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(L) alors, vous ne regrettez pas d'avoir accepté de venir ?

(E) l'épreuve ne me semble pas insurmontable, répondit-il en acceptant la flûte qu'il lui tendait.

(L) pour le moment, ça va. Mais quand il vous faudra affronter les journalistes, vous changerez peut être d'avis, dit-il, l'air désolé.

Il vit le sourire se figer sur les lèvres du jeune homme.

(E) a ce point là ?

(L) je ferai en sorte de vous préserver au maximum, promit-il, les doigts crispés sur son verre, en se demandant une fois de plus si l'égoïsme ne lui faisait pas commettre une erreur.

Il le regarda se tourner vers le hublot au moment où l'avion commençait à rouler sur la piste. Le soleil illuminait son visage et mettait des reflets dorés dans sa chevelure châtain. Après un mois à Castellaccio, son teint bronzé était encore plus devenu doré. Et même si la nervosité et la timidité qu'il avait remarqués dès le premier soir, à La Rose et la Couronne, n'avaient pas disparu, il émanait désormais de lui une aura de calme et de sensualité épanoui.
Ou plutôt, c'était ainsi qu'il le percevait, corrigea-t-il en vidant son verre. Par une sorte d'ironie, c'était exactement ce qu'il avait espéré en lui demandant de rester au palazzo.
Dissiper l'ombre qui voilait son regard et l'anxiété qui crispait ses sourcils. Lui faire prendre conscience de son originalité et de son pouvoir de séduction. Pour le convaincre de rester, toutefois, il lui avait également promis qu'il garderait ses distances et, s'il avait su alors combien ce serait difficile, peut être aurait-il tout simplement renoncé.
L'avion volait et les nuages défilaient dans le ciel d'azur, légers comme le voile de mariée d'Erena. Tout en les observant par le hublot, Eren sentait peser sur lui le regard de Livai et se demandait une fois de plus s'il ne regrettait pas sa décision. Comment le blâmer ? Il devait bien être le seul homme à monter dans un jet privé vêtu d'un vieux t-shirt délavé. Quant au fameux costume vert qu'il porterait ce soir, il lui semblait beaucoup plus problématique encore et indigne du tapis rouge. Craignant de faire honte à Livai, il avait failli lui avouer qu'il n'avait rien à se mettre, mais avait craint qu'il lui propose alors de lui en offrir un, ce qui lui avait paru plus gênant encore...





Eren avait trouvé l'avion très impressionnant, mais que dire de l'hôtel ? Tout en le prenant par la main pour l'aider à descendre du vaporetto, Livai avait murmuré :

-la plupart des invités du festival descendent au Lido, mais je préfère rester à l'écart de tout ce cirque. Cet endroit est plus discret.

La réception était sombre et fraîche, même si ( discret ) n'était pas exactement le terme qu'aurait employé Eren pour décrire les lieux. Tous ces tableaux aux cadres dorés, ces chandeliers aux formes baroques et ces meubles patinés lui donnaient l'impression d'avoir quitté le 20 et unième siècle pour pénétrer dans le passé par un passage secret.

(L) vous venez ? s'enquit-il en s'éloignant du comptoir où il avait échangé quelques mots avec le concierge.

Il se hâta de le suivre, gêné du claquement de ses chaussures sur le sol de marbre.

(E) a quelle heure la projection doit-elle avoir lieu ? demanda-t-il tandis que les portes de l'ascenseur se refermaient sur eux, les emprisonnant dans une pénombre trop intime.

(L) a 19 heures.

(E) mais il n'est que midi, dit-il en consultant sa montre. Ça nous laisse des heures pour visiter la ville.

L'amant de Livai Ackerman Où les histoires vivent. Découvrez maintenant