#14

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Le reste de la semaine était passé comme un battement de cil. Ces quelques jours de vacances nous avait tous considérablement rapprochés, notamment Ken et moi. Plus j'apprenais à le connaitre, et plus j'avais envie de passer du temps à ses côtés. Cela devait sans doute être réciproque, car il ne me lâchait que difficilement du regard.

Pour notre dernière soirée, nous décidâmes de sortir dans une boite de nuit de Barcelone. Nous dansâmes tous ensemble en profitant de nos dernières heures dans la belle ville. Aux alentours de cinq heures du matin, nous rentrâmes dans notre villa. Fortement alcoolisés, nous finîmes notre soirée dans la piscine en riant et chahutant.

Pendant que je fumais une cigarette sur le rebord, les pieds dans l'eau, Ken s'approcha de moi.

- Viens te baigner Aly, me demanda-t-il.

- Je termine ma cigarette, j'arrive, souris-je.

Il me laissa, puis partit rejoindre les autres qui s'affrontaient sur des matelas gonflables. Cinq minutes plus tard, je me levai pour aller écraser ma cigarette dans le cendrier, puis plongeai la tête la première. Une fois à la surface, je sentis une main m'attraper par la taille. Ken me faisait face, comme à son habitude, il me détailla de ses yeux sombres.

- Qu'est-ce qu'il y a ? souris-je.

- Arrête de me demander ça à chaque fois que je te regarde, rit-il.

- Alors cesse de me regarder de cette manière, répondis-je.

- Et je te regarde comment ?

- Comme si tu m'examinais à la loupe.

Il rit, puis reconcentra son regard sur moi, son sourire ne l'avait pas quitté.

- Tu sais que t'es plutôt belle comme fille ? demanda-t-il.

- C'est à mon tour de te demander combien de verres tu as bu, ris-je.

Il leva les yeux au ciel, puis me prit la main pour m'emmener à l'extérieur de la piscine. Il enveloppa mon corps dans une grande serviette, puis m'intima de le suivre. Nous nous assîmes dans l'herbe du jardin à l'écart du groupe. Je le vis lever ses yeux vers le ciel qui était couvert de millions d'étoiles. Nous nous délectâmes de ce spectacle muet. Aucun mot ne fut prononcé, car nous ne nous sentions pas obligés de le faire.

Le vent froid caressa mon corps à travers la serviette ce qui me frissonner. Je sentis les bras de Ken m'attirer pour que je pose ma tête sur son épaule. Il caressa mon dos pour me réchauffer.

- C'est magnifique, dis-je en continuant d'observer le ciel.

- C'est vrai, mais c'est dommage que nous ne puissions pas voir la voie lactée, répondit-il. En Grèce, dans le village des mes grands-parents, on peut l'apercevoir presque tous les soirs quand il n'y a pas trop de nuages.

- Ca doit être un endroit superbe.

- Je t'emmènerai un jour si tu veux, proposa-t-il. J'y vais régulièrement pour me vider l'esprit, de temps en temps, les mecs m'accompagnent, tu n'auras qu'à te joindre à nous.

- Pourquoi pas, souris-je. Tu n'arrives pas à te vider la tête à Paris ?

- Pas vraiment, admit-il. Comme je te le disais la dernière fois, les gens ne voient en moi que Nekfeu. D'ailleurs, tu es la première fille depuis bien longtemps qui ne sait pas grand-chose sur moi.

- Comment ça ? m'étonnai-je. Je te connais un peu maintenant quand même.

- Oui, tu connais Ken, sourit-il, mais la plupart des nanas que je rencontre connaissent déjà tout mon parcours, des tas de choses personnelles sur moi qu'elles ont découvert lorsque je me livre dans certains morceaux. Avec toi c'est différent, tu me découvres d'une autre manière, à travers ce que je te dis, ce que je fais, et non pas à travers des couplets de ma musique.

- Nekfeu ne m'intéresse pas, avouai-je. Je préfère apprendre à connaitre Ken Samaras.

Je reposai ma tête sur son épaule, nous replongeant dans notre bulle lorsque les garçons nous annoncèrent qu'ils partaient se coucher. Je restai près de Ken en observant le soleil se lever à l'horizon. Mes yeux luttaient pour ne pas se fermer, je tombais de sommeil, mais je ne parvenais pas à me défaire de son étreinte.

- Aly tu t'endors, murmura Ken.

- Hm, grognai-je.

Il se détacha doucement de moi, et m'accompagna jusque dans ma chambre.

- Bonne nuit Aly, me dit Ken en déposant un baiser sur ma joue.

- Ou bonne matinée, souris-je en voyant la lumière du jour s'infiltrer de plus en plus dans la maison.

Il me lança un dernier sourire avant de me laisser dormir.

A peine quatre petites heures plus tard, je sentis des mains me secouer pour me réveiller. Je grognai en m'enfouissant encore plus sous la couette.

- Aly, me dit doucement Sami, il est dix-heures, notre avion part dans trois heures. Lève-toi.

- Encore cinq minutes, le suppliai-je.

- Je te connais, les cinq minutes vont durer une heure.

Il m'attrapa les poignets, et tira dessus pour me forcer à m'asseoir dans mon lit.

- T'es chiant Sami, bougonnai-je.

- Tu te rendormiras dans l'avion, dit-il en me jetant un oreiller.

Il quitta la chambre, puis je me forçai à me lever. Je pris une douche d'une quinzaine de minutes pour me réveiller. Dans le miroir, je constatai que mon visage avait l'air fatigué, mes traits étaient tirés, et des cernes ornaient le dessous de mes yeux. Je me maquillai pour camoufler les dégâts, mais insatisfaite du résultat, j'optai pour mettre mes lunettes de soleil.

Nous rangeâmes la maison tant bien que mal, et laissâmes de l'argent pour le ménage. Nous n'avions pas envie de le faire, et surtout, notre avion risquait de s'envoler sans nous. Nous partîmes en direction de l'aéroport, puis rendîmes les voitures de location.

A peine, le décollage entamé, je déposai mon manteau sur les cuisses de Naïm en guise d'oreiller, puis ma tête s'y installa. Je sentis mes jambes se soulever pour se retrouver sur celles de Sami. Désormais confortablement allongée, je remerciai mon ami d'un regard, puis sombrai dans un profond sommeil.

De retour en France, nous prîmes le RER C. Mago, Naïm, Houss et Sami nous quittèrent à Orly-ville, tandis que je continuais avec les autres garçons. Arrivés à la station Choisy-le-Roi, des filles vinrent à notre rencontre, enfin plutôt à celle de Ken.

- On peut prendre une photo avec toi ? demande l'une d'elle.

- Bien sûr, répondit-il chaleureusement.

Leur attitude m'énerva malgré moi. Il ne pouvait jamais être tranquille. Je mis cet agacement sur le compte de la fatigue, et cédai ma place aux cotés de Ken à une des filles qui sautillait sur place. Je partis m'asseoir quelques fauteuils plus loin en posant ma tête sur le bord de la fenêtre. Je regardais les paysages gris défiler devant mes yeux. Les bâtiments s'étendant à perte de vue. Pendant des années, ce trajet avait été quotidien pour moi, je connaissais toutes les maisons le long de voie ferrée.

2zer s'installa à mes côtés, et posa sa tête sur mon épaule.

- Je suis mort... dit-il en baillant. Ces filles me cassent les oreilles.

- Dors, je te réveillerai quand on sera à Invalides.

Doums nous rejoignit laissant Ken avec les trois filles.

- Qu'est-ce qu'il fait ? lui demandai-je.

- Il discute avec elles, me répondit-il en baillant à son tour.

Il s'affala sur les sièges, posa sa casquette sur son visage, et s'endormit. Je luttai moi aussi contre la fatigue, mais maintenant que le RER était souterrain, mes yeux se fermèrent tous seuls. Bercée par le ronronnement du train, je m'endormis à mon tour.

Il fallut que Ken nous réveille énergiquement pour que nous ne nous rations pas notre station. Nous prîmes le métro, puis nous nous séparâmes. J'embrassai les garçons en leur promettant que l'on se verrait très prochainement.

A l'ombre de ta lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant