En ce vendredi soir, Colin est un peu nerveux, car il est invité à dîner chez Hugo et Isa. Il les a revus depuis son retour, Hugo était passé le saluer avec Robin, son filleul, dès le lendemain, alors qu'il vivait chez ses parents en attendant de trouver un appartement. Il avait déjeuné avec lui et Isa, son épouse, deux ou trois fois en ville, mais jamais encore ils ne se sont retrouvés tous les cinq, ni chez eux, dans leur maison qui avait abrité les soirées entre amis au temps où il avait une famille. Hugo l'avait invité plusieurs fois, essuyant refus sur excuses bidon, mais enfin, Colin se sent prêt. L'école est une puissante distraction, qui lui permet d'occuper ses journées et ses pensées, de dormir un peu mieux, épuisé par son nouveau rythme. Même s'il sait combien va le blesser cette résurgence de souvenirs, il sera capable de l'endurer surtout pour faire plaisir à son meilleur ami.Pour les enfants, il a acheté des livres, en bon instit qu'il est et qu'il reste, des fleurs pour Isabelle, et des chocolats.
Il gare sa vieille 206 devant le petit pavillon individuel, et son cœur se serre. Trois ans qu'il n'est pas revenu ici. Hugo a repeint la grille, il ne lui semble pas qu'elle était blanche avant. Au loin, au fond du jardin, il aperçoit un nouveau trampoline, et la petite cabane en bois où les enfants jouaient à la cuisine, ils préparaient tout un tas de recettes délicieuses à base de boue, de feuilles et de cailloux que les adultes devaient faire semblant de déguster lors des déjeuners d'été.
Il sonne. Avant, il toquait, il avait un code, et Robin venait ouvrir, parce qu'il savait que c'était tonton Colin. Maintenant il se sent comme un étranger. Alors, il sonne.
C'est Hugo qui ouvre, trop enjoué pour être sincère et Colin comprend, attendri, qu'il est aussi anxieux que lui. Mais il a l'air vraiment content de le voir là.
— Salut, Colin ! Mais qu'est-ce que tu as apporté ? Fallait pas enfin ! Chérie ! Colin est là ! Les enfants, venez dire bonjour !
Il se décale et laisse entrer Colin, un peu mal à l'aise de tant d'effusions. Il le débarrasse de ses cadeaux quand Isa arrive, souriante, calme comme toujours, s'essuyant les mains sur son tablier. Il s'approche pour lui dire bonjour, et elle le serre en retour dans ses bras.
— Je suis heureuse que tu sois là. Merci...
— Moi aussi, murmure Colin, et ce n'est pas vraiment un mensonge.
Les enfants suivent, plus timidement, Robin parce qu'il sait ce qui est arrivé à son parrain, Nina parce qu'elle ne se souvient pas de cet homme qui est parti quand elle n'avait que quatre ans, et qu'elle n'a pas revu depuis. Elle a l'âge qu'avait Salomé quand elle est morte, se dit Colin en s'agenouillant pour lui dire bonjour, et Robin, celui qu'elle aurait aujourd'hui, puisqu'ils n'avaient que quelques mois d'écart.
— Bonjour, petite princesse, fait-il doucement.
— Nina, tu fais un bisou.
— Elle n'est pas obligée, elle ne me connaît pas. Mais je t'ai apporté une petite chose.
Nina, voyant son frère planter une grosse bise sur la joue du nouveau monsieur qui a un nom de poisson carré de la cantine l'imite bien volontiers, et le remercie en découvrant le petit roman offert.
— Viens, viens, entre, dit Hugo en poussant presque son ami vers le salon, comme s'il craignait qu'il ne s'enfuie.
Ils ont changé la tapisserie, et le canapé aussi. Le reste est pareil, conforme à ses souvenirs. Il avance, seul parmi les autres, revisite la maison, en quête d'images du passé. La cuisine est exactement la même, sauf peut-être les dessins sur le frigo. Quand ils venaient dîner, souvent Sandrine aidaient Isa à finir de préparer le repas, en bavardant, un verre de vin blanc ou de lambrusco à la main pendant que Hugo et lui mettaient la table. On entendait les enfants rire et pousser des cris de joie.
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Colin Maillard et chat perché
Romance"C'est une folie de haïr toutes les roses parce qu'une épine vous a piqué, d'abandonner tous les rêves parce que l'un d'entre eux ne s'est pas réalisé, de renoncer à toutes les tentatives parce qu'on a échoué. C'est une folie de condamner toutes les...