Je m'accordai quelques minutes supplémentaires dans la cuisine pour me calmer, mais ses derniers mots passaient en boucle dans ma tête. Pourquoi je ne lui avais pas téléphoné ? Pourquoi j'avais précipité mon départ ? Pourquoi je n'avais pas été clair en disant que c'était de la France que je parlais, et non d'elle ? On n'en serait pas là. On aurait un bébé. Cristina entra et fronça les sourcils.
- Amelia s'en va.
Je jetai un coup d'œil derrière elle, et en effet, je vis Amelia faire un câlin à Alex, son sac sous le bras et son manteau remonté jusqu'au cou.
- Ça s'est mal passé ? me demande Cristina.
- Elle était enceinte. Elle a avorté.
- Mais elle n'a pas fait de fausse couche ?
- Que pour un seul bébé, on en avait deux apparemment.
- Oh... c'est peut-être mieux comme ça ?
Ne voulant pas l'inquiéter ou la faire douter de moi, j'acquiesçai.
- Mais elle ne prenait pas la pilule ?
- Si. Visiblement, il y a eu une merde.
- Voilà pourquoi il faut continuer les capotes.
Perdu dans mes souvenirs, je pensai à haute voix.
- Oui mais avec Amelia, une boite ça nous tenait même pas la semaine, et il n'y a pas de petites économies.
Me rendant compte que j'avais parlé, je regardai Cristina et pinçai les lèvres.
- Excuse-moi, c'est sorti tout seul.
Elle me sourit timidement et lorsque Amelia quitta la salle, au lieu de me sentir plus léger, au contraire, j'eus l'impression d'avoir tout le poids de ma tristesse qui s'abattait sur moi.
- Allez viens, il reste un peu de gâteau, me dit-elle.
(...) Il était minuit passé quand on décida de partir. Je profitai du fait que Cristina parle avec un de mes cousins pour foncer à la cuisine voir Jo qui jetait les assiettes en carton.
- Jo je t'en prie, dis-moi où elle dort
- Non O...
- Je t'en supplie !
- Pourquoi faire ? Vous avez parlé...
- Pas assez. J'ai encore plein de choses à éclaircir avec elle, j'ai besoin de la voir.
Elle s'arrêta et croisa les bras.
- Envoie-lui un message
- Tu sais très bien qu'elle ne me répondra pas ! Pitié... Je... Elle me manque déjà. Rien que de savoir qu'elle repart après-demain...
- Vous n'êtes plus ensemble, chuchote-t-elle, tu as quelqu'un maintenant...
- Je sais...
Je pris ma tête entre mes mains, ne sachant plus quoi faire.
- Promets-moi que si elle ne veut pas t'ouvrir, tu pars, tu ne lui fais pas de scène et surtout, tu ne lui fais aucun mal. Elle est partie tôt en misant sur l'excuse du décalage horaire, mais je sais parfaitement que c'est parce qu'elle ne supportait plus d'être dans la même pièce que toi.