Chapitre 70 : Hérédité

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Nous avions préparé du thé et des beignets de légumes, car c'était la douceur qu'Erika aimait le plus. Elle était à l'étage avec Eva et Ana, proscrite dans sa chambre depuis la veille. Le plateau en bois que Sam m'avait demandé de porter était lourd car elle y avait posé notre théière en fonte pour la monter à l'étage. Je m'en occupais car j'étais déjà plus grande qu'elle à cette époque, en y repensant Sam n'a jamais grandit depuis ses 15 ans.

Les marches en bois grinçaient sous mes pieds et mes doigts supportaient difficilement le poids du plateau, j'avais hâte de m'en débarrasser. L'accès au premier étage ne m'avait jamais paru aussi haut.

Sur le palier, Lisa nous attendait. Elle avait laissé sa main posée sur la poignée de la porte de la chambre de la rousse pour nous l'ouvrir.

- On ne pose pas de question, soyez gentilles avec elle, murmura-t-elle en nous regardant.

Nous hochâmes la tête pour acquiescer, légèrement nerveuses.

Le rideau était à moitié fermé : Eva était au pied du lit d'Erika et Ana était en train de taper ses coussins.

- Regarde, les filles t'ont apportées de quoi manger, affirma la blonde en se levant.

- Je n'ai pas faim...La coupa Erika en regardant ses jambes qu'elle avait allongées sur son lit.

La pile de couvertures étendue sur son lit paraissait bien trop imposante pour une journée de mai, mais ma méconnaissance du procédé supposait que c'était nécessaire dans ces moments-là.

J'échangeais un regard déçu avec Sam qui me fit un clin d'œil. Elle prit l'assiette de petit beignet et s'approcha d'Erika :

- On vient de les faire ils sont encore bien chauds !

- Je t'ai dit que je n'ai pas faim ! S'écria la rousse et frappa l'assiette d'un revers de la main.

Son geste fit perdre l'équilibre à Sam qui me poussa accidentellement. Je ne pus retenir le plateau plus longtemps et avant même qu'il ne touche le sol, la théière se renversa. Celle-ci déversa son eau brûlante sur le sol et les mollets de Sam.

Je ne pus entendre ses gémissements, car la voix d'Erika capta toute mon attention. Elle hurlait :

- J'en ai plus qu'assez de vous ! Vous venez de débarquer et vous pensez que vous pouvez prendre nos places !

- Erika ! Tenta Eva, en s'approchant d'elle pour la faire baisser d'un ton.

A ce moment j'eus l'impression que sa voix avait provoqué un écho dans la petite chambre, elle avait résonné dans ma cage thoracique comme si elle me rappelait un souvenir lointain.

J'avais 16 ans à cette période, quel souvenir lointain pouvais-je avoir ?

- C'est vrai ! Surtout toi ! Me lança-t-elle, C'est de ta faute ! Tu me regardes de haut avec tes grands airs ! Ils ne parlent plus que de toi !

- Erika ça suffit ! S'interposa Ana, tu souffres, mais laisse les plus jeunes en dehors de ça !

La blonde fit barrière avec son corps entre nous et Erika , comme pour empêcher ses mots de nous atteindre.

- Elle a raison, tu es injuste c'est toi qui a choisit t'interrompre cette grossesse ! Pas nous ! Renchérit Eva alors qu'Ana nous aidait à ramasser les couverts étalés sur le parquet.

Les aînées s'échangèrent un regard entendu et Eva nous emmena à l'extérieur de la pièce sans nous en dire plus.

Ce fut la première et dernière fois que je vis ce feu dans les yeux d'Erika et que je sentis du venin dans ses paroles.

La Princesse des Rues : Redemption [TOME 2] - LEVI X READER -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant