Chapitre 2

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— Maman ? Mamaaaaan ? Maaaaamaaaan !!!!

Ana ne lève les yeux de son ordinateur que lorsque sa fille fait irruption dans le salon.

— Mais tu m'entends pas ? s'offusque l'adolescente.

— Si. Néanmoins, si tu as besoin de moi, c'est à toi de te déplacer, tu le sais, réponds la mère en reprenant son travail.

Natacha élude l'argument, qui ne semble pas lui paraître probant, d'un mouvement d'épaule, et enchaîne :

— Tu sais où est mon jean ? Je suis en train de préparer mes affaires !

— Chérie, tu as quinze jeans.

— Le nouveau, brut, avec l'étoile sur la cuisse, s'agace-t-elle.

— Dans le panier à linge, il me semble.

— Tu l'as pas lavé ? s'écrie la jeune fille, scandalisée.

— La bonne a eu beaucoup de travail ces derniers temps, mais crois-moi, je vais lui en toucher deux mots, à cette fainéante.

— Maman ! Mais j'en ai besoin ! gémit Natacha, sans relever le sarcasme.

— Mets-en un autre.

— J'ai besoin de celui-ci. C'est le seul qui me va vraiment bien.

Retenant un soupir d'exaspération, Ana pose à nouveau les yeux sur sa fille.

— Alors prends-le sale, et tu demanderas à ton père de le laver ce soir. Je suis quasiment certaine qu'il sait utiliser sa machine à laver.

— Des fois t'es vraiment...

— Oui ? Je suis vraiment quoi, ma chérie ? Précise ta pensée, je t'en prie.

— Rien, grommelle Natacha, en se dirigeant avec humeur vers la salle de bain pour aller repêcher son jean dans le bac à linge.

Quand Xavier sonne quelques minutes plus tard, Natacha est déjà calmée. C'est l'une des choses qu'Ana préfère chez sa fille. Elle peut être très pénible parfois, capricieuse comme toutes les gosses de son âge, mais très vite, le vent chasse les nuages, et le soleil revient, comme si rien ne s'était passé.

Ana va ouvrir à son ex-mari, qui vient chercher leur fille comme un jeudi sur deux, pour passer le reste de la semaine avec elle. Ils s'embrassent sur les joues, ils sont restés en bons termes.

— Entre, tu veux un café ?

— Non, merci, je suis mal garé. Nat, tu es prête ? crie-t-il en direction de l'ado qui s'affaire dans sa chambre.

— Ouiii, j'arrive.

Xavier met les mains dans ses poches, et attend, debout dans l'entrée. Ana l'observe en souriant. Depuis qu'il est devenu riche, on le sent mieux dans sa peau. Ses vêtements sont de qualité, bien coupés, il se tient plus droit, il a pris en assurance.

— Comment tu vas ? s'enquiert-il, gentiment.

— Ça va. Et toi, rien de neuf ? répond-elle avec un geste vague.

— Non. Rien. Ça va aussi, fait-il après une légère hésitation. Bon, Nat, tu te presses ? Si je me prends un PV, je le déduis de ton argent de poche.

La jeune fille arrive en courant. Comme chaque jour, Ana se dit « Elle est belle, ma fille. Comme elle a grandi. » Tout le monde dit qu'elle lui ressemble, mais Ana n'a pas le souvenir d'avoir été si jolie plus jeune, surtout à quatorze ans, l'âge ingrat. Elle a ses écouteurs, cachés par ses boucles brunes. De grands yeux noirs, des taches de rousseur qui lui donne un air espiègle. La chipie, elle porte déjà ses baskets alors que sa mère lui défend de marcher en chaussures dans l'appartement. Elle pose sur son nez ses lunettes de soleil de luxe, cadeau d'anniversaire de Xavier, et se jette sur sa mère.

Colin Maillard et chat perchéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant