Chapitre 83/

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Mon ami soupire en passant une main sur l'arrière de son crâne et mon cœur se serre en le voyant triste de mon départ.

— Tu as une date de retour ? murmure-t-il en regardant par la fenêtre.

— Non. Je ne sais pas le temps que ça nous prendra, ni si l'on reviendra à Edeny un jour.

— Donc tu es en train de me dire qu'on ne se reverra plus jamais ? Hélia, sois sérieuse !

— Antoine, je...

Mais je me coupe dans ma phrase parce que je ne peux pas lui donner tort. On ne se reverra plus jamais, c'est un fait.

Je fixe mes mains tremblantes sur la table mais le blond frappe son poing dessus et je sursaute tandis qu'il recule sa chaise pour se relever. Je le regarde en l'appelant mais il m'ignore et sort du café en une fraction de seconde.

Je me relève à toute vitesse en nous excusant auprès des serveurs puis une fois dans la rue, je regarde à droite et à gauche afin de reconnaître une tête blonde dans les environs. J'aperçois ensuite quelques mètres plus loin le tee-shirt d'Antoine et je cours pour le rattraper.

— Antoine ! je crie entre les groupes de personnes. Attends-moi !

Il finit par s'arrêter et j'arrive devant lui en respirant par la bouche. Je vois son visage neutre mais ses yeux affichent de la tristesse et de la colère mais ça ne m'empêche pas de le frapper en plein dans le torse en lui disant :

— Abruti ! Pourquoi est-ce que tu pars comme ça ?

Anto lève les yeux au ciel puis prend mes poignets dans sa main pour m'arrêter. Il fait ensuite un pas vers moi et je lève un peu la tête à cause de nos dix centimètres de différence - même s'il n'est pas aussi grand que Léo.

— Lili, ça m'énerve que tu veuilles partir loin avec un type que tu connais à peine.

— Pourquoi ? Toi aussi tu vas rencontrer quelqu'un avec qui tu voudras faire ta vie.

— Parce que je me soucie de toi.

Je reste sans voix pendant que nos yeux se fixent l'un à l'autre. D'un coup, il m'attrape par les épaules pour m'entourer encore une fois dans ses bras mais cette fois-ci il ne me serre pas, mettant juste sa tête dans mon cou.

— Respecte mon choix, Anto, je murmure en sentant des sanglots monter. Respecte-le sinon ça ne fera qu'aggraver la situation.

— Hélia, j'espère que c'est le bon ou je te jure que je te botterai les fesses.

Je ris un peu en laissant une larme couler mais je l'essuie aussitôt.

— Tu vas me manquer, lui fais-je tout bas en fermant mes yeux pour retenir ce moment dans ma mémoire.

Je finis par me décoller de lui et relève les yeux vers son regard vert d'eau avant de le regarder de haut en bas pour être sûre de ne jamais oublier sa silhouette.

— Toi aussi tu vas me manquer, me dit-il d'une voix douce.

Je regarde son visage une dernière fois puis avec un signe de la main, je me retourne et me mets à marcher. Mon cœur palpite dans ma cage thoracique tandis que, par miracle, mes pieds réussissent à se mettre l'un devant l'autre malgré la douleur qui parcourt mon corps.

Une fois au bout de la rue, je m'arrête. J'hésite un instant à me retourner pour voir Antoine une dernière fois mais je me reprends et me remets à avancer. Mon avenir est le clan, maintenant.

De retour à la maison, je remercie encore une fois Colin pour s'être déplacé jusqu'à Edeny mais il me répond que ça l'arrangeait puisqu'il devait passer voir des Hawk de sa branche.

Je vais jusqu'à ma chambre sans un mot et en ne croisant personne dans le couloir. Ça m'arrange parce que je veux être seule ; même pas un petit Félix pour me remonter le moral. Je me laisse tomber sur mon lit avec un soupir triste et sors mon téléphone dans la foulée.

Je le déverrouille et vais directement dans ma galerie regarder des photos de Liam et tous les autres pour repenser à tous ces moments qui sont derrière moi, maintenant. Je fais défiler les photos et tombe alors sur la dernière que j'ai fait de Liam, juste avant qu'il ne soit tué.

Sur la photo, il est entouré de nos amis et j'aperçois le bras d'Antoine sur ses épaules. À cet instant mon frère a l'air heureux. Il regarde la caméra en faisant un grand sourire, avec devant lui un énorme gâteau que j'avais fait, surmonté de vingt-quatre bougies.

Une larme silencieuse coule sur ma joue. Liam ne sera pas là pour mon anniversaire et il ne me verra pas grandir. Et moi non plus.

— Il est mort, je chuchote à moi-même en mettant mes mains sur mon visage.

Je continue de verser quelques larmes en faisant défiler jusqu'à une autre photo : Liam et moi assis sur un petit banc à la campagne. Mon frère prend la photo en selfie, ses cheveux sont plus longs que d'habitude, dévoilant de belles boucles châtaines, et ses yeux sont fermés en souriant. Quant à moi, je suis collée à lui, l'agrippant par les épaules en riant de ce qu'il avait dû me dire juste avant.

Ces moments-là avec lui me manquent.

Je pleure de toute mes forces face à ses souvenirs avec mon frère mêlés à ma dernière rencontre avec Antoine. La seule personne qui me rappelait Liam n'est plus dans ma vie. Je dois me dire que c'est un bien pour un mal mais c'est plus dur que je n'aurais pensé.

Quelqu'un toque à ma porte mais je l'ignore et continue de sangloter sur le matelas. Je ne veux pas que l'un des mafieux me voit comme ça, alors quand la personne recommence à toquer à ma porte, je lui dis de repartir.

— Hélia, fait la voix de Léo, je sais que tu pleures, pas la peine de te cacher.

La porte s'entrouvre et je renifle en me remettant assise sur mon lit. Je sens que mes yeux sont rouges à cause des larmes, alors j'évite de croiser le regard de Léo qui fait quelques pas vers moi, pas trop sûr de lui.

Je passe une main sur mon visage pour essayer de minimiser la catastrophe qu'il doit y avoir dessus mais je vois ensuite la silhouette de Léo s'agenouiller devant mes jambes. Je regarde le sol, mes yeux sont fixés à nos pieds tandis que quelques larmes continuent de couler silencieusement sur mes joues.

Je les efface vite en sentant le regard scrutateur de Léo qui reste immobile devant moi. Je crois le voir passer une main sur sa nuque avant de la tendre vers moi pour me relever le menton. Nos yeux se croisent puis il me touche furtivement la joue en disant :

— C'est normal de pleurer quand on est triste.

Sa main est chaude mais il ne l'enlève pas.

— Liam me manque, fais-je avec la voix enrouée, et maintenant Antoine me manque.

Léo ne réplique pas, me regardant seulement de ses beaux yeux azurs, mais je sens son pouce faire des petits mouvements sur ma joue pour me consoler. Mais ça n'arrange rien puisque son geste me rappelle Liam lorsqu'il essayait de me réconforter.

Mes pleurs recommencent de plus belles, Léo ne doit rien comprendre à ce qu'il se passe mais pourtant il ne fait aucun commentaire. J'essaie alors de me cacher le visage comme je peux pour qu'il ne me voit plus pleurer.

— Je t'ai dit que c'était normal de pleurer, alors arrête de te cacher, me dit-il en prenant mes poignets pour dégager mon visage.

J'ouvre mes yeux salés pour le voir me fixer. Léo se penche vers moi et je recule mon buste pour qu'il ne s'approche pas trop près mais il souffle du nez avant de tendre sa main pour effacer les larmes en dessous de mes yeux.

— Après la mort de ma mère, commence-t-il à dire en se redressant, mon père m'interdisait de pleurer. Parce que, qui voudrait d'un chialeur pour hériter du plus grand clan d'Europe ?

Le chef me lance un regard tandis que je renifle un peu, me remettant de mes émotions, puis il soupire en disant qu'il a gardé toutes ses larmes et toute sa douleur en lui, parce que son père le voulait fort et inatteignable par ses émotions.

— Mais ça n'a fait que me rendre faible, murmure-t-il en regardant par la fenêtre.



L'assassin de mon frèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant