Dix-neuf jours. C'est le temps écoulé depuis la dernière fois que Colin a vu Ana. Hormis les première grandes vacances, alors qu'ils se connaissaient à peine de toute façon, c'est la première fois qu'ils restent séparés si longtemps. Et ça a été vraiment dur. Bien entendu, ils se sont téléphoné quotidiennement, à part le lundi, premier soir après l'opération, où il n'avait pas encore la force de parler. Mais ensuite, chaque jour, en fin de journée, leur petit rituel vespéral, de plus en plus long. Il n'a rien dit de sa petite visite, juste un « au fait, je t'aime aussi », avant de raccrocher, et Ana a compris qu'il avait eu son petit mot.Elle lui racontait l'école, la vie des collègues, les bagarres dans la cour, la réunion menée par Laurence, le dernier conseil d'école, les répétitions de la fête des talents, et puis sa vie à elle, avec Nat. Colin écoutait beaucoup, bavardait peu. La lecture, la télévision le fatiguait, il passait la majeure partie de la journée à dormir, alors, il n'avait pas grand-chose à raconter. Mais aussi, il lui confiait ses inquiétudes face à chaque nouveau symptôme, il lui parlait de ses visiteurs, ses parents, Isa et Hugo, ses amis de toujours, Louise et Tom, les jeunes mariés, sa chère Camille et Sarah, la sœur de Tom. Et des messages dans la journée. Ils sont restés en contact, mais sans se voir, c'est vraiment trop long.
L'interphone sonne dans un bourdonnement très désagréable, et bien trop fort. Mais peu importe, ce soir, cet horrible son, il l'aime, il l'attendait. Il annonce l'arrivée de celle qu'il attend depuis si longtemps, celle qui lui a tant manqué, la seule à qui il pensait quand il se sentait abruti de douleur et de fatigue, lessivé, un vrai légume, une loque humaine.
Ana. Enfin.
Il ne se sentait pas vraiment prêt mais c'est la veille de la fête des talents à laquelle il avait bien l'intention d'assister, et il tenait à la voir avant, seul à seule. Déjà pour lui éviter le choc de son apparence, mais aussi parce qu'après trois semaines sans elle, il devenait fou, et ne rêvait que de la serrer dans ses bras, d'enfouir son nez dans son cou, de respirer son parfum doux, de poser sa bouche sur la sienne.
Il se trouve horrible avec ces cheveux si courts, qui dévoilent sa cicatrice. En contrepartie, il a un peu laissé pousser sa barbe. Non pas qu'il se trouve moins laid avec, mais il se sent de toute façon trop épuisé pour trouver la force de se raser. Il dira que c'est pour faire un genre. Son visage a heureusement dégonflé, les yeux au beurre noir ont disparu, mais il a quand même toujours la tête du type qui s'était fait ouvrir le crâne et tripatouillé le cerveau, et ses joues creusées, à peine camouflée par les poils de barbe, n'arrangent pas ce portrait.
Ana arrive avec le repas, comme deux mois auparavant, pour son anniversaire, un pâle sourire sur ses lèvres, camouflant le mieux possible son anxiété. Quand il ouvre, presque hésitant, honteux de son apparence, elle le dévisage longuement, sans sourciller, et il ne l'aime que plus fort. Elle pose son panier au sol et l'enlace, ses bras autour de sa taille, la tête sur son torse, sans un mot, juste bouleversée de le revoir en vie, debout, bientôt guéri.
— Tu m'as tellement manqué... ça a été si dur, souffle-t-elle enfin.
— Pour moi aussi. Interminable.
Ana lève les yeux vers lui, esquisse un sourire espiègle.
— Tu ne te ressembles pas du tout.
— Je suis affreux.
Mais elle secoue la tête, et la repose contre son cœur.
— Non. Tu es vivant.
Ils restent longtemps étroitement enlacés, incapable de se dessouder, puis il l'entraîne vers le canapé où ils s'installent, de côté, les yeux dans les yeux. Délicatement, Ana caresse la joue de l'homme du bout des doigts et il ferme les paupières devant tant de douceur.
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Colin Maillard et chat perché
Romance"C'est une folie de haïr toutes les roses parce qu'une épine vous a piqué, d'abandonner tous les rêves parce que l'un d'entre eux ne s'est pas réalisé, de renoncer à toutes les tentatives parce qu'on a échoué. C'est une folie de condamner toutes les...