Chapitre 25 : Un secret dévoilé

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Laissant Kijin qui désirait rester un peu seul dans le jardin, Mizu quitta la remise et rentra dans la maison. Lorsqu'elle passa devant le salon, elle ne put résister à l'envie d'y jeter un coup d'œil : elle s'approcha du shoji.

Kaze, riant aux éclats, semblait avoir complètement oublié sa présence. Il était en train de narrer l'une de ses palpitantes aventures amoureuses à une Aisu toute aussi hilare et éméchée que lui, sous le regard désespéré d'une Juuki qui tentait tant bien que mal de finir son dîner tout en échappant aux blagues de son encombrant cousin. Mizu ressentit un petit pincement au cœur et ne put réprimer un sanglot : Kaze n'était pas venu pour elle mais pour Aisu. Elle, elle n'avait jamais compté pour lui !

Juuki redressa la tête. Les deux cousines échangèrent un regard. Se voyant démasquée, Mizu tourna les talons et remonta les escaliers à toute vitesse. Juuki se leva d'un bond et se lança à sa poursuite. Mais lorsqu'elle arriva devant la chambre de Mizu, seul le verrou de la porte lui répondit.

Juuki voulut frapper mais au dernier moment, retint son geste. Curieuse, l'adolescente colla son oreille contre la porte et crut entendre des bruits de pleurs mais elle n'osa pas entrer dans la pièce. Croyant que sa cousine préférait rester seule, la jeune fille tourna les talons et s'en retourna à sa propre chambre.

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La conversation des deux adultes dura jusqu'à tard dans la soirée. Tout autour d'eux, dispersés sur le kokatsu et les brouillons d'écriture d'Aisu, se trouvaient les cadavres des nombreuses bouteilles qu'ils avaient vidées tout en chantant des chansons et en rivalisant à coups de blagues et d'éclats de rires, bien dignes des deux gamins immatures qu'ils étaient tous deux restés !

Après un déferlement de rires encore plus sonores que les précédents, qui firent trembler toute la maisonnée, les deux maudits s'enfermèrent dans un silence gêné. Kaze, avec beaucoup de difficulté, s'accouda sur la table et se pencha afin de mieux profiter du charmant spectacle que constituait le col débraillé de son amie, laissant entrevoir la naissance de sa poitrine.

— Dis ma déesse, demanda-t-il d'un ton pâteux, mais néanmoins empreint d'une certaine gravité. Quand toi et Raiu, vous allez arrêter votre petite guéguerre ? Faut oublier le passé, ma belle ! Dire qu'avant, on formait un sacré trio ! Tu t'en souviens ?

Un triste sourire se dessina sur les lèvres encore humides d'alcool de son amie.

— Et comment!

— On en a fait des bêtises ! Surtout toi et moi. Tu te souviens du jour où je suis allé me faire percer ? T'as voulu m'accompagner et je suis ressorti avec un diamant à l'oreille et toi, avec un anneau dans le pif !

— Je me souviens surtout de la crise que ma chère mère a piqué en me voyant avec cette horreur sur le visage !

Aisu baissa la tête pour masquer les larmes perlant au coin de ses paupières. L'une d'elle cependant parvint à s'échapper et forma un petit cristal de glace qui roula sur sa joue. Ce jour-là, elle avait à peine seize ans et elle était déjà en conflit avec cette famille qui ne l'avait jamais véritablement acceptée ! Elle les scandalisait déjà par ses manières et sa langue trop pendue. Pas assez discrète, pas assez sérieuse, Aisu la rêveuse un brin révoltée, détonnait au milieu de ses géniteurs et de cette sœur aînée respectables ! Et le piercing qu'elle avait arboré fièrement fut l'une de ses nombreuses provocation que sa mère ne put supporter. Dès qu'elle la vit entrer avec ce bijou accroché aux narines, la réaction de la mère d'Aisu ne se fit pas attendre : elle gifla sa fille en lui hurlant, comme à son habitude, combien elle était irresponsable et délurée !

Devant sa mère, Aisu garda la tête haute et lui adressa un regard hautain. Mais dès que celle-ci eut le dos tourné, l'adolescente qu'elle était alors, s'empressa de quitter le pavillon familial et alla se réfugier sous son arbre favori, celui qui avait recueilli nombre de ses sanglots et de ses secrets...

MajinaiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant