Chapitre 10 : Popularités et rivalités

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Cela faisait à présent quelques jours que Kijin Akuma était officiellement devenu le nouveau prince de ce petit lycée de province. Toutes les filles, des plus jeunes aux plus âgées, vouaient un véritable culte à ce jeune homme débarqué de nulle part.

L'adolescent trouvait un nombre assez conséquent de lettres d'amour anonymes, de bouquets de fleurs et de boîtes de chocolat dans son casier ou dans son sac de sport lorsqu'il le laissait dans les vestiaires. Quand il passait dans les couloirs, il pouvait entendre des soupirs énamourés s'élever à son arrivée et des jeunes filles s'écartaient à son passage en gloussant. Il savait, par quelques uns de ses nouveaux camarades qui finalement avaient appris à l'apprécier, quelles curieuses rumeurs couraient sur son compte : on le disait prince d'une contrée éloignée, on expliquait son air mélancolique par sa noblesse cachée. On le disait poète, descendant d'une famille de samouraï, magicien capable de communiquer avec les esprits. On racontait toutes sortes de choses à son sujet, et, à en croire les demoiselles du lycée, le beau Kijin sortait tout droit d'un manga !

Ce midi-là, Kijin aspirant à un peu de tranquillité, avait trouvé refuge sur la pelouse du stade. Il déballa son repas et ne répondit pas aux sollicitations des amis de Mizu, se trouvant à quelques mètres de lui. Qu'avait-il fait pour mériter leur attention ? Pourquoi ne voyait-il pas le monstre, son véritable visage, qui se dissimulait derrière le masque du timide camarade ?

— Kijin ? l'interpella une voix au-dessus de lui.

Il releva la tête et esquissa un sourire amical à  Juuki qui prit place près de lui.

— Alors le Prince, tu attendais ta princesse charmante ? Manque de pot, Juuki vient de lui piquer sa place ! s'écria-t-elle dans un grand éclat de rire avant de s'attaquer à son repas.

— Je suis le prince de personne, grommela le jeune homme d'un ton bourru.

— Tu veux rire ! répliqua Juuki en s'accordant une longue rasade de soda. En même pas une semaine, t'es devenu le chouchou de ces dames ! Alors, sur laquelle de ces dindes vas-tu porter ton choix ?

— Je ne suis pas ici pour me trouver une fiancée...

— T'as raison parce que ici, vaut mieux éviter ! Les filles sont toutes des pimbêches immatures et idiotes. À choisir, préfère un mec, c'est plus intelligent !

Kijin ne put réprimer un sourire amusé.

— Et c'est une femme qui ose parler ainsi...

— Que veux-tu moi, je suis une exception !

— Et toi Juuki, qui est ton fiancé ?

Le regard de l'adolescente s'assombrit brusquement. Elle baissa son nez dans son  bentô afin de masquer son trouble.

— J'en ai pas...

Soudain, des rires se firent entendre. Juuki jeta un regard à la bande d'adolescents qui se moquaient de l'une de leur camarade de classe, leur tête de turc favorite, mangeant en solitaire.

— Bande de crétins... J'me demande bien ce que Mizu peut leur trouver à ces imbéciles...

Kijin tourna la tête et aperçut Mizu qui se trouvait avec ses amis. Comme à son habitude, l'adolescente avait un air pensif et ne participait guère à la conversation enjouée et aux moqueries de ses camarades. Se sentant épiée, elle releva la tête et lorsque ses yeux croisèrent ceux de Kijin, une timide rougeur s'empara de ses joues. Juuki lui jeta un coup d'œil, Mizu baissa précipitamment la tête comme pour échapper au regard acéré de sa cousine.

— Mizu est une idiote, déclara alors Juuki tout en aspirant une nouille à grand bruit. Elle traîne avec ces idiots uniquement pour ne pas être seule. Elle a la trouille de la solitude.

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