Chapitre 6 : Gueule de bois et gueule mouillée

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Le lendemain matin,  Mizu Kamiaku peina à émerger de ses songes. Une fois apprêtée, elle sortit de sa chambre et coula un regard à la porte fermée de la chambre d'ami. Elle se demandait si leur nouveau locataire avait passé une nuit agréable. La jeune fille voulut frapper, mais se ravisa, tout en gourmandant l'impolitesse de sa maudite curiosité !

Quand elle arriva au salon, quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle vit une Aisu, à la mise plus que débraillée et aux traits tirés, apparaître dans la pièce. L'écrivain salua sa cousine avec un air absent avant de s'affaler sur la table basse.

— Mizu, ma chérie, tu serais gentille de me servir un verre, s'il te plaît, bredouilla-t-elle tout en essayant d'allumer une cigarette.

Elle porta la main à son crâne endolori et le massa en grimaçant : elle souffrait d'une effroyable migraine depuis son lever et elle ne savait comment faire taire la douleur ! Une migraine à en tuer un cheval ! Un sourire se dessina sur ses lèvres : ou un lion...

L'adolescente lui décrocha un regard courroucé avant de filer dans la cuisine. Aisu s'étira avant d'allumer la télévision. Les lumières aveuglantes de l'écran et le rire sonore de la présentatrice vantant les mérites du dernier régime minceur accentuèrent son mal de tête.

Mizu revint avec un verre où fondait une aspirine, qu'elle déposa face à sa cousine. Celle-ci s'en saisit et le but d'un trait. Mizu s'installa face à elle.

— Où as-tu passé la nuit, Aisu ? On s'est inquiété pour toi !

— Je t'en prie, parle pas si fort ! Arrête un peu avec tes questions ! Tu finis par ressembler à une mère-poule ou pire, à une épouse jalouse !

— Tu es allée au Manoir ?

Les doigts de l'adolescente se crispèrent. L'évocation même de ce lieu haï, la terrifiait et la replongeait dans des souvenirs qu'elle aurait aimé oublier. Mais il lui semblait qu'elle était condamnée à toujours revenir à son passé...

— Pour Kijin, Il...

Même son nom à lui, elle était incapable de le prononcer sans trembler, sans éprouver un sentiment de honte et de souffrance.

Aisu perçut sa douleur et décida de mettre fin à ce calvaire.

— Rassure-toi Mizu, Il a accepté que l'on héberge Kijin...

— Sans imposer la moindre condition !?

La jeune fille jeta un regard soupçonneux à son aînée qui le soutint sans sourciller. Elle ne pouvait s'empêcher de se méfier. Pourquoi le chef de famille avait-il accepté la venue de Kijin, lui qui détestait les personnes étrangères au clan ? Que pouvait-il bien manigancer? 

— Ne me regarde pas avec cet air suspicieux, Mizu ! s'écria Aisu. Taiyou ne complote rien impliquant mon jeune amant, je te le garantis !

La jeune femme s'abstint de parler du marché qu'elle avait passé avec le maître de famille en échange de Kijin. Le maître lui-même ignorait que l'écrivain n'accueillait pas l'adolescent uniquement par charité. Aisu savait que tôt ou tard, le jeune Kijin Akuma pourrait lui être utile...

— Au fait Mizu chérie, et si tu allais plutôt réveiller notre petite Juuki ? demanda Aisu d'une voix faussement maternelle, je n'aimerais pas que mon petit Kijin soit en retard pour son premier jour d'école !

En soupirant, Mizu se releva et quitta le salon, laissant sa cousine étancher sa soif et noyer sa fatigue dans un fond de bouteille de saké qu'elle venait de retrouver sous la table basse.

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La jeune fille monta les escaliers et arriva devant la chambre de Juuki. Elle donna trois coups discrets contre la porte mais comme personne ne lui répondit, elle l'ouvrit doucement et pénétra dans la chambre.

MajinaiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant