L'amant de Livai Ackerman

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Saisissant le livre de Francis Tate posé sur son bureau, il en caressa les contours déformés. Cela faisait tant d'années qu'il le trimballait dans sa poche pour le lire en voyage ou sur les tournages, durant les pauses. Il l'avait acheté d'occasion, au hasard, dans une librairie de Bloomsbury, lors de son premier séjour en Angleterre, à l'age de 19 ans, alors qu'il occupait à Londres un modeste emploi de coursier.
En lisant le mot (Cyprès) sur la couverture, il avait eu l'impression de respirer le parfum de son pays.
Il feuilleta les pages jaunies, survolant le texte familier, la tête pleine d'images qui, en 20 ans, n'avaient rien perdu de leur fraîcheur. Ce film, il fallait le faire, il en avait trop envie.
Même s'il devait lui coûter plus qu'il ne lui rapporterait.
La vision du garçon de la Rose et la Couronne traversant le champ de blé, bras nus, avec ses cheveux châtains, s'imposa brusquement à son esprit, cette image..., ce Eren..., brillait en lui comme un phare, comme l'essence même du film qu'il voulait réaliser. Quelque chose de subtil, de tranquille et d'honnête dont il avait terriblement envie.
Une feuille de papier glissa du livre sur le sol; la lettre de l'éditeur de Tate.

(Nous vous remercions infiniment de l'intérêt que vous nous portez, mais la position de M. Dietrich concernant la cession des droits pour tirer un film du roman Le Chêne et le Cyprès reste la même. Naturellement, au cas où M. Dietrich reviendrait sur sa décision, nous vous en aviserions sur le champ.)

Il reposa le livre sur la table basse et regagna la fenêtre ouverte. La faible brise qui s'était levée soulevait les papiers sur son bureau et faisait tourner sur leur axe les planètes du cercle armillaire qui y était fixé. Un changement se préparait, il le sentait obscurément. Et il espérait que ce M. Dietrich, où qu'il se trouve,  le sentait aussi.

(Bon pour vous dire que le nom c'est Eren et il porte le nom de son beau père)