Chapitre 72/

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Point de vue de : Hélia

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Après que Colin soit reparti de ma chambre, Nestora sur ses épaules, je me rallonge sur le matelas avec un soupir. Je soulève ensuite mes draps pour regarder sur la gauche de ma hanche mais un bandage cache ma blessure.

Je passe délicatement un doigt dessus - c'est le premier bandage que je vois qui est aussi bien fait - mais je ne ressens aucun picotement, ni aucune brûlure. J'espère ne pas avoir une trop grosse cicatrice.

Pour une fois, l'idée d'en avoir une ne me met pas dans des états pas possibles. Sûrement parce que celle-ci n'aura rien à voir avec elle, mais plutôt à mon appartenance aux Hawk.

Avec un léger soupir, je me redresse sur le lit et regarde ma chambre dans les moindres détails. Elle m'avait manquée. J'aperçois alors sur ma table de chevet ce qui ressemble à un téléphone...mon téléphone.

Ma bouche s'ouvre d'elle-même et j'attrape dans un geste rapide ma coque jaune pâle en allumant l'appareil. Je n'y crois pas, ils ont vraiment tenu leur promesse. Je déverrouille l'écran avec mon mot-de-passe et reçois aussitôt des tonnes de notifications.

Une fois la marée de messages finie, je regarde mon fond d'écran mais ce n'est plus le même : dessus, je vois Félix, Blue et Éloi qui font tous les trois des grimaces en riant. J'éclate de rire en les voyant puis une pensée vient m'interrompre. Est-ce que Félix va bien ?

Mais Colin m'aurait tout de suite annoncée si Félix était gravement blessé. Enfin j'espère.

Je parcours rapidement mes notifications en supprimant celles qui sont inutiles. Je lis les messages inquiets de Maddy, Valentin et les autres, puis je m'aperçois qu'Antoine est celui qui m'a le plus envoyée de messages durant ces deux dernières semaines.

MOI : Je pars d'Edeny quelques temps pour faire mon deuil. T'inquiète pas pour moi.

ANTOINE : Toute seule ? Où est ce que tu vas ?

ANTOINE : Hélia je suis sérieux, dis moi où est ce que tu vas. Je peux t'accompagner.

ANTOINE : Pourquoi tu réponds à personne ? Je m'inquiète pour toi, Lili. Je veux juste m'assurer qu'il t'ai rien arrivée.

ANTOINE : Tu as rendu ton appart' ?

ANTOINE : Rappelle moi quand tu reviens.

Je lâche un soupir de frustration et j'éteins l'écran de mon téléphone en le reposant sur la table de chevet. D'un côté je m'en veux de l'avoir laissé seul et sans nouvelles mais de l'autre côté je suis contente d'être entrée dans les Hawk, même si cela fait de moi une mafieuse.

Est-ce que je devrais l'appeler ? Mais qu'est-ce que je lui dirais ? Sûrement pas la vérité... Alors je vais devoir mentir ?


Plus tard dans la journée, je marche tranquillement dans le couloir en essayant de me souvenir quelle porte est celle de Félix. J'ai décidé de sortir de ma chambre pour aller voir comment va mon ami.

J'ouvre une porte que je crois être la bonne et je tombe sur un Félix assis dans son lit, lunette sur le nez, en train de lire un bouquin.

— Les idiots savent lire, eux aussi ? fais-je en fermant derrière moi.

Le mafieux relève son visage vers moi et je lui souris gentiment en m'avançant vers son lit mais il me fait un doigt d'honneur alors j'éclate de rire. Une fois devant lui, il enlève ses lunettes en refermant son livre et je m'aperçois seulement maintenant qu'il a un énorme pansement sur son visage.

Je m'assois sur la couette et le prends par les épaules pour mieux voir : le bandage va de sa pommette jusqu'à sa tempe.

— J'ai failli être borgne, dit Félix avec un petit ricanement. La balle est passée si près de mon œil que je n'arrivais pas à ouvrir ma paupière...et toute ma joue pissait le sang.

Je fronce mes sourcils et vois que son œil gauche est rouge - une hémorragie sûrement à cause du traumatisme. Mais il ne semble pas avoir mal, alors je soupire de soulagement puis je lui touche gentiment le dessus du crâne.

— On m'a dit que tu étais blessée à la hanche, c'est grave ? me demande-t-il en fronçant ses sourcils.

— J'ai juste une éraflure, je vais bien. Mais toi, comment est-ce que tu vas ? À un moment, je ne te voyais plus avec les autres... Tu m'as fait peur.

Félix se gratte la nuque en lâchant un soupir discret puis il me regarde de ses grands yeux gris et murmure :

— J'ai eu mal mais je m'en sors bien. Je ne suis pas si triste d'écoper d'une cicatrice.

Je garde le silence en comprenant ce qu'il veut dire et mon ami me sourit tristement avant de secouer sa tête en marmonnant qu'il se sent coupable.

— Pourquoi tu te sens coupable ? je répète en essayant de capter son regard.

Le Hawk touche ses cheveux bicolor alors c'est à mon tour de me rapprocher de lui pour l'inciter à parler, ce qu'il fait à mi-voix :

— Ton passé te hante toujours à cause de tes cicatrices et tu en gardes de grosses séquelles. Quant à Léo, il est complexé par les siennes ; impossible qu'il se mette torse nu devant nous parce qu'il en a aussi bien dans le dos que sur le torse.

Je déglutis difficilement en repensant à notre conversation, à Léo et moi, dans le restaurant en Suisse.

— Mais moi, reprend Félix en me regardant avec ses yeux moroses, ça ne me fait plus rien de voir mes cicatrices sur mes épaules quand je me regarde dans le miroir. Parce que je m'y suis habitué. Mais ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal que je sois habitué à voir les séquelles des coups que m'a infligé mon père.

Les yeux gris de Félix sont remplis de tristesse, quelques larmes menacent de couler sur ses joues tandis qu'il fronce ses sourcils.

— Quelque chose cloche chez moi, chuchote-t-il. Mon père me frappait mais ça ne me fait plus rien quand j'y repense. Alors que toi et Léo vous...

— Félix, fais-je en le coupant. Tu n'as pas à te sentir coupable alors que tu as réussi à tourner la page sur cette partie de ta vie.

Je mets ma main sur la sienne tandis que nos yeux sont toujours fixés l'un à l'autre quand je continue :

— Je ne vais pas parler pour Léo, mais en ce qui me concerne, je dois faire face à mon passé. Et le fait que tu ais chasser tes démons me donne envie de faire la même chose. Félix, tu es un exemple, alors sois fier d'avoir trouvé le courage de vivre sans traîner un bagage d'horribles souvenirs.

Je reprends mon souffle après avoir parlé mais mon ami me prend dans ses bras, me recoupant le souffle. Je souris un peu en l'encerclant à mon tour de mes bras et je pose ma tête contre son épaule en me retenant de verser une larme.

— J'ai l'impression que tu es comme la sœur que je n'ai jamais eue la chance d'avoir, murmure-t-il à mon oreille.



L'assassin de mon frèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant