La pluie diluvienne frappait les pierres et les fenêtres, il y avait bien longtemps qu'il n'avait pas plus ainsi.
L'été triste de cette année encore plus triste me confortait dans ma peine.
Cachée et coupable, je me demandais si la lune veillait encore sur moi mais surtout si elle veillait encore sur lui.
Je contemplais le paysage à travers par la fenêtre trouble en verre épais : les champs à perte de vue s'agitaient sous le vent et sa fureur.
Edward rentra en catastrophe, invitant les bourrasques de vent à l'intérieur. À cause de cela, un bon nombre de petits pots en verre vide tombèrent et roulèrent sur le sol. Agacée, je les ramassais en soufflant et en repoussant les feuilles qui s'étaient invité dans la petite entrée.
- Ne mets pas de l'eau partout ! M'écriais-je en refermant la porte à la hâte.
Le blond ôta ses bottes rapidement et il avait raison de se presser : je n'étais pas d'humeur à plaisanter. J'étais au sommet d'un pic d'énervement et tous mes sens étaient au maximum de leur frustration. Cela n'arrivait pas souvent mais en sentant les palpitations dans ma poitrine, j'en concluais que c'était sûrement un excès de millepertuis.
Après avoir enlevé ses vêtements d'extérieur, il me tendit fièrement son sac en cuir ouvert, sa frange blonde dégoulinantes d'eau de pluie :
- Regarde, des poires et des abricots !
Intriguée, je regardais le contenu du sac. Son grand sourire m'interpellait :
- Qu'est-ce que tu fais avec ça ? Comment tu en as eu ?
- Au verger de Roselinger, quand la femme du maraîcher à su que son mari payait les services d'une jeune femme à quelques kilomètres de là elle était dans tout ses états. Elle m'a donné ses réserves en me faisant promettre de ne rien dire.
L'animal.
Il avait dit cela avec une telle fierté que j'en restais presque sans voix. Il ressemblait à un enfant qui lui montrait fièrement sa collection de pierres colorées.
- Tu es dingue ? Me contentais-je de lui demander.
- Non, je suis l'homme de la maison et je m'assure qu'on ne manque de rien, admit-il.
- C'est ridicule !
- Pas du tout et en éliminant cet homme de tes clients je peux rajouter le fils du meunier qui nous règlera partiellement en miche de pain, se réjouissait le blond en faisant des comptes dans sa tête.
Exaspérée, je l'écoutais m'énoncer ses plans ridicules. Edward était ainsi, il devait toujours avoir des résultats, des raisons à ses agissements . Évidemment, cela me rappelait que je n'étais aussi qu'un pion sur son échiquier.
Edward était un intellectuel et un stratège qui avait choisi le mal. Un homme qui préférait les maisons de passes au mariage et qui était capable de se contenter de l'inconfort d'une chaumière perdue entre la plaine et la foret pour mettre à bien ses plans.
Il était le plus effroyable de tous : celui qui n'avait rien à perdre. Il avait beau chanter les louages de ses sentiments dès qu'il croisait mon regard, je savais pertinemment qu'il n'y avait pas une âme qu'il aimait dans ce monde, même pas la sienne. Il était son propre objet, son corps n'était qu'un vaisseau et la seule chose qu'il chérissait, c'était l'immatériel : le fruit de son intelligence et la source de son espoir.
En le regardant poser son butin dans la coupe en bois posée sur la petite table de la cuisine, j'eus un frisson. C'était un geste si simple et si banal pour le monstre qui, parfois, s'endormait dans mon lit.
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La Princesse des Rues : Redemption [TOME 2] - LEVI X READER -
FanfictionSix mois et une centaine de lettres perdues plus tard, le Caporal Chef Levi et celle qu'on surnomme à présent la succube de Mithras sont encore séparés. Leur amour inachevé a laissé un grand vide, un trou béant dans le cœur de l'homme, qui ignore to...