Une grande main froide m'attrape le bras et Colin me conduit en jurant jusqu'à une voiture noire avec des vitres teintées. Il ouvre la porte arrière et je m'engouffre dedans sans demander mon reste.
Plusieurs secondes passent avant que Félix ne s'installe à côté de moi sur la banquette. Les portes avant s'ouvrent juste après et les corps musclés des Hawk entrent dans l'habitacle. Je sens les regards inquiets des hommes sur moi mais je n'y prête pas attention, mon regard est fixé sur le trottoir de ma rue.
Le moteur se met en marche, signe que Colin nous emmène loin de mon appartement, et je souffle doucement de soulagement. Les trois hommes doivent voir ce genre de scène régulièrement car leurs visages ne semblent exprimer aucune émotion.
Je ne peux pas m'empêcher de revoir le corps sans vie du type : ses yeux ouverts de douleur et tout ce sang qui émane de lui.
— Je vais dire aux gars de ramener la voiture, lance Éloi en brisant le silence.
Il prend alors son téléphone et tape rapidement un message dessus tandis que Félix me lance un coup d'œil et me demande si j'ai mal autre part qu'à la gorge. Je secoue la tête sans parler et je sens seulement maintenant une affreuse douleur au niveau de mon cou.
— Comment vous saviez que les Avorio étaient chez elle ? demande Éloi en se tournant vers Colin.
— On les suivait depuis quelques rues et ils se sont dirigés vers son appart' mais ces enfoirés se sont ensuite divisés, deux en haut et trois qui montaient la garde, cachés un peu plus loin. Alors quand on vous a vu débouler et ouvrir la porte, on s'est dépêché de vous rejoindre mais les Avorio ont eu la même idée. Le temps qu'on arrive à les maîtriser...la situation avait déjà dégénéré.
Soudainement toute la scène devient comique : moi qui rejoins un gang de mafieux et vois pour la première fois des cadavres, tués par mes « coéquipiers ».
Je lâche un rire bref qui irrite encore plus ma gorge et je vois Colin me regarder dans le rétroviseur. Je ricane de plus en plus fort, sans pouvoir m'arrêter, comme si la situation était digne d'un film hilarant.
Le contre-coup est si violent que mon corps est parcouru de spasmes tandis que trois paires de yeux me fixent. Mes rires se transforment très vite en sanglots et je prends ma tête entre mes mains en pleurant sans gêne devant les Hawk.
Je sens des bras puissants me tirer vers un torse et la main de Félix vient se poser sur ma tête, pour essayer de me consoler.
Pourquoi il fait ça ? À vrai dire, je m'en fiche...je ne veux plus penser à rien.
Lorsque la voiture commence à ralentir, je me décolle de Félix en me frottant les yeux. Il ne dit rien et moi non plus. Tant mieux.
J'aperçois au loin une sorte de grillage en fils barbelés qui entoure l'immense maison. Je n'avais pas fait attention en sortant du garage mais il y a des gardes armés tout autour de la maison qui surveillent les horizons.
On passe un portail et le Hawk se gare devant l'entrée de mon nouveau logement. Les garçons commencent à sortir de la voiture mais je prends mon courage à deux mains et m'exclame :
— Attendez !
Ma voix brisée me fait moi-même mal aux oreilles mais Éloi referme la portière qu'il avait commencé à ouvrir, alors je déglutis avant de ne continuer :
— Merci de m'avoir sauvée la vie.
Personne ne répond. Je souffle doucement par la bouche en les regardant attentivement. Ma gorge me fait si mal alors que je n'ai dit qu'une phrase.
— Est-ce que...est-ce que ça peut rester entre nous ? Je ne veux pas que...le chef...sache que j'ai faillir mourir sinon il ne va pas vouloir que je reste dans le clan.
— Je l'ai déjà informé, me répond Colin. Mais il ne va pas te virer des Hawk.
Ils sortent ensuite tous de la voiture et je reste plantée là, sur mon siège. Comment peut-il en être sûr ?
Je sors de la voiture et l'air chaud contraste avec les frissons qui parcourent mon corps. Je reste un peu devant l'immense maison, soufflant doucement par le nez pour reprendre mes esprits.
La façade est entièrement blanche et des fenêtres viennent s'y ajouter. À gauche il y a le grand garage et un petit chemin mène jusqu'à la large porte d'entrée. Colin a garé la voiture juste devant la maison mais de là où je suis, je dois tourner la tête pour voir l'intégralité de la bâtisse.
Aucun garde n'est à l'intérieur de l'enceinte mais au moins je suis bien protégée. Même si le danger se trouve à l'intérieur.
Après ma rapide inspection, je longe le chemin de terre et pousse la lourde porte d'entrée. Je redécouvre l'intérieur de la maison puis je longe le couloir à la recherche de l'escalier. Je passe devant le bureau du chef et j'entends plusieurs voix derrière la porte.
Je continue mon chemin sans y faire attention et vois enfin l'escalier ; je le monte rapidement et arrive à l'étage presque essoufflée.
Où est ma chambre déjà ?
Je lâche un soupir et je commence à marcher vers la gauche mais j'aperçois la porte de la salle de bain où j'ai rencontré Félix.
Je virevolte puis repars dans l'autre direction et j'arrive alors devant deux portes semblables qui se font face. Après hésitation j'ouvre finalement la porte sur ma droite, qui n'est pas verrouillée, et entrevois un décor familier.
C'est la bonne ! Je referme la porte puis je m'affale sur le grand lit en soupirant.
Je me vois, mes cheveux noirs et habillée d'une robe blanche, comme d'un point de vue extérieur. J'aperçois ensuite un homme devant moi. Il me tient par le cou, me faisant suffoquer et une douleur s'empare de ma poitrine.
Je tente de crier mais aucun son ne sort de ma bouche, alors je regarde mon agresseur : il a les yeux vidés de toute émotion, le visage creusé par la mort et du sang provient du trou béant dans son torse.
Mon corps se crispe en reconnaissant la scène.
C'est alors que je sens la vie quitter peu à peu mon âme. Je me vois, mon corps se relâche dans la main de mon agresseur : ma tête pend d'un côté tandis que mon cœur s'arrête.
J'ouvre grand les yeux en me redressant sur le lit. Aucun son ne sort de mes lèvres mais mon cœur tambourine dans ma cage thoracique, me prouvant que ce n'était qu'un rêve. Je me passe une main sur le visage en respirant le plus calmement possible et sens mes joues humides.
Je suis en vie.
Je me relève et secoue la tête pour faire partir les images de mon crâne. Ce n'était qu'un rêve, rien d'autre. C'est fini. Tout va bien.
J'essaie de me décrisper et tourne mon visage vers la grande fenêtre à ma droite. Le ciel est bleu et les hauts arbres me redonnent le sourire : j'ai toujours aimé la campagne et sa verdure. Peut-être qu'aller dehors me fera du bien.
Mais d'abord il faut que je prenne une douche, la sueur me colle à la peau et mes vêtements sont tâchés de sang.
Mes vêtements...je n'ai pas pris de vêtements de rechanges !

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L'assassin de mon frère
ActionHélia vient de perdre son frère, mystérieusement tué lors d'un soir d'été. Anéantie, elle enquête sur la mort de Liam mais celui-ci semble être lié à des personnes dangereuses. Au milieu de tout ça, les souvenirs d'enfance qu'elle tente d'enfouir re...