Tsuki Kamiaku, la dernière maudite encore prisonnière de ses chaînes, se terrait dans sa chambre. Debout devant la baie vitrée, elle contemplait d'un œil embué de larmes, le ciel de cette nuit hivernale, loin de l'agitation régnant dans le manoir, elle s'était replongée dans ses souvenirs.
Elle posa son index sur le verre gelé et le laissa glisser le long de la paroi, pareil à cette larme perlant au coin de sa paupière mais qui se refusait à rouler sur sa joue. Dix-huit. Elle avait déjà vécu dix-huit ans. N'était-ce pas suffisant ? Elle avait déjà connu tant de peines et de souffrances ! Ne valait-il pas mieux qu'elle disparaisse pour de bon ? En dix-huit ans, combien de rôles avait-elle dû jouer ? Celui d'un garçon pour satisfaire les caprices d'un père qui n'en avait jamais été un ; celui d'une adolescente folle à lier, déchirée entre différents sentiments ; celui du bourreau lui-même victime, celui d'une possédée ; celui d'une amante perdue ; celui d'une jeune fille amoureuse...
La larme parvint enfin à couler le long de sa peau et atteignit la commissure de ses lèvres. Elle la lapa d'un coup de langue, savourant avec délice, son goût amer et salé, cette étrange saveur mêlant la tristesse et la résignation.
Raiu et Aisu libres, ce n'était plus qu'une question d'heures avant que Majinai ne se décide à briser les chaînes maudites de Taiyou, la condamnant ainsi, à une agonie certaine et douloureuse pour qu'enfin, s'accomplisse la vengeance du démon !
Mikazuki s'était tue et semblait s'être résignée à son sort. Elle ne cherchait plus à lutter, ni à attiser la folie de son enveloppe charnelle. À quoi bon ? Elle avait de nouveau échoué. Tsuki savait que ses larmes n'étaient pas uniquement les siennes, mais aussi celles du kami lunaire pleurant sa défaite, sa déchéance et surtout, son amour perdu à jamais.
Soudain, une vision s'imposa dans l'esprit de l'adolescente. Éblouie par la lumière aveuglante de ses images remplaçant le jardin enneigé, elle vacilla et tomba à genoux.
Une chaleur bienfaisante se glissa dans ses veines et un rayon de soleil, jaillit d'un ciel bleu et vint lui caresser le visage. Elle ferma les yeux et laissa son corps se couler dans cette lumière blanche, si apaisante.
Elle se trouvait à présent loin de l'univers froid et enfermé du Manoir, dans un champ immense, éclairé par un soleil aux rayons consolateurs. Elle effleura des doigts, ce tapis de verdure s'offrant à ses paumes crevassées et lorsqu'elle ouvrit les yeux, elle aperçut la cime majestueuse des arbres recouverts de fleurs blanches. Au loin, elle crut distinguer la forme cristalline d'un lac entouré de roseaux. Où se trouvait-elle donc ? Était-elle donc morte ? Pourtant... elle se sentait si vivante ! Comme si la vie coulait à nouveau dans ses veines.
N'aie crainte, Tsuki murmura alors Mikazuki. Ce royaume est celui des kamis. Regarde ! La vie de nouveau reprend ses droits.
La jeune fille releva la tête et là, non loin d'elle, elle aperçut la silhouette de Kijin, recroquevillée sur le sol. Elle voulut courir vers cette ombre, mais la voix de Mikazuki l'en empêcha :
Non, Tsuki. Pour le moment, tu dois laisser Kijin seul. Majinai doit d'abord retrouver les siens, ses kamis avant de nous rejoindre, nous. Et enfin, tout sera terminé... nous serons tous libérés...
Peu à peu, le jardin disparut et Tsuki retrouva la sinistre atmosphère de sa chambre.
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Kijin ouvrit les yeux. Il venait de rêver d'un aigle majestueux emportant entre ses serres, une tigresse au regard couleur de glace. Cela ne pouvait signifier qu'une chose : Raiu et Aisu, les derniers maudits venaient d'être libérés.
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Majinai
Paranormal" Sang maudit. Ta véritable nature. Ta malédiction." Kijin Akuma s'enfuit du manoir familial, les mains couvertes de sang et l'âme maudite. Après une longue errance, il trouve refuge chez Aisu Kamiaku et ses deux jeunes cousines. L'adolescent ne va...