Chapitre 97 : Espère, flocon de neige

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La pluie devint tempête, un éclair déchira le ciel de cette nuit d'hiver. Le bruit terrifiant du tonnerre tira un enfant de ses songes agités. Le petit garçon se dressa d'un bond et poussa un hurlement d'effroi avant d'appeler sa mère d'une voix entrecoupée de sanglots. Mais personne ne vint à son aide, nulle porte ne s'ouvrit et l'enfant resta seul, prisonnier du noir et de sa peur. Son petit corps se mit à trembler. L'enfant  porta ses mains à son ventre douloureux. Jamais encore il n'avait éprouvé une telle souffrance !

Au plus fort de la douleur, une profonde entaille se dessina sur sa poitrine ; ce ne fut pas du sang qui sortit de la plaie, mais une épaisse couche de neige se répandant tout autour de lui. Pris de panique devant un tel événement, l'enfant ne put se contenir davantage et sur son bas de pyjama apparut un petit cercle humide. Il hurla à nouveau le nom de sa mère mais une fois de plus, son appel demeura lettre morte.

Il entendit un bruit de pas. Surpris, il abaissa sa couverture et vit avec stupeur un petit ours blanc à son chevet, qui le fixait d'un œil bienveillant.

Intrigué par cette peluche géante et bien vivante, Yuki Kamiaku tendit la main vers l'animal et lui caressa le museau. L'ours se dressa sur ses pattes arrières, approcha sa gueule du visage baigné de larmes de l'enfant, et d'un coup de langue râpeux, qui fit rire le petit garçon, essuya ses pleurs.

Le kami posa son front contre celui de l'enfant et lui transmit une vision qui enveloppa Yuki d'une chaleur bienfaisante. Il se vit, lui qui n'avait vu la mer que dans des albums illustrés, les pieds dans l'eau, jouant avec les vagues. L'enfant eut un sourire et ferma les yeux pour mieux savourer cette image de bonheur. Un homme se tenait à ses côtés. Il reconnut Raiu et son œil orphelin, mais un Raiu qui lui souriait avec tendresse. Une voix les interpella. Raiu lui tendit la main et tous deux remontèrent sur le sable afin de rejoindre Aisu, assise sous un parasol, un nourrisson niché au creux de son bras.

Yuki ouvrit les yeux. L'ours se laissa caresser une dernière fois avant de disparaître dans un tourbillon de cristaux blancs.

Yuki comprit que son kami venait de disparaître à jamais. Le petit garçon enfouit sa tête sous ses couvertures et s'endormit, apaisé, rêvant à un avenir loin du terrifiant Manoir, loin de ses parents indifférents, aux côtés de "tante Aisu" qu'il aimait comme une mère..

♠♠♠

Aisu et Raiu, allongés l'un à côté de l'autre, mains entrelacées, écoutaient le bruissement des gouttes de pluie sur le toit. Ils se laissaient bercer par ce calme apaisant, tout en songeant à leur avenir.

Raiu détacha sa main et la laissa glisser sur la peau nue de sa maîtresse. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il découvrit de nouvelles courbes sur ce corps qu'il croyait pourtant connaître par cœur ! Sa main atteignit le ventre de la maudite légèrement arrondi, le petit nid douillet abritant une nouvelle vie, celle de leur enfant. Raiu s'y attarda et se mit à le caresser avec tendresse. Dire que Aisu portait un enfant ! Un enfant fait de leur deux sangs ! Il n'osait y croire ! Si c'était un rêve, alors il ferait en sorte qu'il ne s'arrête jamais...

— Raiu... chuchota la voix d'Aisu, qu'allons nous faire ?

Le jeune homme releva la tête. La maudite s'empara de la main fautive et la serra dans la sienne.

— Bientôt, je ne pourrai plus cacher mon état, et si Taiyou apprend que je porte ton enfant...

Raiu déposa un tendre baiser sur les lèvres.

— Bientôt Aisu, nous serons libres.

— Comment peux-tu en être sûr !?

Raiu prit le menton d'Aisu entre ses doigts et la força à lui faire face.

— Je le sais, c'est tout. Aie confiance en Kijin. Lorsque tout ça sera terminé, je t'emmènerai loin d'ici. On recommencera une nouvelle vie : toi, notre enfant, Yuki et moi. Tous les quatre, comme une vraie famille.

— Tu... tu serais prêt à élever Yuki !? Même s'il n'est pas ton fils !?

— Oui, parce que je sais que tel est ton désir. Et puis, il a besoin d'un vrai foyer et de beaucoup d'amour.

Un voile de tristesse embua alors les yeux clairs de la maudite.

— Jamais Shoki n'acceptera... après tout, elle a élevé Yuki...

— Certes, mais elle ne l' aime pas comme un fils. Qu'elle le veuille ou non, nous mettrons tout en œuvre pour le récupérer. Tu dois me faire confiance.

Aisu embrassa les doigts de son amant avant de se jeter à son cou. Cette nuit-là, elle voulait croire en cet avenir que lui promettait Raiu. Elle ne désirait plus qu'une chose : que tous deux soient libérés au plus vite de ces chaînes maudites afin de pouvoir réaliser leurs rêves.

 Elle ne désirait plus qu'une chose : que tous deux soient libérés au plus vite de ces chaînes maudites afin de pouvoir réaliser leurs rêves

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