Chapitre 85

212 36 36
                                    


Nat pousse une exclamation de joie en trouvant Colin dans leur cuisine.

Après le marché, ils sont rentrés tous les deux chez Ana, puis il est resté ranger les courses et préparer le déjeuner pendant qu'Ana allait chercher sa fille au collège.

C'est une mauvaise idée, ne cesse de se répéter Ana en s'asseyant à table pour goûter les spaghetti carbonara qu'il a cuisiné. Ce simulacre de vie de famille ne mènera à rien. Tu es faible et tu vas le payer, exactement comme pour l'alcool. Tu fais la sourde oreille, tu continues de faire comme si de rien n'était, comme si vous aviez un avenir radieux devant vous, mais tu vas te ramasser la gueule, ma pauvre fille.

Bon, il y a Nat aussi, et en les observant discuter et plaisanter, Ana se dit que ce n'était quand même pas très malin de les laisser devenir si proches.

Tant pis, elle s'en remettra. Elle a un père, et c'est un type formidable. De toute façon, je ne peux pas laisser tomber Colin maintenant. Il a besoin de moi, et vu son sourire, il a aussi besoin de moments comme ça. Et puis, c'est pas comme si une fois dans ma vie j'avais été capable de tenir une bonne résolution.

— Mams ? Tu rêves ? Tu veux un dessert ?

— Hein ? Euh oui, j'ai acheté des fraises. Les premières de France !

Elle se lève précipitamment, sort les fraises du réfrigérateur et en se retournant, voit Colin qui l'observe avec un doux sourire. Ce n'est pas si souvent, mais devant ce sourire, Ana a envie de pleurer.

Ils dégustent les fraises au sucre tous ensemble, puis Nat, conciliante, débarrasse la table tandis qu'Ana et Colin boivent un café. Il propose ensuite à l'ado de l'aide pour ses devoirs. Il ne semble pas être pressé de partir.

— Ah oui, je veux bien ; t'es fort en anglais ? Parce que j'ai une étude de texte à faire, et maman n'est pas trop douée.

— Je te remercie.

— Pardon, Mams, mais c'est vrai.

— Je ne me débrouille pas trop mal, dit Colin, et au pire, je sais à qui on pourra demander de l'aide.

Ana les regarde partir dans la chambre de Nat, et soupire. Elle range les tasses au lave-vaisselle et le met en marche, puis sort sur son balcon. Il donne sur le côté de la rue, c'est plutôt calme et en ce mercredi de printemps, il n'y a pas beaucoup de monde. Ana s'accoude à la balustrade et tente d'écouter le chant des oiseaux, trop souvent couvert par le bruit des voitures. Il y a un parc un peu plus loin, et avec le vent léger qui souffle, Ana entend les cris des enfants. Elle se souvient des après-midi au square avec Natacha, cela lui semble si loin. C'était une autre vie.

— Hey.

Elle se retourne une seconde, le temps d'adresser un petit sourire à Colin, appuyé dans l'encadrement de la baie vitrée.

— Vous avez déjà fini ?

— Je lui ai laissé mon téléphone. Elle est en visio avec mon ami Tom, tu sais, de la librairie. Il est franco-anglais, il va l'aider mieux que moi.

— Sympa ton copain, il aide une jeune qu'il ne connaît même pas.

— C'est une crème.

Il s'avance, et au lieu de prendre place à côté d'elle, contre la rambarde, il reste derrière elle, tout près de son dos. Le cœur d'Ana s'emballe, elle sent son souffle dans son cou. Comme à chaque fois, leur promiscuité la met dans tous ses états.

De ses bras, il enserre les épaules d'Ana, et colle son dos contre son torse. C'est sûr que dans cette position il sent combien son cœur bat fort. Mais après tout, que peut-elle lui cacher ?

Colin Maillard et chat perchéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant