L'aveu de Lisa resta en suspens, le temps se figea et je sentis qu'on m'arracher le cœur lentement. La douleur était prenante, lourde et silencieuse, si silencieuse que j'en oubliais presque de respirer.
Dans ce calme prêt à être engouffré par les ténèbres, tout le monde avait les yeux tournés vers le Caporal, nous n'osions pas bouger, ni même parler mais je sentais que tout le monde attendait une réaction, ma réaction.
Qu'allait-être la sienne ? Moi, je n'allais pas leur donner le plaisir d'exploser devant elles. Etaient-elles toutes au courant ? Quelle trahison et cette secousse viscérale m'envoya un frisson dans l'échine.
Je vis l'homme hésiter, il cligna brièvement des yeux, il amorça un pas vers moi mais j'étais terrifiée et en colère, tellement en colère.
- Ne faites pas un pas de plus. Soufflais-je, feignant un certain calme.
Laissez-moi rejeter la vérité.
Cependant, je n'avais pas le courage de l'affronter, car l'émotion charriait tout mon être comme si j'allais me changer en sable et disparaître au gré du vent.
- Et vous non plus ! Menaçais-je les filles avec toute ma hargne en sortant de la pièce.
Ne m'approchez pas.
Il n'était pas difficile de voir qu'elles étaient gênées par la situation, qui ne l'aurait pas été ? J'étais furieuse, meurtrie et désorientée, tant adjectif pour m'empêcher de dire que j'étais ivre de tristesse d'avoir le Caporal en face de moi, incapable de démentir les faits de Lisa.
Je ne pus que tourner les talons et rediriger ma colère vers Ana, mais n'était-ce pas là le noyaux de la facilité ? S'en prendre à l'autre femme ?
En sortant dans le couloir sombre aux tentures vertes foncées je croisais Cassandre, surprise elle me demanda :
- T/p, qu'est-ce que tu...
Je m'arrêtai devant elle, ravala mon chaos et lui demanda, d'une voix aussi blanche que les draps qu'elle portait :
- Où est Ana ?
Elle hésita une demi seconde puis me répondit en se retournant légèrement vers les escaliers qui menaient aux étages de la bâtisse :
- Dans sa chambre, je...
Il ne m'en fallut pas plus pour bondir dans les escaliers et foncer droit vers son étage, je l'entendis me crier également : « T/p, ne la bouscule pas ! ».
Quelle naïveté.
Je fis comme si de rien n'était et je me contentais de monter rapidement, laissant à ma colère le temps de s'immiscer dans mes veines.
Je ne devais pas prendre pour argent comptant tout ce que disait Lisa, mais garder la tête froide dans un tel moment me semblait impossible, non pas parce que je le croyais, mais parce que j'en avais eu l'intuition. Toute cette distance qu'il avait mise entre nous, ce refus de me toucher et de m'approcher et surtout la venue étrange d'Ana.
Soudainement, pendant que mon esprit vagabondait dans des méandres aux murs sombres alors que je montais les escaliers de la maison close, je me rappelais cet événement avec plus de clarté : Petra, ne l'avait-elle pas reconnue ? Était-ce cela qui lui avait valu toute son agitation et ses questions ?
Pourquoi avais-je laissé cet événement filé ? N'était-ce pas la naissance de mes soupçons ? Comment avais-je pu être aussi bête et surtout, comment cela avait-il pu être possible ?
Je me défis de ma cape avant d'ouvrir violemment la porte de la chambre d'Ana, les bougies sur sa table de chevet et sa coiffeuse étaient allumées et je mis un certain temps à remarquer qu'elle était assise au bout de son lit, caché par les voilages autour de sa couche.
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La Princesse des Rues : Redemption [TOME 2] - LEVI X READER -
FanfictionSix mois et une centaine de lettres perdues plus tard, le Caporal Chef Levi et celle qu'on surnomme à présent la succube de Mithras sont encore séparés. Leur amour inachevé a laissé un grand vide, un trou béant dans le cœur de l'homme, qui ignore to...