Chapitre 14 : Esprit enchaîné

19 7 2
                                    

Quelques jours plus tard, Juuki et Mizu furent de corvée de nettoyage de la salle de classe. Kijin les abandonna à leurs balais et au rangement des carnets de présence, et sortit du lycée.

Il ne rentra pas tout de suite chez Aisu, préférant flâner dans les rues, bercé par un petit vent d'automne, annonçant l'hiver qui n'allait pas tarder à arriver. Le jeune homme s'arrêta devant une boutique et contempla son reflet dans une vitrine. Il fit une grimace en voyant son double de verre, ce monstre au regard noir et empli de mensonges ! Quand trouverait-il enfin le courage de révéler la vérité à ses amies, de leur montrer son véritable visage ?

Il appuya son front contre la vitrine et poussa un long soupir de découragement : il était bien difficile finalement de jouer le rôle d'un adolescent normal ! Soudain, la voix qui le tourmentait depuis son enfance se manifesta. Le jeune homme porta la main à son ventre et enfonça ses ongles dans sa chemise afin de faire taire cette brûlure commençant à lui dévorer le bas-ventre.

En leur révélant mon existence Kijin, tu seras également obligé de leur avouer ton crime. Es-tu prêt à affronter leurs jugements et leurs regards ? Peut-être te demanderont-elles de leur dévoiler mon visage, celui de Majinai. Majinai, le nom de ta malédiction. La malédiction du clan Akuma, lui souffla une voix rauque au creux de l'oreille.

Assez ! Tais-toi !

Dis-moi Kijin Akuma, es-tu inconscient ou simplement stupide ? Ne crains-tu donc par leur vie ? Après tout, n'est-tu pas un meurtrier ?

C'est toi l'assassin, monstre !

Vraiment ? Kijin, ne la sens-tu  pas rôder autour de toi, cette odeur ? Cette odeur nauséabonde ?

De quoi veux-tu donc encore parler, monstre !

L'odeur de la Mort, Kijin. Tu empestes la mort. Cette famille si unie, si parfaite, sera détruite par ta faute, comme le clan Akuma. Nous semons la mort et la désolation, Kijin... telle est notre destinée. Toi et moi, ne nous faisons qu'un.

Le jeune homme ferma les yeux et abattit son poing contre la vitrine: Cesse... Cesse de me torturer, Majinai...

Jamais, Kijin, car sache que tu m'appartiens à jamais...

Un homme vêtu d'un kimono noir apparut derrière Kijin. L'adolescent ouvrit les yeux et lorsque son regard croisa celui, couleur de sang, de son ennemi juré, il ne put réprimer le frisson d'effroi qui lui grimpa dans l'échine. L'homme esquissa un rictus, révélant des dents pointues et acérées, comme celles d'un sauvage animal. Il se pencha vers sa proie, noua ses bras puissants autour de la taille de Kijin et enfouit son visage dans ses cheveux. Sa bouche glissa jusqu'à cette nuque le mettant en appétit et en mordilla la chair pâle avec tendresse : Toi et moi, nous sommes liés pour l'éternité.

— Kijin !

Ce cri brisa l'image démoniaque. Kijin secoua la tête pour retrouver ses esprits et se détacha de la vitrine. Une petite tornade aux longs cheveux châtains s'arrêta juste devant lui. La jeune fille leva vers lui, son regard vert pétillant de malice et lui adressa un sourire amical.

Kijin reconnut la charmante Mori Kamiaku. La jeune maudite était vêtue d'une longue robe rose aux manches bouffantes et à froufrous. Le bas de sa robe dévoilait à peine ses bas en dentelles et ses souliers blancs. Elle avait laissé ses cheveux en liberté et ils étaient retenus sur son front délicat par un bandeau orné de fleurs et de dentelles.

— Tu ne m'as pas entendu ? Je t'appelais depuis la boutique de bonbons ! déclara la ravissante créature après avoir repris son souffle.

— Désolé... j'étais...

— Perdu dans tes pensées ? proposa Mori d'un ton enfantin.

— Exactement! Dis-moi que fais-tu ici ?

— Je me promène et j'en ai profité pour acheter plein de bonbons ! s'écria l'adolescente tout en brandissant son sac en plastique rempli de sucreries aux couleurs acidulées. T'en veux un ? demanda-t-elle tout en sortant une sucette géante du sachet qu'elle porta à sa bouche.

— Non merci, fit Kijin en esquissant un sourire amusé.

La maudite lécha sa sucette à grands coups de langue gourmands et du sucre s'était accroché à ses narines. Elle avait l'allure et le comportement d'une enfant, prenant la vie comme un jeu, un jeu dans lequel nul n'est mauvais ou capable des pires atrocités. Elle appartenait à un autre monde, protégée de la réalité par ses espiègleries et ses rires contagieux.

Kijin se demanda si comme lui, Mori portait un masque. Était-elle toujours cette créature enjouée et innocente ou alors, lui arrivait-il d'avoir conscience de la noirceur de l'univers dans lequel elle évoluait ? Sans doutait, jouait-elle à l'enfant pour préserver une part de ses illusions...

— Kijin ?

Le jeune homme baissa la tête. Mori tenait dans sa main droite sa sucette et dans l'autre, elle était agrippée à la manche de son blouson.

— Viens, je connais un endroit super où l'on pourra parler tranquilles ! s'écria-t-elle, avant de l'entraîner derrière elle dans une course effrénée à travers les rues de la ville, sous les regards amusés des passants.

— Viens, je connais un endroit super où l'on pourra parler tranquilles ! s'écria-t-elle, avant de l'entraîner derrière elle dans une course effrénée à travers les rues de la ville, sous les regards amusés des passants

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.
MajinaiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant