. Il écarta les broussailles, aperçut le taureau sur le sentier et, en retrait, la maison des Derruau. Que faire ? C'était un miracle qu'il n'ait pas encore attiré l'attention de l'animal. Il ne pouvait pas rester ici, à attendre que le taureau s'éloigne. Il perdait du sang, beaucoup de sang, et pouvait s'évanouir de nouveau, à tout moment.
Après quelques minutes de réflexion, il décida d'essayer de contourner l'animal. En rampant à travers les ronces et les fougères, le long du chemin, il pouvait espérer passer inaperçu afin de rejoindre l'intérieur de la petite maison, par la façade arrière.
Il commença à frissonner puis à grelotter. Il dut serrer fermement les mâchoires pour empêcher ses dents de se heurter les unes aux autres. La fièvre commençait à l'envahir. Il n'avait plus une minute à perdre...
Aux alentours de quinze heures , une chaleur accablante s'abattit sur les collines et la forêt. Comme surpris par ces températures estivales, une colonie de bouvreuils dont les sifflements mélancoliques emplissaient le jardin, partit se réfugier sous les arbres qui ceinturaient la propriété. Le ciel arborait une couleur d'acier gris. Les écarts de températures n'étaient pas rares à cette époque de l'année et Nicolas se rappela les prévisions météorologiques entendues la veille au soir. Ce week-end de cauchemar aurait des teintes d'été caniculaire. Voilà comment il resterait gravé dans les souvenirs de la famille Derruau.
Le taureau trottina jusqu'à la lisière de la forêt pour se mettre à l'ombre. Il resta ainsi, immobile, les yeux mi-clos comme s'il sommeillait, engourdi par la lourde atmosphère. De temps en temps, Nicolas le voyait remuer la tête et regarder en direction de La Forestière. A tour de rôle, les trois adultes et l'adolescent se relayaient devant la fenêtre pour surveiller l'animal. Nicolas n'avait pas pris une minute de repos depuis qu'il avait délivré ses proches. Il était épuisé d'autant plus qu'une migraine le harcelait depuis une bonne heure.
- Ca va ? Tu es tout pâle !
Il se retourna. Marie venait d'entrer dans la pièce. On entendait vaguement les bribes d'une conversation qui se déroulait dans la cuisine entre Kate et les enfants. Il grimaça avant d'expliquer qu'il se sentait beaucoup mieux depuis que les garçons étaient partis.
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WEEK-END
Mystery / ThrillerA l'occasion d'un week-end dans leur maison secondaire de Giverny, Nicolas Derruau, son épouse Marie et leurs deux enfants sont victimes d'une agression menée par trois jeunes délinquants, fraîchement échappés d'un centre du nord de la France. Un vé...