Chapitre 68 : Juste Elle & Lui (1)

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Raiu arriva à la demeure de l'écrivain. Il descendit de son véhicule sans couper le moteur et courut jusqu'à la porte d'entrée. Il sonna plusieurs fois mais personne ne vint lui ouvrir. Déçu, il s'apprêtait à faire demi-tour lorsqu'il sentit un liquide glacial pénétrer la semelle de ses chaussures. Intrigué, il baissa la tête et vit que le palier était noyé sous des cristaux de glace ! Inquiet, il poussa la porte, ce qui accrut encore davantage son mauvais pressentiment : jamais Aisu ne serait partie en laissant sa maison ouverte, elle tenait trop à ses bouquins et ses bouteilles de saké pour prendre le risque de se faire cambrioler !

Le jeune homme franchit le vestibule et se rendit dans le salon. Là, il constata avec stupeur, l'ampleur des dégâts : la demeure s'était changée en une véritable galerie des glaces ! Des stalactites accrochées au plafond menaçaient à chaque seconde de s'en détacher pour lui perforer le crâne ! Jamais encore, il n'avait assisté à pareille scène ! Aisu, ces dernières heures, avait dû être soumise à de sérieuses émotions pour avoir ainsi métamorphosé son repaire en grotte polaire !

— Aisu ? appela-t-il d'un ton qu'il espérait pas trop tremblant.

Seul un silence lui répondit. Raiu se lança à la recherche de l'écrivain. Il quitta le salon et s'engagea dans l'escalier recouvert de glace. La main fermement appuyée autour de la rampe pour ne pas glisser, le maudit entreprit son ascension en grelottant de froid. Un peu de buée jaillissait de temps à autre de ses lèvres gercées.

Une fois arrivé sur le palier, Raiu prit la direction de la salle de bain dont la porte était dissimulée derrière une épaisse couche de glace. Il souffla sur ses doigts et avec peine, il parvint à pénétrer dans la petite pièce. Là, il la vit enfin, encerclée par de fins cristaux de glace s'élevant en piques. Aisu était inconsciente, adossée contre la baignoire. Raiu s'avança mais son sourire soulagé se mua en un regard effrayé lorsqu'il s'aperçut que la glace entourant Aisu était tachée de rouge. Il s'agenouilla face à elle et vit avec horreur que du sang s'écoulait le long du poignet droit de la jeune femme. La paume gauche de l'écrivain s'ouvrit et une paire de ciseaux aux lames ensanglantées glissa le long de ses doigts avant de tomber, en un bruit morbide, sur la glace.

Raiu, passé un premier instant de panique, retrouva bien vite ses réflexes de médecin. Il tendit la main vers le visage inerte et lui tapota la joue.

— Aisu, je t'en prie, Aisu...

La peau sous ses doigts se réchauffa quelque peu et un faible murmure jaillit des lèvres bleuies par le froid de la jeune femme :

- Rai-chan, c'est toi ?

Lorsqu'il entendit ce surnom, le surnom affectueux qu'elle lui donnait par le passé, le médecin ne put s'empêcher de frémir. Quelques mois plus tôt, il aurait été prêt à sacrifier son âme maudite pour l'entendre à nouveau prononcer son nom d'un ton si doux ! Il secoua la tête et reprit son calme habituel, plus de circonstance.

— Je suis là, murmura-t-il tout en lui caressant la joue. Tu n'as plus rien à craindre...

Aisu battit des paupières, lui décrocha un triste regard avant de sombrer à nouveau dans une douce torpeur.

Raiu se détacha à contrecœur d'elle et se releva afin de fouiller dans le placard à pharmacie. Ayant trouvé de quoi la soigner, il retourna à ses côtés, désinfecta son poignet mutilé avec précaution avant de le bander avec délicatesse. S'étant assuré que sa vie n'était plus en danger, il la prit dans ses bras, se redressa et entreprit de la transporter dans sa chambre. Le pas du médecin tira Aisu pendant momentanément de sa léthargie.

— Rai-chan, murmura-t-elle en signe de protestation.

Raiu venait de la déposer sur son lit. Aisu tenta de le repousser, elle n'en voulait pas de sa pitié ou de sa compassion ! Qu'il s'en aille ! Elle n'était pas Tsuki, elle n'avait pas besoin d'être maternée ou protégée comme un enfant ! Elle était adulte à présent ! Irresponsable, certes, mais une adulte quand même !

— Aisu, calme-toi, lui ordonna son ami d'un ton autoritaire mais non dépourvu de tendresse.

Le regard qu'il lui décrocha lui ôta toute tentative de résistance. Elle nicha sa tête contre l'oreiller et cessa de toute tentative de rébellion. Il s'agenouilla près d'elle et lui chuchota au creux de l'oreille :

— Je suis là, je te protège.

Il lui déposa un timide baiser sur le front. Apaisée, la jeune femme lui adressa un dernier sourire avant de s'endormir.

 Apaisée, la jeune femme lui adressa un dernier sourire avant de s'endormir

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