Colin était encore dans son bureau quand il a ressenti les tentacules de la migraine se refermer sur son cerveau. Aussi vite que possible, il a pris sa voiture et est entré chez lui avant de ne plus être capable de conduire. A présent allongé dans le noir, sur son lit puisqu'il n'a plus de canapé, il grimace de douleur en pressant sa tempe droite, comme si cela pouvait atténuer sa souffrance. Il ouvre les yeux avec peine, regarde si sa main est tachée de sang, tant il a la sensation qu'on lui a défoncé le crâne à coup de batte de baseball et qu'on lui tripatouille maintenant les différents centres nerveux.Son téléphone vibre, plusieurs fois, à côté de lui. Sa mère, Camille ou Hugo probablement, qui veulent savoir si la journée s'est bien passée. Mais il n'a pas la force de saisir l'appareil, encore moins d'affronter la lumière bleue de l'écran.
Il va mourir, c'est sûr. On le retrouvera dans quelques jours, desséché dans son appartement. Sa mère, inquiète sans nouvelle ou sa voisine, alertée par l'odeur de putréfaction, appelleront les pompiers qui le trouveront là.
Estelle ne lui dit plus bonjour depuis le fameux soir. Quand ils se croisent par malchance, elle l'ignore superbement. Clara-Lila a demandé une fois : « Pourquoi tu es fâchée avec le monsieur ? Avant tu l'aimais bien. » « Il n'est pas gentil » a répondu sa mère, assez fort pour qu'il l'entende « il n'aime pas les femmes ». En dehors du fait qu'il trouve franchement douteux de dire cela à une gamine qui risque plus tard d'associer l'homosexualité à un mauvais trait de caractère, il se demande si Estelle pense vraiment que la seule raison qui pourrait expliquer son attitude est qu'il est gay, ou si elle a dit ça pour le blesser. Peu importe, c'est vrai de toute façon, il n'aime pas les femmes. Il aime Sandrine.
La douleur est insupportable. Il a si mal qu'il pourrait se foutre en l'air, juste pour que ça cesse. Mais il ne le fera pas. A tâtons, il trouve les cachets prescrits par le docteur Davadant, et en avale deux. Puis les vomit avec de la bile dans la bassine au pied du lit. Son corps refuse les traitements, c'est bien la preuve.
Colin n'est pas croyant. Il est baptisé « parce que qu'à l'époque, ça se faisait », mais n'a pas été élevé dans la foi chrétienne, et Sandrine et lui ne se sont pas mariés à l'église, même pas pour faire plaisir à Marguerite, son ex-belle-mère. Tends l'autre joue, expie tes péchés, tout ça, ça ne l'a jamais vraiment concerné, il ne croit tout simplement pas en Dieu, quel qu'il soit. Et pourtant, il est persuadé cette torture, c'est sa punition. Il l'a bien méritée. Il la supportera jusqu'à ce qu'elle le tue. Pourvu que ça ne dure pas trop longtemps quand même.
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Colin Maillard et chat perché
Romance"C'est une folie de haïr toutes les roses parce qu'une épine vous a piqué, d'abandonner tous les rêves parce que l'un d'entre eux ne s'est pas réalisé, de renoncer à toutes les tentatives parce qu'on a échoué. C'est une folie de condamner toutes les...