Chapitre 23

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Le grand jour. Ou presque. La pré-rentrée. La première matinée, c'est assez cool. Les horaires sont définis, mais comme tous les directeurs sont en réunion avec l'inspecteur, personne n'est là pour les fliquer. Ana arrive néanmoins assez tôt, en même temps que quelques autres collègues qui découvrent, émerveillés aussi, les couloirs égayés et surtout, la nouvelle salle de pause. Colin a dû passer à l'aube, il a disposé sur les tables deux grosses brioches aux amandes et a préparé du café. Un mot les accueille sur le tableau blanc.

« Bonne pré-rentrée à tous ! RDV à 13h ici pour le compte rendu de la réunion des directeurs, les plannings et les objectifs de cette année.

Bonne matinée et bon courage, à tout à l'heure.

C. »

Ana se sent fébrile. Elle appréhende autant qu'elle attend la réunion de cette après-midi, le moment où il exposera à tous ses désirs de changements de d'innovation, ce qu'il attend d'eux.

En attendant, on se raconte ses vacances, ça papote en buvant thé ou café, picorant des tranches de brioche. Les petits nouveaux arrivent, les deux jeunes, Mariam et Chérif puis Anne-Marie, instit depuis dix-huit ans, mais première rentrée à Jacques Prévert.

Laurence fait les présentations :

— Voici Jean-Luc, le remplaçant rattaché à l'école, puis Jérôme et Emilie, tous les deux au CP, classes du rez-de-chaussée, tout comme Milla et Ana, au CE1, de l'autre côté du couloir. Sandra, la belle rousse ici est au CE2, Bernard et Stéphanie au CM1, et enfin, Patricia et moi au CM2. Allez, répétez maintenant pour voir si vous avez bien retenu.

L'assemblée éclate de rire et c'est Patricia, le bînome indissociable de Laurence qui reprend la parole.

—  Lequel d'entre vous a hérité du CM1-CM2 ?

Le colosse lève la main, presque timidement.

— Chérif, c'est ça ? Si tu as besoin de quoi que ce soit, n'hésite pas à nous dire.

Ana intervient à son tour :

— Maryam, pareil pour toi, un cours double, c'est beaucoup de boulot, Milla et moi sommes prêtes à t'aider. Et Colin a installé une bibliothèque pédagogique avec différents fichiers photocopiables, revues, manuels et spécimens, ajoute-t-elle en désignant le nouveau meuble contre le mur.

— Colin ? ricane Stéphanie. Vous êtes déjà intimes à ce que je vois.

— C'est son prénom, non ? Comment veux-tu que je l'appelle ? rétorque Ana, presque sèchement.

L'équipe bavarde encore quelques minutes, puis chacun rejoint sa classe pour mettre à profit les quelques heures qu'il reste encore.

A midi, certains rentrent chez eux, la plupart restent déjeuner à l'école, dans la nouvelle pièce de vie. Jérôme se jette sur le vieux canapé marron, sans savoir que c'était un des seuls biens de son nouveau directeur.

— Ouh c'est une trop bonne idée, ce canap', je sens que je vais passer les récrés là-dessus moi ! C'est exactement ce qui manquait ici.

— C'est nouveau ? interroge Maryam, en ouvrant la boîte en plastique d'une salade toute prête.

— Oui, grince Patricia. Le nouveau directeur a dû s'imaginer qu'on serait heureux de venir bosser avec trois affiches au mur et un sofa pourri.

— J'aime bien moi, intervient Emilie, je trouve ça chaleureux, et c'est sympa qu'il cherche à nous faire plaisir.

— Moi je trouve ça ridicule. On est au boulot ici, pas à la maison, et il peut faire ce qu'il veut, c'est pas ici que j'ai envie d'être.

Jérôme s'extrait avec effort du canapé, et se dirige vers le micro-onde pour mettre ses pâtes au beurre à chauffer.

Colin Maillard et chat perchéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant